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The Fall

Re-Mit

The Fall - Re-Mit
Chronique Album
Date de sortie : 13.05.2013
Label : Cherry Red Records
4
Rédigé par Amandine, le 13 juin 2013
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1979 : alors que les punks font perdre quelques cheveux au puritanisme anglo-saxon, le post-punk commence à occuper une place de plus en plus importante sur la scène anglaise. Si les premiers sont restés dans les esprits comme les fauteurs de trouble dénonçant ardemment le pouvoir en place, le succès de ce nouveau mouvement est quant à lui plus confidentiel. Pourtant, dans la noirceur de l’Angleterre des années 80, sous la violence du Thatcherisme, ce dernier a su retranscrire le flou ambiant par une musique sombre, binaire et brute. Parmi eux, The Fall, un groupe mené d’une main de fer par l’irascible Mark E. Smith, se forge une place de choix par son style bien trempé et le charisme de son chanteur. Trente-quatre années et trente-et-un albums plus tard, après de multiples remaniements de line-up, le groupe n’a rien perdu de sa superbe et revient avec Re-Mit.

« Re-Mit is going to absolutely terrify people. It’s quite horrible » : voici ce qu’annonçait Mark E. lors d’une récente interview ; auditeurs, vous êtes donc désormais prévenus. En vieux briscard qu’il est (visage buriné et je-m’en-foutisme connu de tous semblent être deux caractéristiques faites pour lui), il continue de brutaliser la langue de Shakespeare, baragouinant des paroles incompréhensibles pour le commun des mortels mais ceci n’est qu’un détail : le génie de The Fall est ailleurs.
Il est impalpable, là où on ne l’attend pas et celui qu’on pourrait comparer à Captain Beefheart est au paroxysme de sa forme pour ce nouvel essai. Ses musiciens le suivent désormais depuis quatre albums, un record historique depuis les débuts du groupe, et le rendu s’en ressent. Chacun trouve sa place, certains se mettent ici plus en retrait (on pense notamment à la basse qui a longtemps été une arme imparable dans leurs compositions) et d’autres, au contraire, sont sur le devant de la scène : c’est le cas d’Elena Poulou, épouse de Mark E. Smith et claviériste depuis une bonne dizaine d’années au sein de The Fall ; dès l’introduction (No Respects – Intro), son instrument est mis en valeur et en découle une vague de psychédélisme qu’on ne leur connaissait pas. De ce fait, le son est moins brut et rugueux.

Re-Mit explore également un peu plus le krautrock, sans pour autant oublier le goût de Smith pour le garage, le tout teinté d’expériences sonores (Kinder Of Spine) du plus bel effet. Difficile de donner une franche direction à cet album qui, comme chaque fois, part un peu dans tous les sens, mais on sent tout de même une cohésion qui n’existait que rarement jusqu’alors. Certains morceaux sont relativement longs pour le groupe (Hittite Man et ses six minutes voguent vers les sombres contrées du post-punk) et d’autres, au contraire, s’inscrivent dans une certaine tradition (Victrola Time et sa batterie martiale) fallienne.
Mark E. Smith, étonnamment, semble se faire plaisir (en témoigne son rire présent sur Kinder Of Spine et Hittite Man) et même si le rendu est plus diabolique qu’entraînant, le rendu est assez surprenant pour qu’on le souligne. Côté paroles, le beau diable part une fois de plus dans des pérégrinations que lui seul comprend ; ainsi, sur Irish, il chantonne « James Murphy is their chief, they show their bollocks when they eat », plaçant The Fall parmi ces groupes fantasques, entre l’absurde et le surréalisme, au sens littéraire du terme.

Contrairement à leur album précédent, The Fall nous proposent ici un contenu convaincant, même s’il faudra, dans le futur, veiller à ne pas tomber dans la facilité afin de ne pas stagner et retirer la plus grande qualité des Anglais : la reconstruction incessante de leur art.
tracklisting
    01. No Respects (intro)
  • 02. Sir William Wray
  • 03. Kinder Of Spine
  • 04. Noise
  • 05. Hittite Man
  • 06. Pre-Mdma Years
  • 07. No Respects Rev.
  • 08. Victrola Time
  • 09. Irish
  • 10. Jetplane
  • 11. Jam Song
  • 12. Loadstones
titres conseillés
    Hittite Man, Victrola Time
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