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Rock en Seine

Paris, du 24 au 26 août 2007

Live-report rédigé par Johan le 28 août 2007

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Prélude féerique à Björk, les anglaises de Bat For Lashes débutent ce troisième jour de Rock en Seine avec folie douce et folk mystique. Il est 14h mais prétendons qu'il est 21h30, « close your eyes » nous lance la délicieuse Natasha Khan, chanteuse et compositrice du groupe. Mais pas trop longtemps, au risque de louper les accoutrements excentriques des musiciennes et leurs instruments pittoresques. Le show, constamment en mouvement, alterne clavecins et choeurs ésotériques sur la mirifique What's A Girl To Do ? et tambours vibrants sur la fanfare psychédélique de Sarah, le tout gagné haut la voix par l'envoûtante Natasha comme le solo pianotique Sad Eyes le prouve en milieu de set. Tellement envoûtante que le temps a dû s'arrêter pour un temps car la chanteuse, surprise, ne put terminer cette balade magique par leur sublime Prescilla.

Les tennismen Housse de Racket et leur mauvaise blague de collégiens ne peuvent que s'incliner face aux anglaises et leur univers hypnotique. Hormis quelques bons jeux de mots – « on est là pour la première partie de Björn Borg » et le « à votre service » que peu ont semblé retenir –, rien ne peut extirper le groupe de la mélasse dans laquelle il s'est fourré, pas même les synthés tout aussi barrés de The Horrors, remplacés à la dernière minute par Daby Touré. Sale fausse note entre Bat For Lashes et DeVotchKa, la pop disco de Housse de Racket laisse donc un goût amer et un air embarrassé pour les jeunes parisiens alors qu'on prend la direction de la scène de la cascade.

Groupe indé par excellence, DeVotchKa se sont surtout fait connaître grâce à leur participation à la bande originale de Little Miss Sunshine. Quatuor américain depuis 97, les voilà embarqués pour Rock en Seine où, tout comme pour Bat For Lashes, leur musique aurait été plus appréciable de nuit. À la place de Craig Armstrong, par exemple. Qu'importe, des titres aussi impétueux que Enemy Guns et How It Ends font de suite mouche en posant leur rock à forte tendance mariachi avec pléthore d'instruments folkloriques comme le bouzouki, le violon, le sousaphone, la contrebasse et l'accordéon. Comme si Zach Condon (Beirut) s'était fait dépouiller par des manouches arty. Comme si Matthew Bellamy avait compris que les Gypsy Kings étaient l'avenir de la musique. Comme si Win Butler avait vu Amélie Poulain avant l'enregistrement de Funeral. Win Butler qui d'ailleurs conseilla à DeVotchKa de reprendre le somptueux The Last Beat of My Heart de Siouxsie and the Banshees, joué en ce chaud après-midi aux côtés de l'électrisant Venus In Furs du Velvet que la voix de crooner de Nick Urata ne fait qu'intensifier avant que le fulgurant Such A Lovely Thing ne finisse en épileptie collective avec un batteur qui s'empare d'une trompette pour un final sensationnel.

Détour par la grande scène où Mark Ronson reprend lui aussi à sa sauce des tubes incontournables comme Just (Radiohead), Pretty Green (The Jam) et Oh My God (Kaiser Chiefs) et des morceaux plus aventureux a fortiori intéressants comme Toxic (Britney) et l'exquise Valerie des Zutons mais sans Amy Winehouse, forcément. Mark et son groupe réarrangent tout ça façon jazzy fort sympathique mais au final pas si indispensable, essentiellement à cause de ce grotesque chanteur aux mimiques R'n'B terriblement agaçantes.
Plus loin, Kelis délivre un show plus énergique que la pourtant déjà bien déjantée M.I.A deux jours auparavant, mais aussi étonnamment plus rock avec notamment l'entraînant I Don't Think So et son refrain imparable à la U Can't Touch This de MC Hammer.

Il est 17h50 et tout comme les Hives, sans grande surprise, les Kings Of Leon sont grandioses. La basse n'a jamais été aussi présente que sur les dernières compositions du groupe que la grande scène permet d'amplifier davantage, comme Mogwai a su en bénéficier le vendredi après-midi. Knocked Up et Charmer s'avèrent ici époustouflantes, et My Party prend des allures dansantes qu'on ne connaissait pas encore chez le groupe de Nashville. L'aspect métallique de Because Of The Times s'évanouit finalement parmi les nombreux titres du formidable second album Aha Shake HeartBreak. Razz, King Of The Rodeo et The Bucket s'enchaînent sans perdre une seconde, laissant des traînées de blues de temps à autre, entre solos dévastateurs et une batterie plus que jamais tendue. On sent le groupe généreux, offrant sur le temps qui leur est imparti tout ce qu'ils peuvent. Caleb force sur sa voix fatiguée, implorant le public de lui venir en aide sur le sublime Milk. Ce qui est inutile tant sa voix prend encore plus de consistance, merveilleusement abîmée sur Taper Jean Girl, éraillée pour les puissants cris hypnotiques de Charmer, parfaite tout au long de la prestation pour le coup unique des frères Followill.

S'ensuit le hip-pop-disco-funk-folk-house de Just Jack qui fait danser sans qu'on s'en rende compte. Le londonien Jack Allsopp et ses musiciens réussissent le show grâce à leur gentillesse et une joie de jouer en ce dimanche après-midi qui fait plaisir à voir et à entendre. Rapidement, le titre qui l'a fait connaître en France Writer's Block est interprété et c'est avec le tout aussi accrocheur Starz In Their Eyes que le set se termine gagnant après le mélodieux Disco Friends, l'electro rock de I Talk Too Much et la techno enthousiaste de l'inédit live Goth In The Disco.

Sur la scène de l'industrie, ce sont encore des anglais qui s'emparent de la foule, cette fois de Sheffield : les jeunots de Bromheads Jacket. La pop expédiée façon Arctic Monkeys sur leur moyen Dits From The Commuter Belt se transforme en punk rock ravagé pour un concert peu délicat mais plutôt efficace dans son genre. Quelques nouvelles chansons font leur apparition entre des expéditifs What If's And maybes et Lesley Parlafitt et la seule chanson calme de leur répertoire Poppy Bird, toujours aussi peu convaincante. Le chanteur et guitariste Tom assure à lui seul le show en slammant à deux reprises et en annonçant un second album probablement après noël. Drôle et pas prise de tête, le groupe montre avec un plaisir non dissimulé leur fierté de jouer en France sur la plus grande scène sur laquelle il soit jamais monté et remercie son audience, aussi maigre soit-elle – essentiellement une centaine de parisiens dans la fosse et une centaine de provinciaux aux alentours.

Troisième jour bonus pour cette cinquième édition de Rock en Seine, ce dimanche 26 août marquera les esprits venus en grande majorité pour l'artiste qui clôture le festival, Björk, dont le final techno punk de Declare Independance se veut une conclusion dynamique et un condensé idéal de ces trois jours éreintants mais terriblement jubilatoires.
artistes
    Enter Shikari
    Björk
    Craig Armstrong
    Bromheads Jacket
    Faithless
    Just Jack
    Albert Hammond Jr.
    Kings Of Leon
    Kelis
    Nelson
    Mark Ronson
    DeVotchKa
    Housse de Racket
    Daby Touré
    Bat For Lashes