The Longcut

Voici un groupe que l'on a failli oublier. Le trio de Manchester formé au tournant des années 2000 s'était pourtant rapidement fait remarquer dès ses premiers EPs et avait fait mixer son premier album par David Sitek de TV On The Radio. Trois ans plus tard, ils enregistraient un deuxième disque avec leurs copains de Nine Black Alps, leur musique était devenue plus tendue et l'électronique faisait son apparition sur les parties rythmiques alors que les instruments étaient de plus en plus déformées par les effets. Et puis... plus rien. Comme si après avoir tant fait évoluer sa musique, le groupe décidait de donner un sens à leur nom : la longue coupure.

C'est donc huit ans après son précédent album que le groupe revient. La production a encore fait un bond en avant. L'électronique prend une part égale à celles des guitares, faisant la synthèse entre rock et électro à la manière de LCD Soundsystem ou The Rapture. L'ambiance est urbaine, rappelant que le label Factory à Manchester a mélangé rock et dance bien avant DFA Records à New York. Les riffs de guitares prennent autant aux trippes que les envolées psychédéliques donnent envie de bouger (Popic, Dancers) alors que Punches, moins intimiste, pourrait tout aussi bien être joué par un DJ ambitieux ou choisi pour illustré un ballet contemporain tout aussi ambitieux.

Jonglant avec les ambiances, le groupe peut monter dans les tours et se rapproche de l'indus sur Deathmask, un morceau sombre emmené sur un rythme haletant et un refrain tribale que Foals n'auraient pas renié. Monuments conclue merveilleusement bien l'album avec un son énorme : une guitare sur-saturée et compressée à la My Bloody Valentine ou Mogwai, et une ligne de basse mélodique à la The Cure.

Le trio réussit à jouer avec l'espace, mêlant envolées rythmiques qui transportent l'auditeur et une impression de suffocation claustrophobique. Un tel niveau de perfection dans l'écriture et la production a été atteint au prix d'un processus d'enregistrement excessivement laborieux, principale raison de cette attente de huit ans entre deux albums. Chaque morceau de Arrows a été enregistré et mixé de multiples fois, et l'album lui même a existé sous plusieurs versions avant de trouver la formule parfaite.

A la fin de l'enregistrement, la frustration grandissante du groupe était devenue sa principale source d'inspiration, mais les trois musiciens ont réussi à la canaliser dans dix morceaux parfaits qui font de Arrows un album d'une immense puissance.