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Milburn

Paris, Supersonic - 23 novembre 2017

Live-report par Julien Soullière

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Long time no see, dirait-on à un vieil ami jusqu'ici disparu de nos écrans radar. Difficile de personnifier le Supersonic au point de penser qu'il nous entendrait prononcer cette phrase, et puis ce n'est pas tant à ce lieu que l'on aimerait s'adresser qu'aux salles de concert plus globalement. La spontanéité qui émane d'un set, on peut vivre sans, mais c'est en la retrouvant après plusieurs mois de diète qu'on comprends qu'on est un peu mieux avec.

Le temps de gober un hot-dog veggie (ça ressemble pas mal à de la viande, en fait) et d'engloutir notre premier 50cl de bière, on se rue au plus près de la balustrade pour encourager Sheitan And The Pussy Magnets. Sheitan, c'est Rawad Kawas, accompagné de ses trois disciples. C'est certain, le clan de Villejuif connaît son sujet, celui érigé il y a des décennies par The Pretty Things, et remis au goût - furieux - du jour par Arctic Monkeys. D'ailleurs, et peut-être parce que ce sont ceux dont on se sent le plus proche, génération oblige, c'est à ces derniers que le groupe francilien nous renvoie le plus. Les deux groupes partagent effectivement ce goût pour la guitare qui grince, la batterie qui s'exprime fort, pour les brisures de rythme, une nonchalance et un romantisme à peine voilés aussi. Et bien que moins connus que leurs contemporains, Sheitan And The Pussy Magnets n'en sont pas pour autant en pleine maturité. Le tout est entraînant, bien envoyé (beau boulot sur la balance) et parfaitement placé dans les relances. Une belle mise en bouche doublée d'une franche surprise.

Au contraire, The Belmondos, à l'image d'un leader franchement maussade au démarrage, ont semblé moins à leurs aises. On ne les connaissait pas avant ce soir, il est donc difficile de confirmer qu'ils appréhendaient leur passage sur scène. Et si trac il y avait, si c'est lui qui explique une première partie de set finalement très faible, ou s'il s'agit plus simplement d'un choix stratégique discutable dans l'agencement de la setlist. En tous les cas, il aura fallu attendre quelques titres avant que la folie douce du chanteur commence à taper dans le mille, que ses sbires s'abandonnent un peu, et que les compositions du groupe, perdues entre rock et psyché, commencent à sonner agréablement à nos oreilles.

Huit ans. Huit ans séparent les deux vies qu'auront eues Milburn jusqu'ici. Car le groupe est mort une première fois en 2008, avant de renaître de ses notes quelques années plus tard. Physiquement, et à l'heure de présenter leur nouvel album (Time), les bonshommes ont bien changé : le temps a fait son oeuvre, et à bien les regarder aujourd'hui, il est plus difficile encore de parier sur ce qu'ils vont avoir à nous servir.
Originaires de Sheffield (tiens, comme les Arctic Monkeys), Milburn aiment à jouer fort, très fort, et ce pour le plus grand bonheur d'un fan-club du jour essentiellement masculin, une agora bien décidée à fêter dignement la réunion de ses héros. Bien sûr, et comme cela arrive finalement souvent, les premiers rangs sont essentiellement constitués d'expatriés de par-delà la Manche. "Fuck The Brexit", comme le dira à la volé Joe Carnall, mais merci quand même aux représentants de la proche Albion d'être là ce soir, l'assurance d'une soirée agitée et essentiellement bon enfant. Cette motivation à toute épreuve, Milburn le leur rend bien, jouant avec une détermination aucunement forcée, et preuve de leur expérience dans le milieu. Le groupe n'en oubliera pas pour autant d'associer les frenchies à la fête, multipliant par la voix de son chanteur les remerciements à leur égard. C'était très sympa d'essayer.

A l'heure du départ, difficile de nier que la soirée était réussie, et pas seulement parce qu'elle était gratuite. Un concert, ça ne triche pas. Et c'est bien pour ça qu'il est nécessaire d'en faire.