Villagers

Les petits gars du Donegal, sous la houlette du jeune Conor O’Brien, avaient réussi, avec Becoming A Jackal, à créer l’événement pour un premier album ayant recueilli tous les suffrages. Remis de leur nomination au Mercury Prize et de leur tournée marathon de près de deux ans, ils reviennent aujourd’hui avec {Awayland}, une invitation au voyage surprenante et déroutante.

Villagers s’étaient forgé leurs lettres de noblesse en délivrant une folk dans la plus pure tradition irlandaise ; armé de sa guitare, Conor nous comptait des histoires palpitantes, le tout dans le plus simple appareil. Depuis, près de trois ans ont passé, et c’est en octobre dernier que quelques informations ont commencé à circuler sur la toile avec la présentation d’un premier single : The Waves. Plus aventureux que jamais, le jeune farfadet semble oser de nouvelles choses et ses compositions se teintent d’electronica. Moins centré sur son frontman, le groupe voit sa musique s’étoffer, sans pour autant reléguer les magnifiques textes au second plan. {Awayland}, plus que l’album d’un songwriter talentueux, est bel et bien l'oeuvre d’un groupe à part entière qui a su se réinventer.

L’entame se fait tout en douceur et en harmonies vocales sur My Lighthouse, dans la suite logique de Becoming A Jackal. On retrouve la délicatesse et la sensibilité qu’on avait d’emblée aimé en 2010. On quitte néanmoins assez vite les pistes balisées avec des titres plus synthétiques et électroniques comme Earthly Pleasure ; cette pépite, coincée entre folk et electronica, délivre avec parcimonie quelques cordes en même temps que quelques boucles : un crescendo affolant et une écriture admirable pour un titre incontournable de cet album. La désinhibition continue avec The Waves et son rythme latent couplé au flow de Conor. Si la suite bouscule moins l’auditeur, nous restons loin des chansonnettes du premier album. La force d’{Awayland} réside probablement dans la capacité du groupe à créer de « nouveaux classiques », à l’image de Nothing Arrived qui nous semble presque instantanément familière.
La seconde partie est quant à elle moins rythmée et plus introspective mais, une fois encore, dans un registre différent de ce qu’on leur connaissait jusqu’alors. Le cinéma, si cher à Conor, est à l’honneur sur le titre éponyme tandis que sur In A Newfound Land You Are Free la voix semble encore avoir gagné en aisance. Tout s’achève sur un très jazzy Rhythm Composer à la fin déjantée qui explore une nouvelle fois les méandres aventureuses des Irlandais.

Loin de nous proposer un deuxième premier album, Villagers préfèrent oser, quitte à déplaire. Le résultat est une totale réussite qui a déjà su faire ses preuves dernièrement en live.