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The Japanese House

In The End It Always Does

The Japanese House - In The End It Always Does
Chronique Album
Date de sortie : 30.06.2023
Label : Dirty Hit
3
Rédigé par Fabrice Droual, le 7 juillet 2023
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Quatre ans après la sortie de son premier album Good At Falling, la londonienne Amber Bain, plus connue sous le nom de The Japanese House, nous présente son second LP In The End It Always Does. Chroniques douces ou amères, en douze chansons mélancoliques, d'un cycle d'amour et de désamour et une célébration, au passage, de ses deux chiens qui l'ont aidée à traverser tout cela.

Calvin et Joni Jones sont les deux toutous d'Amber. Habitant sous le toit d'une maison japonaise, on pouvait s'attendre à croiser deux boules de poil de race Shikoku ou Akita. Pas du tout ! Leurs truffes faisant la une de la presse spécialisée anglaise, c'est en berger allemand et teckel nain que ces deux-là se sont grimés. Les « muses à truffes », meilleurs amis de l'homme et d'Amber Bain, lui inspirent deux titres sur l'album : le premier, Spot Dog, et le dernier, One for Sorrow, Two For Joni Jones.
Même si Amber Bain produit, écrit ou co-écrit toutes les chansons et joue de presque tous les instruments sur l'album (basse, guitare, clavier, piano et percussions), elle n'aurait pas pu tout faire seule à deux mains et huit pattes canines. Cette surdouée a donc su s'entourer comme sur son premier opus, à la production de George Daniel, du groupe The 1975, et de Chloe Kraemer. Le Chanteur Matty Healy, lui aussi issu de The 1975, lui prête sa voix ainsi que Katie Gavin du groupe américain MUNA sur un titre. Un clin d'œil aux origines mystérieuses de The Japanese House. Il faut se souvenir qu'à la sortie de son premier titre Still en 2015, faute d'identification vocale de cette voix androgyne et en l'absence d'image de l'artiste, beaucoup spéculaient sur le fait qu'il s'agissait d'un projet parallèle secret du chanteur de The 1975. Le temps est passé depuis et Amber Bain se prête désormais plus à la reconnaissance médiatique et assume publiquement sa musique. Celle-ci découle de sa vie et des expériences amoureuses joyeuses ou tristes, conventionnelles ou « polyamoureuses ». La perte de l'être cher, la solitude, un confinement forcé et les interrogations existentielles sont à l'origine des explorations de cet album. Une pop-song synthétique au refrain eighties version 2.0, parfois folk et à d'autres moments légèrement funky (merci la basse !).

Ces compositions qui peuvent paraître minimales à la première écoute (piano/voix et guitare acoustique) cachent généralement, en second plan, de discrets arrangements (boîtes à rythmes, synthés). Amber Bain utilise sa voix, qualifiée à la fois de contralto et de ténor, en superposant les harmonies sur plusieurs pistes, simulant ainsi l'effet d'un vocodeur, une sorte d'auto-tune « organique » singulier. Elle livre une synthpop élégante mais généralement très mélancolique.
L'écriture couplet-refrain conditionne l'ambiance de la chanson et ce sont d'abord les paroles qui situent l'état d'âme : Sad To Breathe relève, par des mots simples et quelques touches de piano, la tristesse après une rupture amoureuse. Le rythme et l'instrumentation se complexifient sur le refrain et témoignent des formes de structures musicales de l'artiste. Variables comme une humeur sur ce titre, ou fuyantes comme une séparation dégoulinant de larmes sur Over There.

En chantant « You always come back to her » sur le titre Morning Pages, Amber Bain ouvre le cycle de l'éternel recommencement (de l'amour en tous les cas). On ne sait plus si on doit espérer ou tomber définitivement dans cette mélancolie qui finit par peser sur le moral de l'auditeur que je suis. Un peu d'espoir, jeune fille, vous n'avez que vingt-sept ans et vous le dites-vous même sur Sunshine Baby, quelqu'un peut vous sauver : « Back seat, driving with my sunshine baby, Well, I've gone a little crazy, surely, someone's gonna save me ». Si ce n'est pas l'amoureux(se), ce sera votre chien surnommé Sunshine : « I miss my dog and I miss falling in love ». Surnom enfantin, comme ce cercle dessiné sur la pochette de l'album. Une boucle de recommencement et non de renoncement.

Rajoutant de l'espoir sur You Always Get What You Want, Amber Bain n'a pas oublié son enfance sur Boyhood mais craint de grandir : « And if I grow, I'm gonna get so old, Will you hold me like you always do? ». Ces sentiments nostalgiques plombent la première partie de l'album, qui gagne heureusement en légèreté sur le titre Friends et se termine par un trio de chansons qui rappellent des artistes américains des années 70 tels que Rickie Lee Jones ou Joni Mitchell, dans un style « confessional folk » modernisé par des touches d'auto-tune savamment distillées.
Le dernier morceau de l'album, One For Sorrow, Two For Joni Jones, termine l'hommage au fidèle compagnon canin : « Personne ne m'aimera jamais comme ce chien allongé sur mes genoux ». Une conclusion marquée par un clap de fin relevant de la fermeture d'un écran d'ordinateur (fidèle compagnon lui aussi), d'une porte ou d'un cycle ?

The Japanese House nous livre ici un second album nostalgique. La jeune femme semble désabusée et il sera difficile d'écouter en boucle ces douze titres sans être affecté à son tour. Une approche plus pop et dansante nous aurait permis de cataloguer cet album en « joli morceau de tristesse estivale ». Ce n'était sans doute pas l'objectif de la jeune artiste. Prochain opus à trente ans, d'ici là, la vie d'Amber lui ouvrira cette fois, on l'espère, la porte d'un monde enchanté et plus léger.
tracklisting
    01. Spot Dog
  • 02. Touching Yourself
  • 03. Sad To Breathe
  • 04. Over There
  • 05. Morning Pages
  • 06. Boyhood
  • 07. Indexical Reminder Of A Morning Well Spent
  • 08. Friends
  • 09. Sunshine Baby
  • 10. Baby Goes Again
  • 11. You Always Get What You Want
  • 12. One For Sorrow, Two For Joni Jones
titres conseillés
    Touching Your Self - Sad To Breathe - Boyhood
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