Chronique Album
Date de sortie : 21.09.2018
Label : Domino Records
Rédigé par
Amandine, le 20 septembre 2018
En 2015 sortait Darling Arithmetic, troisième album intimiste de Villagers renouant avec la légèreté de la pop des débuts (Becoming A Jackal) et semblait vouloir s'affranchir des tâtonnements électroniques initiés sur {Awayland}.
Aujourd'hui, avec The Art Of Pretending To Swim, Conor O'Brien mélange les styles, les synthétise à la perfection et dissémine tout au long des neuf titres l'étendue de son talent.
Ici, le jeune Irlandais, qui a passé une année à faire construire un studio et à en appréhender le nouveau matériel, amorce un nouveau virage dans l'appréhension du processus créatif.
Écoute après écoute, la finesse et la poésie de cet album se dévoilent et sous ses aspects pop catchy, on découvre un univers complexe et cosmique, mêlant la chaleur de l'acoustique à la froideur enveloppante des sonorités électroniques.
Dès les premières notes du premier titre, Again, la patte de Villagers est imprimée : arpèges de guitare, voix cristalline et quelques touches de piano, mais rapidement, on bascule vers de subtiles nappes synthétiques qui s'étoffent toujours un peu plus. Comme souvent avec eux, on prend le temps de savourer, pas de précipitation. Les mélodies s'installent lentement, subtilement.
The Art Of Pretending To Swim n'a pas la prétention de réinventer la pop et pourtant, avec beaucoup d'habileté, il la déconstruit et y introduit à la fois des rythmiques jazzy (Sweet Saviour) ou encore soul tandis que les sonorités électro se font de plus en plus présentes, notamment sur le surprenant Real Go-Getter qui résume le chemin parcouru depuis Becoming A Jackal. Car peut-être que la prouesse de Villagers réside dans cette capacité à ne pas déstabiliser l'auditeur, à lui faire croire qu'il est en terrain connu (comme avec Fool, la parfaite pop song) et à le laisser doucement glisser vers un état contemplatif d'où il se réveille, à la fin d'Ada, titre de plus de six minutes en hommage à la mathématicienne Ada Lovelace, un peu sonné, avec la seule envie de réécouter cet album.
Il est difficile de choisir parmi les neuf morceaux lesquels pourraient faire honneur à The Art Of Pretending To Swim... Again peut-être, qui, loin de n'être qu'une mélopée pop réussit, avec ses cordes subtiles, à prendre une ampleur totalement inédite pour Villagers... Ou alors A Trick Of A Light pour son immédiateté... Ou la surprenante Long Time Waiting avec ses cuivres dignes de la période Kid A de Radiohead... Non, c'est finalement beaucoup trop difficile, il vaut mieux laisser le charme de l'album agir.
A l'encontre de nombreux disques actuels, The Art Of Pretending To Swim est un album qui prend son temps, s'installe doucement, insidieusement, jusqu'à en devenir une véritable addiction. Une fois encore, Villagers ont réussi à faire encore mieux que précédemment, le tout sans prétention.