Cast

En 1995, un soir de novembre, Paris accueillait dans son Zénith Cast qui caracolaient alors dans les charts anglais et se révélaient être la nouvelle révélation made in Britpop, apparaîssant dans toute la presse musicale aux côtés de Suede, Blur et leurs meilleurs ennemis Oasis. Leur premier album All Change paru chez Polydor, tous les moyens étaient alors déployés pour leur assurer la meilleure des vitrines. De là, un second disque en 1997 intitulé Mother Nature Calls, une petite rétrogradation pour leur second passage à Paris au Café de la Danse mais toujours la même verve partagée avec leurs compatriotes alors au firmament du rock anglais.

N'étant pas présente à ces deux concerts mais ayant comme tout lycéen à Doc Martens de l'époque tendu l'oreille vers le groupe de Liverpool, alors sur les bons conseils des Inrocks et de Bernard Lenoir, nous avons apprécié cette pop vitaminée à souhait. Par la suite, reconnaissons que Cast ont d'une part peiné à briller de nouveau dans l'Hexagone et ont d'autre part suivi le chemin de beaucoup d'autres formations issues de la même génération : noyé dans la masse et subissant rapidement des tensions parmi ses membres fondateurs, le groupe a disparu durant les années 2000, chacun poursuivant son petit bonhomme de chemin.


Comme d'autres survivants de cette époque dorée, la reformation a suivi et Cast nous ont proposé en 2011 un nouvel album Troubled Times dans leur plus belle tradition pop rock mélodique. Depuis c'est de façon très irrégulière que Cast sont revenus sur le devant de la scène, leur leader John Power ayant sorti quelques albums en solo. Ayant depuis lors perdu de vue les aventures de ces derniers, nous faisons amende honorable en découvrant la nouvelle production de Cast, aujourd'hui composé de John Power, Liam Tyson et Keith O'Neill intitulée Love Is The Call. Une chose est sûre, cette nouvelle immersion dans la musique très feel good du groupe nous rappelle de fort agréables souvenirs.

Le disque reprend allégrement les codes et formules qui font l'identité de Cast : baignés dans le Mersey Sound depuis leur enfance, les musiciens n'ont eu de cesse de produire des titres pop qui fleurent bon l'énergie délicieusement juvénile des 60s, au son de guitares pêchues portées par ce chant toujours en canon, doublé par de multiples chœurs, rendant le tout très harmonieux. En 2024, Cast semblent ne pas avoir pris une ride, aidés en cela par le timbre de voix de John Power qui demeure incroyablement nasillard pour un homme de son âge. Avec comme fil conducteur les sentiments amoureux, on retrouve une certaine candeur dans des titres comme Bluebird, Forever And A Day, Far Away ou Rain That Falls où cette avalanche de tambourin évoque une époque qui n'est plus.
Certains morceaux prennent le pari d'être plus incisifs comme Starry Eyes, I Have Been Waiting et son riff presque hard rock ou Look Around qui sonne un peu plus moderne. A l'opposé, d'autres titres semblent directement extraits d'un album d'un des nombreux groupes passés sur la scène du Cavern Club mais qui n'a jamais percé, dissimulé par l'ombre imposante des Fab Four tels Love You Like You I Do et Love Is The Call. Comme un petit voyage dans le temps, nous nous sentons littéralement transposés dans le Liverpool d'antan, une sensation plaisante mais qui paraît légèrement surannée en 2024.


Et pourtant, Cast ne sont pas les seuls à se nourrir de ce glorieux héritage, le meilleur exemple étant notre ami Miles Kane qui sait habilement jouer de ces mêmes codes tout en leur donnant cette touche très 21ème siècle. Mais s'agissant de Cast et de leurs glorieuses racines issues du terreau fertile de la Britpop, nous étions en droit d'attendre de leur part un sérieux renouvellement, ces derniers étant de surcroît portés aux nues par les non moins glorieux frères Gallagher qui eux n'hésitent pas à mélanger les genres quand cela leur prend.

Malheureusement, Cast n'ont semble-t-il pas saisi cette nouvelle opportunité pour tenter leur mue, reprenant fidèlement la même recette qui certes est leur marque de fabrique mais qui les empêche de s'émanciper d'un passé qui commence un peu à peser à l'oreille de l'auditeur. Ainsi, Love Is The Call satisfera les adeptes de la toute première heure mais nous semble d'ores et déjà désuet parmi la riche et audacieuse scène émergente anglaise du moment.