Depuis dix ans, Kele Okereke, chanteur-guitariste de Bloc Pary, alterne albums avec son groupe et projets solos. Alors que le confinement mettait en suspens le travail sur le sixième album de sa formation, Kele avait très vite mis en place une autre routine, reprenant en solo des chansons (essentiellement de Bloc Party) sur son compte
Instagram.
Ce travail minimaliste a sans doute influencé l'écriture de
The Waves Pt. 1, un disque très dépouillé, manifestement solo, ou l'on n'entend que sa voix, sa guitare et quelques boucles enregistrées à la main. Juste accompagné d'une guitare, voire d'un clavier et d'un looper, il reprend la formule popularisée par Ed Sheeran. La comparaison s'arrête là, le résultat est très intimiste, et si ce n'était pour la qualité du son, on pourrait penser à des démos d'appartement. L'approche artisanale est poussée jusqu'au bout puisque l'album ne sort qu'en digital sur les
plateformes habituelles (Spotify, bandcamp...).
L'artiste semble d'ailleurs bien s'amuser du format, il nous gratifie d'un titre bonus (
Cradle You), et l'album est la première partie mystérieuse d'un ensemble dont il ne dit rien. Trop réussie pour être un bonus, sa superbe reprise de
Smalltown Boy des Bronski Beat est placée l'air de rien vers la fin du tracklisting. Les arrangements en sont dépouillés à l'extrême, le tempo ralenti, et la voix très touchante.
Son talent de compositeur est manifeste sur les instrumentaux qui pourraient figurer sur des BO de films, comme le superbe
Dungeness ou
The Patriots, plus proche du film d'horreur. Des expériences électroniques de ses premiers essais solo il garde un côté avant-gardiste assez éloigné de la pop, mais qui fonctionne très bien, de son troisième album plus acoustique il garde l'ouverture à tous les styles.
Kele restera toujours pour moi le chanteur de Bloc Party, et ses errances en solo m'ont souvent déstabilisé, tout comme les dernières productions de son groupe. Sur
The Waves Pt. 1, on retrouve ses guitares et son timbre de voix tant aimé par le passé. Notamment sur
The Way We Live Now qui n'aurait pas dépareillé sur
Silent Alarm.
Je préfère voir cet album comme le journal personnel d'une année mise entre parenthèses. L'ambiance est sombre, incertaine, et explore des styles multiples. Le format numérique permettra à un grand nombre de l'écouter gratuitement, il serait vraiment dommage de passer à côté. Si cette première partie est l'annonce de ce que Bloc Party proposeront en reprenant la route du studio, on peut s'attendre à un grand album.