A peine remis de la saison des festivals, au cours de laquelle on aura perdu deux paires de lunettes de soleil, un appareil photo, un dixième à chaque tympan, deux mois de salaire, trois ans d'espérance de vie et notre foie (mais jamais notre foi), la rentrée des concerts en salle débarque déjà avec un menu qui s'annonce gargantuesque ! Malgré les annulations, les tempêtes et les « golden pit », on aura tout de même assisté cet été à une ribambelle de beaux concerts, dont les plus éprouvants, excitants et mémorables resteront sûrement ceux d'IDLES, véritables expériences soniques, politiques et physiques.
Les festivités de l'été indien (soyons positifs et ne parlons pas encore d'automne) débutent donc en ce dimanche quatre septembre à Petit Bain, cet « équipement culturel flottant » flanqué sur les quais faisant face à la Bibliothèque François Mitterrand, avec de vieilles connaissances, les vétérans et héros du revival post-punk du début des années 2000, Maxïmo Park, épaulés par une belle découverte en première partie, le trio Peaness.

Malgré un réveil à trois heures du matin pour embarquer dans le vol de cinq heures de Manchester, les trois filles de
Peaness, originaires de Chester, affichent de grands sourires et dégagent une énergie communicative. Leur set de power pop « DIY » regorge de petites pépites vivifiantes. Dès la fin du premier morceau on ne regrette même plus d'avoir dû laisser si tôt notre place en terrasse ensoleillée pour s'engouffrer dans la salle inférieure si sombre de Petit bain. Poppy, punky et parfois girly, Peaness convainquent sans peine avec leur formule classique guitare, basse, batterie et leurs compositions simples mais efficaces et nous donnent envie de nous pencher un peu plus sur leur premier album,
World Full Of Worry, sorti cette année et que nos radars, pourtant d'habitude aiguisés, avaient malheureusement loupé.
Contrairement à Peaness, nous n'avions pas loupé le premier album de
Maxïmo Park, le cultissime
A Certain Trigger, amorçant un début de carrière en fanfare et plaçant le groupe tout en haut de la scène indie UK aux côtés de Franz Ferdinand ou de Bloc Party. Si leur deuxième album
Our Earthly Pleasure confirmait les attentes nées de son prédécesseur, il aura fallu patienter jusqu'à leur septième opus sorti en 2021,
Nature Always Wins, pour enfin retrouver le gang de Newcastle à son véritable niveau. Après plusieurs reports, nous attendions ainsi avec impatience leur venue en France, ceux-ci se faisant beaucoup trop rares dans nos contrées. Car si sur disque le groupe a par moment un peu perdu de sa superbe, sur scène leur énergie originelle est toujours demeurée intacte.

Le quintet de départ étant devenu trio à la suite des départs des membres fondateurs Archis Tiku et Lukas Wooler, Tom English, Duncan Lloyd et Paul Smith sont désormais accompagnés sur scène par Andrew Lowther à la basse et Jemma Freese aux claviers. Cette formation n'a pas grand-chose à envier à celle d'origine tant l'osmose entre les musiciens est palpable, délivrant avec la même maestria les hymnes post-punk (
Our Velocity), les perles pop (
Books From Boxes) et les hits dansants (
The Hero). En un mot, ils dépotent ! Si le public d'un Petit Bain bien rempli mais tout de même loin de déborder restera assez sage toute la soirée (la faute au retour de vacances, au dimanche ou aux tempes blanches ?), Paul Smith, tenue bariolée et chapeau noir vissé sur la caboche, ne cessera d'haranguer la foule et de grimper sur les enceintes comme s'il était à Glastonbury. Car si eux aussi ont dû se lever à trois heures du matin pour être à Paris ce soir, la faute à un tour-bus coincé en Pologne (on tachera d'en savoir bientôt plus sur cette histoire qui s'annonce croustillante), les anglais ne s'économisent pas et livrent un set généreux de dix-neuf titres faisant la part belle au dernier album (huit morceaux, sans compter leur dernier single
Great Art) et piochent dans leur large répertoire en évitant habilement de virer au simple concert Best Of, quitte à zapper quelques tubes attendus (pas de
Girls Who Play Guitar ou de
Going Missing par exemple).
En ouvrant le bal avec
All Of Me, locomotive du dernier album, et le clôturant avec l'inévitable
Apply Some Pressure, la bande à Paul Smith nous ont fait remonter le temps - près de vingt ans en à peine une heure trente - tout en prouvant que celui-ci n'avait que peu d'emprise sur eux. Rares mais précieux, Maxïmo Park sont un peu comme ce meilleur pote du lycée qu'on ne voit plus qu'une fois tous les deux ans mais avec qui on reprend toujours la conversation comme si on s'était quitté la veille.