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Heartbeats Festival

Halluin, du 5 au 6 juin 2015

Live-report rédigé par Olivier Kalousdian le 17 juin 2015

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samedi 6
Ce plat pays qui est aussi le notre renferme de petits coins de verdure paisibles et enchanteurs, notamment sous un chaud jour de printemps annonçant les prémices de l'été. La petite ville de Halluin, située par si loin de Lille, est une typique bourgade du Nord au décor tiré des films des frères Dardenne. Ses maisons en briques rouges, ses rues désertées le soir et deux immenses éoliennes jouxtent, de quelques mètres, la frontière belge et la petite ville flamande de Menem.

Pour la première édition de ce festival franco-belge dont une des particularités est de posséder deux entrées et deux sorties dans deux pays différents, la programmation, étalée sur deux jours, n'a relativement parlant rien à envier aux festivals voisins, plus connus et plus importants. Metronomy et Caribou le premier jour ou dEUS, Anna Calvi et Róisín Murphy en clôture s'affichent sur l'unique scène pendant ces deux journées du Heartbeats festival 2015. C'est l'agence parisienne Super! qui est aux manettes.
En plein champs de blé, le chapiteau, l'espace presse et les loges – situées au bord du canal La Lys et au pied du port fluvial – sont traversés par une ligne de démarcation blanche. La concrétisation à la chaux d'une frontière qui n'existe plus depuis l'espace Schengen. D'un pas, les festivaliers et les artistes passent d'un pays à l'autre.

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Quand HÆLOS, nouvelle sensation downtempo issue de Londres, ouvre les hostilités à 17h10 (après, Rocky, que nous avons raté), le public se fait encore attendre. Il faut dire que la veille, les 3000 festivaliers venus acclamés Caribou ou Metronomy ont vécu un orage dantesque et quelques averses de grêles. Mais, la chaleur du samedi a presque complètement effacé ces affres météorologiques.
Jeune trio, bidouilleurs de machines électroniques devenant un vrai groupe composé de six musiciens pour la scène, HÆLOS s'attirent rapidement les faveurs du public par leurs compositions electro pop, parfois indie et légèrement mélancoliques. Douces et lentes – un peu trop peut être pour un début de programmation – les chansons comme Dust (avec son duo de voix féminin/masculin) ou Earth Not Above (qu'on a pu entendre sur nos ondes radio ces derniers mois) imposent une ambiance de chill-out et de sieste, allongé dans l'herbe grasse. Et même si le niveau sonore dépasse allégrement l'acceptable pour les premiers rangs, celles et ceux qui ont trouvé un point d'ombre sous le chapiteau ne le quittent pas et profitent du show et du prix de la bière, très abordable pour un festival, aux trois bars disponibles. En trio, HÆLOS ressemblent un peu à leurs aînés (professionnellement parlant) des London Grammar. Lotti (chanteuse), Dom (clavier) et Arthur (chanteur) partagent avec eux un look et une jeunesse quasi similaires. Mais leurs influences sont plus anciennes, elles puisent dans le trip-hop des années 90 quand Massive Attack, Archive ou Portishead excellaient dans ce courant qui a vécu.

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Pendant que le groupe canadien, Badbadnotgood poursuit le line-up du jour sous le chapiteau qui abrite la scène du Heartbeats, HÆLOS nous offrent une de leurs premières interviews, le long du canal de la Lys et des bateaux qui sont amarrés au port fluvial de la ville de Halluin.
Comme souvent, depuis son avènement en 2011, c'est l'arrivée sur scène d'Anna Calvi qui va réellement lancer cette deuxième journée de festival. Vêtue d'un pantalon noir et d'un chemisier blanc surmontés d'un rouge à lèvres pétant, ce petit bout de femme d'un mètre cinquante cinq va mettre tout le monde d'accord, dès son premier titre. Une reprise de Suicide, Ghost Rider, que personne n'attendait ici et qu'elle n'avait jamais joué live en France, jusque-là. Présente sur son EP, Strange Weather, sorti en 2014, cette reprise surprend de la part de celle qui était, jusqu'ici, plus reconnue pour sa réinterprétation de Charles Aznavour (Jezebel). Mais, elle ne déçoit pas. Moins binaire et froid que sur la version Vega/Reed, ce Ghost Rider bénéficie de la séduisante voix de la belle Anglaise et d'une instrumentation classique (batterie, basse, guitare, clavier) et lui offrent un peu d'humanité.
S'ensuivent les classiques d'Anna Calvi dont les très attendus Desire et Blackout. Douze titres en tout dont Jezebel en conclusion de ce set électrique et charmeur. Les HÆLOS, dans le public, n'en perdront pas une miette.

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José González aura besoin de tout son talent et de sa voix suave pour espérer succéder, dignement, à sa prédécesseur. Oui, mais voilà. Si le talent du Suédois n'est plus à démontrer, sa musique intimiste, elle, ne convient que difficilement à une grande scène et un festival. C'est dans des configurations de petite salle que s'expriment le mieux des titres solo comme Crosses ou des reprises de Massive Attack comme celle de Teardrop.

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Pour les fans de festival rock, c'est bien le régional de l'étape, dEUS, qui fait office de méga star en cette journée de clôture. Avec vingt minutes de retard pour cause de clavier récalcitrant, le groupe de Tom Barman verra quelques centaines de festivaliers combler un public moins nombreux que la veille et qui ont pris leur ticket du jour pour eux, et seulement pour eux. Il est vrai qu'on parle plus facilement Flamand que Français au Heartbeats Festival.
Tom Barman était déjà sur scène la veille avec son duo Magnus (en compagnie de CJ Bolland), mais n'a rien perdu de l'énergie démontrée le vendredi soir. Aussi rock qu'un Mick Jagger et aussi Roll qu'un Keith Richard, Tom Barman et Mauro Pawlowski excitent une audience déjà bien chauffée et entament un tour de chant qui englobe The Architect, Suds And Soda et l'inévitable Instant Street, véritable bombe à fragmentation sonore, avec son tempo crescendo et qui bénéficiera d'une extented version frisant les sept minutes.

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Après ce condensé de rock européen, place aux beats électro. L'Irlandaise Róisín Murphy, ex chanteuse du groupe Moloko, débarque accoutrée comme à l'accoutumée, de tenues et lunettes dignes d'un roman de SF ou d'un défilé de Dries Van Noten. Des costumes de scène et des lunettes qui vont changer à chaque titre ou presque. Revenue au-devant de la scène en solo avec Overpowered (qu'elle ne jouera pas ce soir) elle égrène des titres électro break, parfois jazzy, piqués à son ancien groupe (Dirty Monkey, Tatty Narja, Pure Pleasure Seeker...) et dans son propre répertoire. Evil Eyes et son beat techno vont emballer le public restant (clairsemé après la prestation de dEUS) et contribuer à faire sautiller les nostalgiques des rave-party. La reprise de David Morales (Golden Era) renvoie à des années folles, téléportées dans un futur lointain, où les musiciens sont remplacés par des mannequins dont les têtes et les yeux s'animent en cadence. Un set sous amphétamines qui finira d'achever le Heartbeats Festival 2015 sans aucun incident notoire – il faut dire que la maréchaussée française et belge veillaient au grain et en tenue, dans les allées du festival, une première ! – et sur une lune anormalement imposante et rougeoyante. De bon augure pour l'édition 2016.
artistes
    Rocky
    HÆLOS
    Badbadnotgood
    Anna Calvi
    José González
    dEUS
    Róisín Murphy
photos du festival