En novembre dernier, le premier single tiré de ce
A Hand Full Of Hurricanes laissait entrevoir une personnalité fort intéressante à travers l'intensité qui émanait de sa musique. À la fois mélancolique et déchaîné,
Violence s'avérait être le parfait prélude à l'album à venir en ce début 2007.
Néanmoins, la musique de la jeune anglaise n'est pas aussi évidente que
Violence le laisse croire. Un titre comme
Dark Corners, indéniablement le plus éprouvant de l'album, progresse lentement entre la folie d'une
Regina Spektor et la rage d'une
PJ Harvey, la tension d'un
Thom Yorke et le timbre guttural d'une
Amanda Palmer (The Dresden Dolls)
.
De même,
Orange Juice et
Sheer Terror restent tendus de bout en bout par une Rose oppressante comme une
Shannon Wright. La pop expérimentale de la chanteuse n'explose pratiquement pas. Pétale après pétale, elle se dévêtit sauvagement mais reste entière.
Hormis le riff percutant de
Violence, l'éclosion ne se fait véritablement que sur le rock de
Metal Bird qui crée la surprise et clôt les six minutes du morceau avec passion.
Rose Kemp ne cède donc pas à la commodité que sa magnifique voix lui a apporté sur un plateau d'argent. Plutôt que de se reposer sur ses lauriers, elle creuse au plus profond d'elle-même pour pouvoir tirer profit de son organe et explorer ainsi un pan du rock que la gent féminine n'avait jusque là que très rarement foulé.
Cependant, quand on possède une voix aussi étendue que l'est celle de Rose Kemp, la frontière devient mince entre le désir de mettre en avant ses sentiments sans faux-semblant et les apparences mièvres et excessives de la variété internationale.
Ainsi, il lui arrive par moment de déraper brusquement sur du Alanis Morissette ou autres artistes soul et R'n'B quelconques, notamment dans le dernier tiers de l'album (
Sing Our Last Goodbye,
Skins' Suite, le mauvais a capella
Sister Sleep qui a plus à voir avec le
My Heart Will Go On de Céline Dion que le
Show Me Forgiveness de Björk)
, mais ce n'est que pour finalement mieux retomber sur ses racines (
Little One, le succin
Tiny Flower où le chant se dédouble pour 1m30 de pureté, les magnifiques cordes de
Morning Music, ...).
La sincérité de Rose Kemp éclipse en partie ces quelques maladresses. Car, même si son envie de bien faire se traduit parfois par une certaine emphase involontaire,
A Hand Full Of Hurricanes est avant tout un album fait de tensions constantes et de contraires judicieusement accordés.