Art Brut

De concerts déjantés en frasques toutes plus folles les unes que les autres sur les réseaux sociaux, Art Brut, dans un style diamétralement opposé à celui d’une Beyoncé omniprésente et omnipotente, ne sont que bien peu préoccupés par leur image ; ces lads, ce qui leur importe, c’est de jouer : au sein d’Art Brut ou dans des side-projects pour Eddie Argos, rien n’entame la fougue de ces aliens. Afin de célébrer ses dix ans de carrière, le groupe a décidé de s’essayer au Best Pf et c’est tout naturellement que celui-ci s’intitule Top Of The Pops, en hommage au célèbre cri de ralliement ponctuant chacun de leurs concerts.

Une décennie déjà et pourtant, Art Brut, s’ils ont pris quelques kilos, n’ont pas pris une seule ride ; tels de jeunes adolescents guidés par leurs hormones et leur folie, ils ont gardé, depuis 2005 et la sortie de Bang Bang Rock’n’Roll, le rythme d’un album tous les deux ans. Si beaucoup considèrent que ce premier jet est le seul valable et leur reprochent un manque de créativité passé l’effet de surprise, on ne pourra cependant pas leur enlever la fraîcheur et la naïveté qu’ils ont su insuffler à leurs compositions, sans mettre de côté l’ironie et l’humour qui les caractérisent. Tel un Ray Davies ou un Damon Albarn, les capacités vocales en moins et l’accent cockney plus affirmé, le désinvolte et charismatique Eddie Argos compte les déboires de son quotidien, de ses anciennes petites amies du lycée à ses expériences artistiques dans un style percutant et, à défaut de beaucoup de technicité, très immédiat.
Un Best Of prenant la forme d’un double CD, le premier retraçant les plus grands titres des quatre albums du groupe agrémenté de deux inédits (Arizona Bay et We Make Pop Music) et le deuxième composé de B-sides, covers et autres raretés. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Art Brut n’ont pas cherché midi à quatorze heures pour l’articulation des morceaux : ceux-ci se présentent dans l’ordre chronologique des albums puis par ordre d’apparition sur ceux-ci. On y retrouve donc Formed A Band, Emily Kane ou encore Nag Nag Nag Nag, ces brûlots live car, il est important de le rappeler, Art Brut sont avant tout un groupe de scène et l’on aurait d’ailleurs aimé que davantage de titres enregistrés en public soient présentés.

Comme souvent pour ces sorties, elles parlent plus aux fans qu’à la majorité. Pour cette dernière, le premier disque semble suffisant. Pour les autres, la seconde moitié est un vivier de titres jamais sortis ou dans des versions alternatives. Si les « early versions » sont plus ou moins dispensables (notons tout de même que Bad Weekend, dans son premier jet, était encore plus punchy et braillarde que dans sa version finale), certaines exclusivités valent le détour, notamment These Animal Menswear (la b-side de My Little Brother).
Pour terminer le tableau du parfait Best Of, le deuxième disque contient également quelques reprises : le Catch de The Cure qui apporte une légèreté au morceau, The Great Escape (We Are Scientists) qui, elle, n’a pas grand intérêt et le choix, très judicieux, de réinterpréter Her Majesty, titre trop méconnu des Beatles, issu d’Abbey Road. Cette composition d’une trentaine de secondes, perd ici son côté troublant avec un format plus long et le phrasé d’Eddie ne se prête pas forcément à la composition.

Comme souvent pour les compilations, ce Top of the Pops ne revêt donc qu’un intérêt tout relatif. Le fan y trouvera des inédits et autres versions alternatives de titres déjà connus tandis que le novice se perdra peut-être dans les longueurs de ces quelques trente-neuf morceaux.