Fridge

De nos jours, on aime troquer nos vieilles machines pour du nouveau matériel claquant; user de l'auto-tune et autre vocoder à foison, histoire de transformer de la musique en un séduisant objet de luxe tout feu tout flamme. Mais cette triste donnée fournit au final bien plus de produits pré-mâchés et sans saveur que d'épatants joyaux musicaux.

Heureusement, en Angleterre, Fridge offre une alternative bien plus brut de décoffrage : des morceaux-concepts cradingues et inspirés, mâtinés d'électronique totalement saugrenue, qui devraient faire fuir tous les non-aguerris du style. Et, bonne nouvelle, cette année, le combo a décidé de nous gratifier de vingt et uns de ces titres en question sur Early Output, un album en forme de Best Of retraçant les débuts du groupe entre 1996 et 1998.
A l'intérieure de cette rétrospective, la formation co-fondée par Kieran Hebden - plus connu derrière l'excellent projet Four Tet - dévoile le post-rock contemplatif qui a fait sa marque de fabrique et au sein duquel rien n'est laissé au hasard. Chaque note et chaque sonorité ont toujours fait l'objet d'un travail récurent dans les albums de Fridge. Que ce soit sur l'électronique répétitive d'Anglepoised, la batterie rock de Lojen ou le son garage mais totalement assumé de Cassette, les Anglais restent fidèles à leur musique hybride et trafiquée, qu'on imagine composée via ordinateurs et amplis vintage.
Si l'on regrette parfois une tendance à la surenchère (les vingt et une chansons ne sont pas forcément toutes indispensables sur une compilation digne de ce nom; en témoignent les intermèdes Eyes, Dee ou Dji), la setlist de cet objet collector reste cependant bien pensée, alternant entre plages mélodiques (le très bon mogwaien A Slow), abstractions électroniques (Orko) et digressions noisy-jazz (Distance).

On retrouve donc au final toute la qualité de Fridge : faire des choses là où l'on ne les attend jamais.