Après le fiasco total que les Cribs avaient subi il y a un an en première partie d'Aerosmith à Bercy, on aurait pu croire qu'ils se méfieraient désormais de venir jouer avec des gros groupes américains dans des salles beaucoup trop grandes pour eux. Mais les Cribs ne sont pas le genre de groupe à se laisser décourager pour si peu. C'est donc avec détermination, mais sans Johnny Marr, qui a annoncé son départ du groupe en avril dernier, qu'ils montent sur la scène du Zénith de Paris, en ouverture des Strokes.
Les New-Yorkais sont attendus comme des messies pour leur unique date en France, leur public n'a que faire d'un groupe d'Anglais mal fagotés, mais les Cribs se fichent pas mal de la hype; là où on leur demande de jouer, ils jouent. C'est donc accompagnés d'un nouveau guitariste, David Jones du groupe mancunien Nine Black Alps, que les frères Jarman déboulent sur la scène parisienne et entament
Cheat On Me, sous l'oeil dubitatif des
hipsters rassemblés en masse. Ils sortent alors de leur manche un de leurs meilleurs morceaux,
I'm A Realist, qui apparemment remplit sa mission et commence à décoincer les quelques récalcitrants.
David Jones reste en fond de scène, on ne le voit pas beaucoup, mais il s'excite énormément à la tâche et saute sans arrêt. Ryan lance une première tentative de communication avec le public juste avant
We Were Aborted, la réaction est assez timide mais pas totalement hostile. Le fantôme de Bercy rôde toujours, Gary raconte l'anecdote d'un air laconique, à un public qui ne comprend pas de quoi il parle. Le départ de Johnny Marr, loin de les déstabiliser, les encourage à revenir aux fondamentaux de leurs performances live; ils ressortent de vieilles habitudes, comme par exemple cette reprise de
Concrete Life de Huggy Bear enchaînée avec
We Can No Longer Cheat You.

Puis c'est au tour de leur chanson la plus emblématique,
Hey Scenesters!, leur fameuse diatribe contre le milieu du showbiz, qui prend tout son sens devant un parterre de
hypeux venus se montrer dans leurs costumes de chez The Kooples. Les Jarman y mettent tout leur coeur, Ryan grimpe sur les retours, renverse son pied de micro avec le manche de sa guitare, Ross termine la chanson en escaladant sa batterie. L'atmosphère se fait un peu plus électrique. Les premières jeunes filles évanouies se font évacuer par les secours pendant
Another Number, un autre de leurs anciens morceaux. Puis c'est au tour de
Be Safe, leur collaboration avec Lee Ranaldo de Sonic Youth, avec ses couplets parlés qui rappellent énormément
Popular de Nada Surf. Ils enchaînent directement avec l'énergique
Mirror Kissers, que les quelques adolescents dans les premiers rangs semblent apprécier, eux qui étaient sans doute bien trop jeunes pour avoir connu les Strokes à l'époque où ils étaient bons.
C'est donc encouragés par les quelques applaudissements qu'ils entament la dernière ligne droite de leur set avec
Men's Needs, pour finir sur l'épopée
City Of Bugs. Ryan reprend les parties de guitare de Johnny Marr, s'amuse à prendre des poses de
guitar hero, Gary fait glisser le manche de sa basse le long de son pied de micro, puis le set se termine avec Ross de nouveau perché sur son kit, et Ryan créant des larsens en mettant sa guitare sur son ampli.

S'il était facile de s'inquiéter pour eux, la prestation de ce soir a permis de montrer toutes les ressources dont les Jarman disposent. Avec ou sans Johnny Marr, les Cribs seront toujours les Cribs.