Dernier jour que l'on passe sur la presqu'île, il s'agit à ce moment-là de tenir la fatigue excessive. Aucun problème : le dimanche va être fou, on le savait déjà grâce aux concerts prévus tout au long de la journée. La boue s'accumule sur le site des Eurockéennes ; rock'n'roll et temps très anglais.

Beaucoup semblent chérir cette journée placée essentiellement sous le signe du rock. Mais la journée débute avec
Rocky, groupe d'electro-pop dansante et groovy. En passant du rock aux ballades reggae sans efforts, Inès Kokou porte la soul comme une robe. Un concert teinté de sons années 80 à la Soft Cell et The Human League, grâce à leur synthétiseur cheap et vintage. Pour dresser un bilan : chacun des quatre jours fut synonyme de groupes prometteurs pour ouvrir ce grand bal.

La pluie tombe toujours lorsque le concert suivant débute :
Diamante Eléctrico, une formation rock'n'roll colombienne sur la scène Loggia. Malgré leurs riffs stoner, leur musique peut tout aussi bien prendre une tournure pop dans ses mélodies. Autant de moments post-rock qui peuvent contribuer à brouiller leur étiquette, les humeurs se mélangent. Une marque de fabrique assumée et pleinement énergique.

Il y a eu des concerts que nous attendons avec impatience, à la rédaction.
Royal Blood sur la grande scène, il était inconcevable de le louper. Sur scène, le groupe réalise et pousse le concept de la musique à deux. L'hybride son de basse et le jeu bien construit du batteur rendent le rock baveux. Bouillonnants à 19h, les deux gars de Brighton allongent une liste de chansons à un tempo très soutenu, sans pour autant oublier de s'adresser à la foule pour quelques anecdotes. Le public est électrifié. Le batteur nous remercie par un solo de batterie façon John Bonham en frappant les toms. Outre une technique bien maîtrisée, la machine anglaise satisfait beaucoup de monde. Le concert se termine sur un
Out Of The Black, comme à son habitude, foudroyant.

21h15, la soirée bat son plein pour un changement de décor,
Phoenix arrivent pour briller. Si
Ti Amo rend les avis partagés, on peut vous l'assurer : les guitares sont très présentes sur scène. Thomas Mars, habillé d'une chemise à palmiers, nous chante les nouveaux titres du groupe avec habileté. Un énorme point fort pour la mise en scène et le décor tout bonnement coloré. Le groupe s'amuse sur une plateforme lumineuse très disco, le tout filmé sur le dessus. Le show visuel permet ainsi d'accompagner les passages instrumentaux
Love Like A Sunset/Bankrupt de manière fascinante. Un énorme voyage dans lequel on retrouve
Lisztomania, le sensationnel
Girlfriend ou encore
If I Ever Feel Better. Tout le monde échange les pas de danse : Wolgang Amadeus Mozart ? On aurait pensé à L'Ode à la Joie.

On part ensuite voir
Savages sur la scène d'à côté. Bien moins gentilles musicalement, les quatre filles renversnt le post-punk jusqu'à la no-wave. Autrement dit, un rock sombre bien énervé au ton années 90. Les larsens se multiplient sous le tempo très tendu de la batterie (remarquable musicienne, d'ailleurs) : une incroyable puissance sonore. Avec une grosse poigne et des secousses sismiques, les anglaises donnent un concert notable parmi les quatre jours. Elles repartent en nous laissant enfoncés au sol, transformés par l'expérience.

Les fans d'
Arcade Fire sont nombreux et investissent la grande scène depuis des heures. Le groupe est attendu à minuit sur une scène décorée d'innombrables instruments. Dix-sept chansons époustouflantes constituent un Best Of des canadiens. Ils débutent sur
Everyhting Now, déjà apprise par cœur par les festivaliers malgré sa sortie récente. La prestance de Will Butler et Régine Chassagne dirige le public très attentif. Ils ont de cette façon de théâtraliser et de pousser à l'art total. L'église du rock propose l'hymne
No Cars Go, le superbe
Neon Bible ou
The Suburbs dans un esprit très peace. Tout est en place chez eux, absolument tout. Dans une humeur ultra festive,
Wake Up est exécutée sous les sifflements de fusées lancées dans le ciel : très grand final où les spectateurs chantent aussi fort que le groupe sous le feu d'artifice annuel.
Après plusieurs minutes écoulées, chacun reprend le chemin de la sortie : seule l'immense fatigue de ces quatre jours nous fait partir plus vite. L'édition 2017 a été excellente pour ce festival qui a battu son record d'affluence : 130 000 visiteurs. On se répétera peut-être en disant que les Eurockéennes, c'est un festival qui mérite l'expérience, puisqu'il propose des programmations toujours plus mixtes. Dur retour à la réalité le lundi suivant.