The Lathums

The Lathums, groupe surdoué issu de Wigam dans le Grand Manchester, fait partie de cette génération dont les débuts ont été torpillés par une certaine pandémie mondiale. C'est en effet en 2020 que la bande d'Alex Moore se fit remarquer avec deux excellents EPs, Fight On et Ghosts, qui nous mettaient l'eau à la bouche avec un répertoire indé mâtiné de britpop. A peine sorti des confinements, The Lathums ont enfin dévoilé leur premier album, How Beautiful Life Can Be, qui s'est révélé être moins inspiré que ce à quoi nous nous attendions.

C'était donc en nous frottant à l'épreuve du live que nous souhaitions nous faire une véritable idée sur le potentiel de The Lathums. Chose fut faite en avril 2023 à la Maroquinerie de Paris, deux mois à la suite de la sortie du second essai de la formation, From Nothing To A Little More, qui se crantait dans l'exact lignée du debut album. Nous avions alors été convaincus par un groupe qui a mené tambour battant une courte prestation, face à un public certes à moitié composé de compatriotes anglais, dans une ambiance surannée qui évoquait le Cuba des années cinquante.


Alex Moore s'y est révélé un frontman affirmé, et les morceaux qui avaient pu nous décevoir à l'écoute des disques se sont vus bonifiés sur scène. Nous attendions donc la suite avec impatience et c'est en ce mois de mars, deux petites années après, que nous jetons une oreille sur le troisième opus de The Lathums intitulé Matter Does Not Define. L'inspiration n'a pas quitté les Anglais et Alex Moore demeure un songwriter aux incroyables talents de mélodiste, toujours accompagné par le très bon guitariste Scott Conception. Le résultat est une série d'hymnes pop rock un peu bohèmes, qui prennent leur inspiration bien au-delà du spectre mainstream FM dont d'autres groupe abusent pour plaire au plus grand nombre.
Pour le troisième épisode de leurs aventures, The Lathums ont amorcé comme un retour aux sources. La production a été ici confiée à Chris Taylor et John Kettle, ce dernier ayant été leur professeur du temps de leurs études à l’université. On retrouve en effet dans le disque les échappées saturées des premiers EPs (notamment sur le très bon No Direction). As de la guitare folk, Alex Moore nous régale de ses ballades bucoliques comme sur Until Our Bitter End aux sonorités très Beatles-esque et Dynamite, qui nous plonge dans un univers pop coloré, mis parfaitement en exergue par le chant en canon de Moore.


Les volutes de country rock sont encore présentes, notamment dans le titre d'ouverture Leave No Stone Unturned et Heartbreaker, qui renvoient indéniablement à l'univers The Coral, probablement hérité de la période où James Skelly lui-même était aux manettes de leur production. La guitare occupe une place prépondérante dans ce troisième album, et ce pour notre plus grand plaisir. Unrequited Love est le single le plus marquant, la chanson mettant en avant le sens aiguë de la mélodie d'Alex Moore, avec cette ballade d'une grande beauté, où le chant de ce dernier manie douceur et puissance simultanément. Le refrain à la guitare hurlante nous évoque les meilleurs solos de Brian May, c'est donc dire le haut niveau atteint par nos jeunes musiciens, et il sera probablement celui qui restera le plus facilement en tête après la première écoute du disque. La seconde partie est un peu plus passe-partout, de Knocking At Your Door jusqu'à Long Shadow, mais qui propose tout de même de très solides compositions, à la musicalité riche et produites avec énormément de soin. Le final se fait avec Love Of My Life, une berceuse poignante où le chant atypique d'Alex Moore se démarque véritablement.

Nous avions déjà fait la comparaison avec les débuts d'un autre Alex, celui-ci originaire de Sheffield, lorsqu'à son groupe offrait un véritable renouveau au rock indé britannique. The Lathums, à la suite de leurs deux premiers EPs, semblaient emprunter cette voie à leur tour, quinze années après. C'est au final après quelques années de rodage que The Lathums atteignent avec Matter Does Not Define les hautes sphères du songwriting pop, en y injectant à doses régulières cette énergie rock juvénile qui leur a peut-être manqué sur les deux premiers LPs. Un effet Benjamin Button des plus appréciables, Alex Moore et ses compères nous promettant ainsi de nouveaux petits chef-d'œuvre indés dans les années à venir. Nous attendons donc d'être à nouveau convaincus lors de l'unique date française du groupe le 14 mai au Trabendo à Paris.