Chronique Album
Date de sortie : 26.01.2024
Label : AWAL
Rédigé par
Adonis Didier, le 28 janvier 2024
Peut-on être fan de Radiohead en 2024 ? Sans doute, oui, malgré le fait que j'ai de ces gens l'image d'un quarantenaire en col roulé portant des lunettes à monture épaisse, meilleur ami du vendeur hi-fi du Darty du coin, parce que tu comprends les meilleures vibes du dernier album de The Smile c'est entre la septième et la onzième harmonique. Et s'il y a des fans, peut-on alors décemment se permettre de sortir un fac-similé d'un album de Radiohead en 2024 ? Les quatre londoniens de junodream vous répondront que oui, mon avis personnel sera nettement plus mitigé.
Prenons déjà la pochette. Tous les fans de Radiohead ayant survécu à l'insulte introductive gratuite reconnaîtront en un coup d'œil un négatif à peine déguisé de celle de A Moon Shaped Pool, l'album se nommant en plus Pools Of Colour, on ne sait plus dire si la chose est une référence, une blague cynique, une réflexion philosophique sur la nature du spectre lumineux, ou tout simplement le constat que Radiohead, c'était mieux en couleur. Et tant qu'à faire une chronique sur Radiohead, ce premier album de Junodream s'ouvre sur Fever Dream, dans un feeling « Optimistic jusqu'à ce que j'aille réécouter Optimistic » assez symbolique de l'album.
Car plutôt qu'un rêve fiévreux, c'est un rêve sympathique et brumeux qui nous trouve, mêlant références sur références des années 90, avec l'impression d'avoir croisé en songes l'époque folk 10,000Hz Legend de Air et Beck dans du Radiohead doucereux période Kid A, et je peine déjà à trouver beaucoup plus à en dire tant cette description fonctionne pour 90% de l'album. Et oui, malgré toute la qualité de ces références, c'est bien un souci. Car quitte à s'inspirer, autant s'inspirer jusqu'au bout, alors récupérez aussi l'électricité, l'exutoire, le déséquilibre, les Just, les Electioneering, les My Iron Lung, et apprenez qu'un album se construit de hauts et de bas, de montées et de descentes, d'accélérations et de freinages. Et même si à ne faire qu'accélérer on finit souvent dans le mur, à ne faire que freiner on fait majoritairement du sur place.
Une belle métaphore automobile pour un album tout aussi beau, mais qui ne parvient ni à s'extraire de ses références, ni à comprendre ce qui a fait de Radiohead, Air, ou Spiritualized des monuments de la musique moderne. Alors on s'oubliera dans les magnifiques Kitchen Sink Drama et Lullaby, toujours à la limite du plagiat, en se rappelant que Thom Yorke a beau être devenu le cliché du musicien hipster satellisé au cours des vingt dernières années, Radiohead n'en reste pas moins un mur porteur du rock anglais, une influence omniprésente en avance sur son temps, et un triptyque d'albums légendaires dont le meilleur reste évidemment The Bends (je vous laisse vous battre dans les commentaires).