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Modern English
Erica Nockalls

Paris, Petit Bain - 2 mai 2024

Live-report par Jean-Christophe Gé

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Il pleut encore sur Paris ce soir, le printemps se fait décidément attendre. Et il faut encore se rapprocher de l'eau pour descendre sur les quais de la Seine. Les corbeaux et les vieux punks rangés sont de sortie, ils s'engouffrent dans Petit Bain, une énorme boîte noire cachée dans une péniche jaune. A force d'être moderne depuis plus quarante ans, le groupe Modern English, signé un temps sur le mythique label 4AD (Bauhaus, Cocteau Twins, Lush, Pixies et plus récemment Dry Cleaning), est devenu classique.


C'est d'abord Jean-Charles Versari, guitariste d'Erica Nockalls, qui monte sur scène. Il lance une boîte à rythmes très forte qui fait trembler Petit Bain avant que la chanteuse/violoniste ne le rejoigne dans sa robe couleur de soleil pour peau d'âne rock. La guitare Jaguar et une douzaine d'effets couvrent la boîte à rythmes, alors que la voix en falsetto se pose sur le tout. Erica saisit son violon pour Mouth Full Of Something, elle joue comme un pantin désarticulé, le guitariste pose une seconde voix. Ce morceau accroche, même si le son est un peu brouillon. Le duo me fait penser à des troubadours médiévaux un peu gothiques. Ce sont eux qui ont demandé à Modern English de jouer en première partie, comme quoi le culot paie !


Le set de Modern English commence très fort, par 16 Days, premier titre de leur premier album. Le ton est donné, le groupe fait la part belle à ses anciens morceaux, et même si 1 2 3 4 vient de sortir, il n'en tireront que quatre titres. Derrière eux, en boucle un montage d'images de leurs pochettes et de courtes séquences vidéo, qui n'est pas vraiment nécessaire car le groupe a suffisamment de présence scénique, les images n'étant pas synchronisées avec la musique. Encore une fois, ce n'est pas forcément un mal, tant ce jeu de vidéos soutenant la musique empêche toute forme d'improvisation.

Des membres originaux, il reste aujourd'hui Robbie Grey au chant et Mick Conroy au clavier et à la basse, que l'on a revu il n'y a pas si longtemps avec Piroshka. Le line-up est complété par Ric Chandler à la batterie et Gabriel Sullivan à la guitare. C'est Robbie qui mène la troupe, il ressemble à un général de l'armée britannique en retraite, très chic dans ce qui semble être un uniforme dont les insignes sont en paillettes. Plus tard dans la soirée, même en t-shirt (à l'effigie de Modern English, of course), il gardera son élégance british. Il harangue le public et ne cache pas sa joie de voir celui-ci répondre aussi bien aux morceaux. Après toutes ces années, il n'est toujours pas blasé de voir une audience attentive et suspendue à ses chansons.

Après trois classiques, Robbie introduit Long In The Tooth, premier extrait de 1 2 3 4. Paradoxalement, alors que les groupes ont tendance à s'assagir avec le temps, ces deux chansons sonnent plus punk que les premières productions du groupe. Un rappel que Modern English ont commencé en pleine vague punk, et qu'ils viennent de tourner avec les Buzzcocks. Not My Leader enfonce le clou avec un morceau clairement politique alors que le groupe ne s'était jusque là pas vraiment illustré par son engagement.


Retour aux classiques avec quatre titres de l'album After The Snow, que Robbie introduit comme le plus vendu du groupe. Tables Turning a pris de la patine mais n'a rien perdu de sa tension, il est fabuleux de passer les décennies sans prendre une ride. La voix plus profonde de Robbie, le son plus brut de la guitare et l'absence d'artifices de production donnent une grande homogénéité aux morceaux, mais aussi un coup de frais et de vivacité qui leur vont bien.
Le tempo se ralentit un peu sur Carry Me Down, pour repartir de plus belle avec Black Houses. Les guitares acoustiques ne sont pas que pour les ballades tranquilles, comme le prouve Swan On Glass qui voit Robbie prendre une guitare pour la première fois du set. L'équipe du groupe danse aussi sur le côté de la scène, c'est la dernière date de la tournée et l'ambiance est excellente.

Le set principal finit très vite par Melts qui, en live, a un final qui s'accélère, Ric le batteur finissant au sprint. Quand il se lève pour sortir avant le rappel, je remarque son exceptionnelle moustache, alors que derrière ses fûts, il avait plus l'air d'un surfeur qui avait vu passer bon nombre de vagues, mais avec toujours la même concentration et la même joie.
Le groupe revient pour deux titres : Crazy Lovers, très rétro et qui est pourtant leur dernier single, et Moonbeam, seul morceau de l'excellent Take Me To The Trees sorti en 2016 joué ce soir.

Modern English finissent en beauté un set court, qui se concentre sur les deux premiers et deux derniers albums, démontrant que l'on peut être et avoir été.
setlist
    Erica Nockalls
    Build Me A Ship
    Mouth Full Of Something
    This Silent Dog
    Eiffel's Eye
    House Of Erica
    The King Of Want
    Making Friends With An Alien

    Modern English
    16 Days
    Gathering Dust
    Someone's Calling
    Long In The Tooth
    Not My Leader
    Out To Lunch
    After The Snow
    Life In The Gladhouse
    Tables Turning
    Carry Me Down
    Black Houses
    Swans On Glass
    I Melt With You
    ---
    Crazy Lovers
    Moonbeam
photos du concert
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