Chronique Album
Date de sortie : 23.01.2012
Label : NR One Records
Rédigé par
Hybu, le 11 février 2012
Il y a trois ans, lors de l'écriture de la chronique de l'excellent premier album des Kabeedies, Rumpus, j'étais encore étudiant, je découvrais la vie de stagiaire, la sédentarisation, la hausse modérée de mon niveau de vie et la quasi-disparition de mon temps libre. Durant cette période de transition, allant de plus en plus dangereusement vers la vie adulte, ce saut débraillé dans la pop bubblegum du groupe s'avérait un vrai bain de jouvence. Je sautillais en mettant à rude épreuve les ressors de ma chaise pivotante, inconfortablement collé derrière mon ordinateur et mes documents de travail, épié d'un regard mi amusé mi fureteur par mes collègues au milieu de l'open space. Depuis, j'ai pris du gallon et de l'assurance, et je me demande si la musique du groupe, qui était un tel bonheur à l'époque, résonne toujours autant en moi ?
Même s'ils ont gardé, fort heureusement, beaucoup de leur sémillante verve chahuteuse (Drowmning Doll, Hang Ups Of The West), les anglais ont décidé de mettre un peu de nuance dans leurs couleurs primaires par l'ajout d'instruments nobles : trompettes, cordes et le désormais (trop) habituel glockenspiel. Le résultat est parfois insolite. En tempérant leur allégresse, les Kabeedies sont presque devenus mélancoliques : Bones, par exemple, sonnerait presque comme du Fanfarlo ! Les trois ans écoulés depuis Rumpus ont fait leur effet, The Kabeedies sont plus adultes, c'est certain. Mais sont-ils aussi pertinents ?
Pas sûr, car si leur pop joyeuse et espiègle leur sciait à merveille, leur nouvelle sagesse sonne parfois un peu fausse et trop empruntée. Un peu de Paul Simon par là, un peu de Little Comets par ici. Ce rôle d'enfant hyper-actif qui se transforme en premier de la classe studieux et doué essayant de garder son air mutin est un peu paradoxal. Le groupe n'a pas entièrement perdu son identité mais elle s'est un peu noyée dans des velléités sérieuses. Faire évoluer son image est vœux pieux, si le risque est normal et sain, le résultat n'est pas tout à fait à la hauteur des espérances malgré des efforts certains.
S'il est une expression à bannir de la presse musicale, c'est bien celle du « disque de la maturité », or c'est exactement ce qu'ont essayé de faire The Kabeedies. Avec Soap, le groupe s'est aventuré sur la pente savonneuse du deuxième album avec l'espoir de composer un disque plus évolué que le frétillant Rumpus, tout en essayant de ne pas trop se travestir.
Mais, à trop vouloir bien faire, le quatuor a perdu un peu de son âme et de sa redoutable efficacité, on le sent appliqué, volontariste, soucieux des détails mais aussi perdu dans son ambition. En trois ans, le groupe a du se poser trop de questions, sans trouver les réponses adéquates. Soap pèche là où son prédécesseur rayonnait, il manque d'instinct et de spontanéité.