MEMORIALS est un heureux accident qui se devait d'arriver quand deux musiciens virtuoses et aux imaginations débordantes s'enferment dans un studio rempli jusqu'au plafond d'instruments et de machines diverses. Multi instrumentiste (saxophone, clarinette, guitare...), Verity Susman (ex-Electrelane) s'est associée à Matthew Simms, guitariste de Wire depuis 2010, pour composer des musiques de films.
Alors qu'ils courraient après les délais pour finir les bandes originales qui leur avaient été commandées, ils faisaient des heures supplémentaires et enregistraient des chansons ou extraits de chansons qu'ils laissaient de côté, comme un trop plein de créativité et d'émotions qui devait être exprimé. Deux de ces bandes originales sont sorties il y a un an sur un très beau double album, Music For Film: Tramps! & Women Against The Bomb.
Depuis le duo a donné quelques concerts ayant permis de découvrir qu'au-delà des collages et des samples (dont beaucoup sur bandes), ces musiciens ultra créatifs ont une approche très organique et directe de sa musique. Leur line-up qui aurait pu sobrement se limiter à une guitare, un saxophone, un clavier et un ordinateur est en réalité un bric à brac qui occupe bien l'espace, Matthew jouant parfois de la batterie et de la guitare sur un même morceau.
Comme les multiples couches instrumentales ne suffisaient pas à bâtir ses morceaux, le groupe chante bien sûr, mais ajoute également toute une série de bruitages divers et variés. On retrouve sur ce disque le même style rétro bruitiste que sur leurs bandes originales qui, rappelons-le, illustraient toutes les deux des documentaires sur les années 70-80. MEMORIALS un talent certain pour créer des ambiances, ils montrent aujourd'hui qu'ils sont aussi capables d'écrire leurs propres histoires. Cut It Like A Diamond est un film en lui-même avec des changements de rythmes, et l'impression de suivre plusieurs protagonistes à travers de multiples changements d'instrumentation.
Leur univers surréaliste est imagé et poétique comme celui de The Doors, un lyrisme qui décolle à mesure que la chanson se déroule, emmené ici par une voix féminine éthérée, là par des accents folk quand le tempo se calme. Chaque titre peut susciter différents sentiments par des changements de rythmes de tout ou partie des instruments, créant aussi bien de l'urgence que de l'insouciance. Le final de Name Me est bizarre au possible alors que la chanson avait commencé comme une ballade inoffensive.
Sur la face B, les moments bruitistes se multiplient et rappellent l'univers psychédélique et faussement bordélique de CAN. Dans un registre de plus en plus sombre, False Landing ressemble à la musique que l'on entendrait sur sur une scène de crime, après qu'un peu de sang ait giclé sur le vinyle de jazz qu'écoutait la victime, jusqu'à le faire tourner en boucle comme un disque sale et rayé.
Construit comme un récit, Memorial Waterslides se conclut sur I Have Been Alive, le compte-rendu paisible d'une vie qui s'éteint. The Politics Of Whatever est alors comme un épilogue qui apporte la rédemption post mortem. Beaucoup de grands albums donnent envie de les écouter en boucle, celui-ci joue dans une autre cour, quand il se termine, on a envie de silence pour mieux le digérer et faire le point sur ses impressions... puis de l'écouter à nouveau.
tracklisting
01. Acceptable Experience
02. Lamplighter
03. Cut It Like A Diamond
04. Name Me
05. Memorial Waterslide II
06. Book Stall
07. False Landing
08. Horse Head Pencil
09. I Have Been Alive
10. The Politics Of Whatever
titres conseillés
Lamplighter - Cut It Like A Diamond - I Have Been Alive