Air Cav

Ce n’est pas parce que les premières notes d’un album nous rappellent au bon souvenir du Gwenn Ha Du et de la bannière d’Hermine qu’elles sont annonciatrices d’un obscur chant traditionnel breton. Ce n’est pas parce qu’un morceau d’ouverture s’annonce comme gorgé d’embrun et d’écume que ce dernier est nécessairement le nouveau fait d’arme régionaliste d’une ancienne vedette de télé-crochet, originaire de la région. Non, les nuances existent, et Air Cav en sont la preuve : le quatuor, qui l’eut crû, est originaire de Manchester.

Il est d’ailleurs agréable de voir qu’une formation issue d’une ville aujourd’hui écrasée par le poids de son propre héritage musical (Oasis, The Smiths et autres Joy Division pour ne citer qu’eux), s’est attachée à faire souffler une brise de fraîcheur sur la scène mancunienne, bien que l’étendard de l’originalité ne puisse être agité que par intermittences, et en se basant sur le seul aspect géographique des choses. Dans le détail, si un morceau comme A Call To Arms sait se montrer dépaysant (voir le paragraphe précédent), on en arrive bien vite à des choses plus exsangues, à l’instar d’un Alliance à faire pâlir U2, ou de la maigre balade de clôture qu’est Glossary.

Ainsi, deux choses sont remarquables ici, pas nécessairement dans le bon sens du terme d’ailleurs. Il y a le violon de Sophie Sparkes tout d’abord, lequel ré-hausse à merveille le goût des blockbusters que sont A Call To Arms et Here Be Dragons (tout en effluves arabisantes), et souligne la grandiloquence évidente d’un groupe qui se verrait sûrement faire la tournée des stades d’ici quelques années.
Il y a ensuite la voix de Chris Nield. C’est là, notamment, que le bas blesse, puisque celle-ci est en l’état difficilement supportable. Écoutez donc Blind Summit pour vous faire une idée. La Grande-Bretagne a trouvé son Damien Saez, le sens de la poésie en moins. Alors oui, la partie instrumentale est solide tout du long de Don't Look Indoors, et les mélodies sont là. Mais la musique est un tout, et on peut difficilement s’avouer sous le charme d’un artiste ou disque quand un élément si important fait grincer les dents si fort.

Au final, Air Cav dégaine un premier album pas mauvais pour un sou, mais très kitschouille, et bien trop avare en surprises et en prises de risques. Sympathique donc, mais il n'est pas sûr que l'on s'en souvienne d'ici quelques semaines.