Plus de cinq ans après leur passage à La Cigale, The Coral revenaient enfin à Paris ce mercredi 6 avril pour défendre leur huitième album, l'étonnamment rock
Distance Inbetween. Accompagnés des cinq mancuniens de Blossoms, la soirée se plaçait donc clairement sous le signe de l'électricité.

Auteurs de deux EPs l'an passé et fin février,
Blossoms envahissent la scène du Trianon pour trente minutes d'un set carré, à la pop entraînante à forte dose de synthé du début des années 2000, emprunté aussi bien aux Killers des débuts qu'aux Doors. Un des points culminants du concert est bien évidemment
Charlemagne, issu de
Charlemagne EP paru en octobre dernier, au refrain immédiat et fédérateur.
At Most A Kiss, tiré de leur dernier EP, se place comme un digne successeur de
Charlemagne, porté par le synthé invincible de Myles Kellock – qui parvient de justesse à éviter le kitsch. La voix de Tom Ogden et ses faux airs d'Alex Turner se fait puissante et claire, tandis que les solos de guitare de Josh Dewhurst parsèment génialement le set, notamment sur un
Blow ravageur, leur premier single et très certainement une de leurs meilleures compositions.

Alors que
The Coral s'apprêtent à faire leur entrée sur scène, un constat s'impose rapidement : le Trianon n'est qu'à moitié complet. Difficile de savoir si c'est la déception générale qu'a procuré
Distance Inbetween ou le fait que le groupe ne soit pas venu sur la capitale depuis 2010, mais les balcons ne sont pas utilisés et la fosse elle-même n'est pas entièrement remplie...
Débutant sur cinq titres de leur dernier opus, assez mineur au vu de sa discographie impeccable entre 2002 et 2010, il est difficile de s'investir pleinement dans le show sur sa première demi-heure.
Million Eyes tire relativement son épingle du jeu grâce à son refrain entraînant, de même que l'excitant single
Chasing The Tail Of A Dream qui revient quant à lui davantage aux sonorités des débuts.
Ce n'est qu'à partir de
Simon Diamond, issu de leur
debut album, que les choses sérieuses commencent. Bien que cette version live soit moins aboutie que l'originale du fait de l'agencement rock classique (guitares/basse/batterie/claviers), elle reste néanmoins très efficace, notamment dans son dernier quart qui se veut toujours aussi jubilatoire. Le second disque après
Distance Inbetween à être fortement représenté ce soir-là est
Roots & Echoes, avec l'enchaînement de trois de ses chansons, à commencer par l'entêtante
Who's Gonna Find Me.
S'ensuivent
In The Rain et
Jacqueline : les premiers accords du riff mémorable d'
In The Rain mettent tout le monde d'accord, faisant hurler et clapper des mains. La batterie de Ian Skelly s'emballe aussitôt, faisant bouger toute l'audience, avant que James Skelly ne sorte ses
« I am a stranger to the life » dévastateurs puis que ne rugisse en fin de parcours le solo de guitare flamboyant de Paul Molloy. Quelques minutes plus tard, tout le Trianon entonne le doux refrain de
Jacqueline.
She Sings The Mourning, première plage de
The Invisible Invasion, déballe, elle, son psych-rock incendiaire, aux guitares dissonantes et à la batterie militaire, avant que le tout ne termine dans un délicieux capharnaüm. Le fascinant
Don't Think You're The First de leur second disque
Magic & Medecine fait ensuite son apparition, perdant son côté western pour arborer un pendant rock qui lui sied aussi sur scène. Plus brut, il impose tout de même son pont, beau et posé, tandis que son refrain est clamé par l'ensemble de l'assemblée.
Retour de
Roots & Echoes avec la ballade assez dispensable
Put The Sun Back puis
She's Got A Reason, un des titres de The Coral qui, lui, fonctionnent le mieux en live, aussi bien de par sa rythmique que son refrain simple et irrésistible qui ne demande qu'à être chanté par tout le monde. Les mélodies sont, qui plus est, renforcées par les arrangements de Paul Molloy qui ne cesse de jouer avec sa guitare tout au long de la composition, ainsi que par sa seconde moitié, réarrangée sur scène, pour prendre un aspect purement rock'n'roll.
Magic & Medecine et
The Invisible Invasion reviennent une dernière fois à travers
Pass It On et
In The Morning. La première, reprise en chœur par le public, reste fidèle à l'originale, mettant en avant la basse de Paul Duffy et la guitare acoustique. Les synthés de Nick Power posent ensuite d'entrée le ton, le groupe interprétant un
In The Morning dansant et décontracté.
Calendars And Clocks vient conclure un set de près de deux heures, prenant son temps, entre la phase instrumentale à la limite du prog folk-rock et le pont saisissant porté par Skelly.
Mais The Coral n'en restent pas là avec leur fameux premier album, revenant sur scène pour jouer rien de moins que deux autres morceaux tirés de
The Coral, à savoir
Goodbye et
Dreaming Of You. Dès les premiers accords de
Goodbye, l'audience est aux anges. A la fois dérangée et mélancolique, la chanson suit son rythme de croisière, un peu schizophrène par moment. Le court pont instrumental aux deux tiers de la version studio dure ici plus de cinq minutes, déballant un psych rock qui s'émancipe seconde après seconde dans du noisy bordélique, pour ne repartir que de plus belle sur le riff inoubliable et enflammé qui fait son petit effet tant le Trianon ne fait plus qu'un avec la formation anglaise.
Il en va de même sur
Dreaming Of You qui voit tous les instruments être en totale harmonie, les spectateurs percevant chacun d'eux à tout instant, entre la basse ronde, le clavier alien, la rythmique carrée, la sobriété des guitares et le chant de Skelly, puissant et envoûtant. Les chœurs de fin sont repris par toute la salle dans une cohésion forte et bon enfant. Enfin, le groupe termine sur le rock expérimental de
Fear Machine, entre krautrock et psych rock, à mille lieues de tout autre morceau qu'il a composé jusque-là. Une belle façon de conclure ces deux heures de show qui auront pourtant semblé durer que très peu de temps.
21 titres interprétés ce soir-là et pourtant, hélas, pas de
I Remember When ni
Bill McCai... Mais on ne peut raisonnablement être déçu tant les cinq musiciens auront su être généreux, piochant parmi une riche discographie de laquelle il allait forcément nous manquer des morceaux préférés. The Coral se rattrapent ainsi de ne pas être revenus plus tôt sur Paris, une soirée que tout fan du groupe n'a clairement pas pu manquer !