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SCALER

Endlessly

SCALER - Endlessly
Chronique Album
Date de sortie : 26.09.2025
Label : Black Acre
35
Rédigé par Franck Narquin, le 22 septembre 2025
Ex-SCALPING, SCALER se sont d'abord faits connaître comme machine de guerre live, quelque part entre rave indus et concert noise. Leur premier album, Void (2022), en était le miroir parfait, un bloc de béton armé, monolithique et sans concession, pensé pour broyer les tympans plus que pour charmer les mélomanes. Avec Endlessly, le groupe de Bristol opère une mutation sensible sur ces dix titres, dont la moitié invitent des voix extérieures. L'alternance de morceaux instrumentaux/chantés structure tout le disque et lui confère à la fois sa force et sa faiblesse.

La progression est claire, les cinq instrumentaux comme les cinq morceaux chantés montent en intensité, du plus doux au plus dur. L'effet positif saute aux oreilles, les morceaux vocaux servent de sas, ouvrent une porte d'entrée au milieu de passages IDM indus qui pourraient sinon tourner à l'épreuve physique. L'effet pervers aussi, on a parfois l'impression d'écouter deux EPs enchevêtrés l'un avec l'autre, plutôt qu'un véritable album. Si Void était une forteresse, Endlessly ressemble davantage à une dalle fissurée, traversée de mirages et de failles.

Côté instrumentaux, SCALER restent fidèle à leurs obsessions, syncopes IDM façon Warp, lourdeur industrielle et pulsations écrasantes. Quiet When It Speaks s'avance comme une caresse mensongère, vite pulvérisée par Broken Entry et sa drum'n'bass mutante. (yearn) ose le minimalisme aride, Cold Storage s'écrase comme une enclume et Ravine referme le cycle dans une cathédrale à la Autechre. Puissant, oui, mais parfois déjà entendu, l'ombre de Pan Sonic et d'Aphex Twin plane toujours, et certains titres donnent plus l'impression d'enfoncer des portes déjà fracassées que d'ouvrir de nouveaux horizons.

C'est dans les morceaux chantés que l'album prend de l'ampleur. Salt (feat. Akiko Haruna) met en collision une voix fragile et un beat indus, Mirage (feat. Art School Girlfriend) ressuscite un trip-hop spectral, Evolve (feat. Tlya X An) s'orne de motifs arabisants à la Kiss Facility, Sinking In (feat. Shadow Stevie) flotte comme un fantôme ambient et Salvation (feat. ELDON) referme le disque dans une apocalypse indus-metal digne de Godflesh. C'est cette partie de l'album qui séduit le plus et qui permet à SCALER de s'ouvrir vers une musique plus ample et plus accessible sans renier leur univers sombre et menaçant.

Au fond, Endlessly est un disque de transition. Deux univers irréconciliables s'y affrontent, l'héritage Warp, sombre et cérébral, et l'ouverture vocale, plus mélodique, qui renvoie autant aux fantômes de Bristol qu'au Goddess de Fay Milton. Le résultat n'est pas toujours fluide, mais c'est précisément cette faille qui rend le disque captivant, un équilibre instable, quelque part entre rêve et cauchemar, entre béton et mirage.

Si Endlessly n'atteint pas toujours sa cible, il reste fascinant dans sa propre hésitation. SCALER ne tranchent pas entre rester un groupe culte de live indus ou devenir une formation hybride qui s'autorise la pop expérimentale. Ils préfèrent rester coincés entre deux mondes et y errer, endlessly.
tracklisting
    01. quiet when it speaks
  • 02. Salt (feat. Akiko Haruna)
  • 03. Broken Entry
  • 04. Mirage (feat. Art School Girlfriend)
  • 05. (yearn)
  • 06. Evolve (feat. Tlya X An)
  • 07. Cold Storage
  • 08. Sinking In (feat. Shadow Stevie)
  • 09. Salvation (feat. ELDON)
  • 10. Ravine
titres conseillés
    Salt - Evolve - Mirage
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