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Chapel Club

Paris, Scopitone - 27 avril 2010

Live-report par Olivier Kalousdian

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Il y a des soirs comme ça où on se dit qu’on aurait mieux fait de rester devant la télévision, le cerveau au repos devant Franck Dubosc dans Camping... Parti un peu tard au Scopitone, je frôle de trop près une cabine téléphonique dont la vitre explose sur moi et mon scooter ! Des centaines de morceaux éclatés mais toujours agglomérés tel un pare-brise fracassé et des milliers d’échardes de verre bien plus dangereuses, éparpillées sur le siège et autour de mon casque… Ça commence bien ! Arrivé au Scopitone, deux groupes sont censés précéder Chapel Club et, ayant roulé vite, je comptais bien en profiter... mal m’en a pris ; la liste des invitations n’est pas là et ne sera d’ailleurs jamais là ! Me voilà dehors à attendre !

Le Scopitone c’est une salle toute récente ouverte en octobre 2009 dans une cave de l’avenue de l’Opéra, adresse prestigieuse pour aller écouter du rock s’il en faut. Dans cette ancienne salle du Paris Paris, les nouveaux managers voulaient créer un endroit où l’on puisse faire la fête dès 19h et où l’on se sente chez soi. C’est un lieu qui se veut « rock indie » sur son site web mais qui s’affirme surtout très glamour et très hype dans la nuit branchée parisienne… Pas de néons criards, pas même d’enseigne pouvant renseigner les nouveaux arrivants perdus par l’adresse officielle (ndlr : 5 avenue de l’Opéra) alors que la salle se trouve rue de l’Echelle, juste une devanture mystérieuse et totalement noire. Il faut connaître ou passer son chemin.

22h, toujours pas de groupe, toujours pas de liste et une heure et demie que fais des aller-retour. Je ne dois mon salut qu’à une sympathique caissière se disant, à ma deuxième tentative que, dix-neuf ou vingt personnes au concert ce soir là, ça ne changerait pas grand chose !
Le groupe a déjà commencé son set et je découvre une salle peinte de noire comme sa devanture et dont la surface est bien inférieure à tout ce que je connais à Paris ! Rajoutons à cela plusieurs tables et canapés chics autour de la piste et l'on obtient facilement une sensation de remplissage avec trente ou quarante personnes à peine. La scène est à la même hauteur que le public : l’avantage, une proximité extrême avec le groupe. Pas certain que les musiciens apprécient autant que le public…

Chapel Club (le club de la Chapelle ?), ce sont cinq garçons dans le vent. Dans le vent de la mode façon retour à la new wave. Pantalons slim « feux au plancher », coupes de cheveux plagiant Jimmy Sommerville ou Morrissey année 86, ils ont la jeunesse et les gabarits des grandes pousses encore vertes. Deux guitares tenues à bout de bras et une basse volontairement violente tiennent compagnie au batteur et au chanteur qui semble singer Ian Curtis, les deux mains sur le micro collé à sa bouche, les yeux fermés, la voix basse et presque en sourdine…
Les compositions de la formation n’ont pas de quoi faire jouer au planton de service devant une salle de concert. Bien sûr, ils sont jeunes et récemment découverts et ils ont une marge de progression… ils ont d’ailleurs pratiquement trouvé un style à eux, empruntant à la froideur d’un Echo & the Bunnymen sur une batterie bien plus lourde. Une guitare chaloupant à coup de pédale wah-wah pendant que l’autre assure un riff plus sec joué à pleines mains dans des aller-retour maltraitant toutes les cordes à la fois. Les garçons en gabardine beige et mèches en avant apprécient le style de la basse répétitive et les filles sont toutes suspendues à la voix sombre du chanteur mais, même si quelque chose se dégage de ces musiciens grands gabarits en pull marin, nous assistons ni plus ni moins qu’à un retour en arrière dans la musique de plus de vingt ans.

Il manque une je ne sais quoi de petites trouvailles ou évolutions que notre époque aurait pu apporter à ce groupe propre sur lui, mais sans plus… Affichant moins de dix titres à leur répertoire, tous les instruments semblent vouloir jouer saturés, et seuls la basse slappée comme chez les Cult et le chanteur, dont la voix emprunte à un Peter Murphy, s’en sortent vraiment. Mais à l’instar des pantalons ou des gabardines qui dodelinent sur place devant moi, j’ai envie de dire au groupe : « C’est un peu court jeunes hommes ». Dans le ton de la soirée qui a mal commencé pour moi, il est clair que nous n’assistons pas là à leur meilleure prestation. Des ennuis de mixage, une salle minuscule à moitié vide et 45 minutes de set me font penser que, décidément, ce n’était pas un mardi à mettre un critique rock dehors !

Le set fini, personne ne rappelle et le groupe se sépare en autant de directions qu’il y a de musiciens. Le chanteur part droit devant s’isoler dans un coin sombre, l’air passablement déçu. Un des guitaristes, lui, se dirige directement et seul dans sa loge dont il referme la porte violemment. Quant au batteur, il file tout droit au bar noyer sa soirée dans un remontant alcoolisé. D'un seul coup, le Scopitone redevient un bar branché et le DJ qui enchaîne aux platines confirme la sensation de malaise qui ne m’aura pas quittée de la soirée !