Oliver Sim

Des trois membres de The xx, Oliver Sim est probablement celui dont on attendait le moins un premier album. Même si cela peut paraître surprenant puisqu'il officie à la basse et à la voix dans son groupe, l'anglais a surpris son monde avec l'annonce de la sortie de Hideous Bastard. Tandis que Romy, après un premier single, revoit la copie de son album qui aurait normalement dû être dans les bacs des disquaires depuis déjà un bon moment, et que Jamie XX s'amuse à distiller des maxis en édition limitée en attendant le nouvel opus du petit génie derrière les machines du groupe. C'est donc bien Oliver Sim qui s'est jeté dans le grand bain avec cet album qu'il est déjà venu présenter sur scène à Paris en juin dernier.

Hideous Bastard est, déjà par son titre, un disque qui ne laisse pas indifférent, car il fallait oser intituler son album de la sorte. Bien entendu, ce choix sent l'humour à plein nez mais on comprend que derrière cette ironie le jeune anglais se moque de lui, ce qui forcément interpelle car Olivier Sim est tout sauf quelqu'un d'hideux. Mais il vit avec le Sida depuis quasiment la moitié de sa vie, il le mentionne d'ailleurs à la fin du morceau, Hideous, qui ouvre son album : " Been living with H.I.V. since seventeen, Am I hideous?". La chanson est poignante, d'autant que le Londonien lui donne un côté cinématographique avec cette orchestration synthétique et des cordes qui viennent s'accoler parfaitement avec la voix suave du bassiste de The xx. Mais celle-ci prend encore une autre dimension lorsque se met à résonner la voix inimitable de Jimmy "Bronski Beat" Sommerville, laquelle lui apporte une vraie splendeur. On peut donc parler d'un démarrage d'album particulièrement réussi ; espérons que la suite le soit tout autant.

Romance With A Memory, premier extrait du disque à avoir été dévoilé, est davantage groovy avec notamment son beat sec. La production de Jamie XX n'y est probablement pas étrangère. Sensitive Child prend elle une tournure plus électrique, les guitares se mettent en branle en fin de morceau sur une production un peu sale et joliment décadente. On comprend rapidement à l'écoute de Hideous Bastard qu'il n'aurait pas pu sortir avec ses deux comparses sous le nom de leur groupe, parce qu'il est très personnel voire même intimiste. Par exemple, Confident Man est un instant mélancolique teinté de passages gospel. On retrouve l'utilisation de ce style musical dans la sautillante GMT. Fruit est, quant à elle, une perle synthétique, où quelques guitares résolument 80's résonnent également, ainsi qu'une fois encore la voix de l'ex-Communards. Bien sûr, le fantôme de son groupe se manifeste tout de même sur la parfaite Never Here. L'album se conclut avec la rayonnante Run The Credits qui gomme avec élégance les moments sombres de ce disque.

Oliver Sim peut donc garder le sourire car son premier album solo est une réussite. Délicat, poignant mais aussi enchanteur, Hideous Bastard est assurément libérateur pour le bassiste de The xx. Si celui-ci pouvait paraître discret avec son groupe, celui-ci s'affirme pleinement ici en une grosse trentaine de minutes. Il peut être fier d'avoir sorti un des grands disques de cette rentrée 2022.