Chronique Album
Date de sortie : 28.03.2025
Label : NYX Collective Records
Rédigé par
Franck Narquin, le 25 mars 2025
NYX, dans la mythologie grecque, est la déesse de la nuit, née du chaos et donnant naissance à la lumière et au jour. Cette dualité fonde l'identité sonore du collectif londonien dirigé par Sian O'Gorman, ancienne membre du New Zealand Opera Chorus et des National Youth Choirs. Depuis six ans, NYX explore la fusion entre musique chorale et électronique, une alchimie qui culmine dans ce premier album coproduit par Marta Salogni. Figure incontournable de la production contemporaine, l'italienne insuffle sa touche spectrale et immersive comme précédemment pour English Teacher, Depeche Mode ou Daniel Avery.
S'inscrivant dans une tradition où le chant devient un vecteur d'expérience sensorielle totale, NYX évoque par moment l'approche panthéiste d'Erland Cooper sur Carve The Runes Then Be Content With Silence. Ce dernier, en quête d'une communion avec la nature, capte les résonances du vivant pour les fondre dans ses compositions. On retrouve cette démarche dans Silent Union, titre en partie constitué d'enregistrements captés dans les profondeurs d'un grand chêne, où la matière sonore devient presque organique.
En dix titres et cinquante-cinq minutes, NYX s'impose comme un opéra psychédélique aux frontières du sacré et de l'indicible. Un objet sonore d'une puissance imparable et d'une grâce mystique, qui laissera certains cois et d'autres bouche bée. Ici, la voix humaine ne se contente pas d'accompagner la musique : elle est la musique.
L'album s'ouvre sur Mother, inspiré par le Tao, cette force fondamentale qui coule en toute chose. Superpositions de voix, drones de synthétiseur et boucles de violon suspendent le temps, comme un rituel d'élévation. Libérez vos chakras, le voyage va être sublime, férocement sublime. Through Fire prolonge cette transe, d'abord aérienne puis incandescente : des voix métalliques scandent des mantras technoïdes, portées par des percussions industrielles. L'amour et la violence.
D'abord lumineuses et aériennes, Bright Tongues et Awe agissent tels des baumes bienveillants. Mais cette douceur vacille peu à peu : Truce et Silent Union soufflent un vent sibérien, réfrigérant et hypnotique, avant que Undercurrent ne nous précipite dans un labyrinthe sonore mycélien, où la lumière des débuts s'efface au profit d'une obscurité mouvante et fertile. La glace et le feu.
NYX excelle dans l'ambivalence des émotions et des textures. Everything I Wanted For You fusionne voix célestes et cordes cinématiques dans un équilibre d'extase et de retenue. Puis vient Daughters, un tourbillon en crescendo où la tension se résout en une apothéose vertigineuse. Enfin, en guise de bénédiction finale, NYX offrent une reprise spectrale du single culte de Suicide, Dream Baby Dream. La rage et l'apaisement.
On pourrait épuiser notre arsenal de superlatifs, mais aucun ne suffirait à saisir pleinement ce que procure NYX. Alors plutôt que de chercher à mettre des mots sur l'indicible, mieux vaut lâcher prise : fermez les yeux, ouvrez grand les oreilles et laissez-vous engloutir par cet album à la fois vertigineux et sacré.