Chronique Album
Date de sortie : 09.05.2025
Label : Metropolis Records
Rédigé par
Bertrand Corbaton, le 16 mai 2025
Cela commençait à faire quelques années que les nouvelles de Peter Murphy, ex-leader du groupe de darkwave Bauhaus, devenaient rares, et il fallait se retourner sur des albums live pour se rappeler au bon souvenir de l'emblématique chanteur. Il faut dire que la maladie de Peter n'a pas aidé l'artiste à faire parler de lui pour ses disques ces dernières années, et à l'image d'autres, un retour est déjà en soi une petite victoire pour l'homme.
Que peut-on attendre désormais d'un artiste dont la carrière est largement derrière lui, que cherche Peter dans ce nouvel album ? Certainement beaucoup de plaisir avec la sensation prégnante de ne plus avoir rien à prouver. Pour cette nouvelle aventure, il s'est entouré d'une belle armada, avec en premier lieu Youth, bassiste de Killing Joke de son état et producteur de talent qui a déjà officié sur Lion, il y a déjà onze ans, pour la dernière sortie solo de Peter Murphy.
L'exercice n'a pas dû être forcément facile à la production, pourtant, Youth parvient à donner un grain très uniforme à des chansons aux ambiances au final très hétérogènes. Souvent, les mélodies sont particulièrement soignées, comme sur ce Artroom Wonder, accompagnée par la basse de Justin Chancelor (Tool), pour une mélodie absolument remarquable. Peter fait jaillir la lumière de cette pièce sombre. Bien sûr d'aucuns pourront regretter la partie finale où le frontman semble refuser de quitter le micro et se lance dans une tirade vocale peut-être dispensable. Pourtant, l'ensemble rester debout et la chanson est bien trop prenante pour souffrir de l'exercice.
Malheureusement, The Meaning Of My Life ne parvient pas à soutenir un nouvel excès de zèle de Murphy, dont les postures de chanteur d'opéra ne peuvent être effacées par un morceau bien trop grandiloquent et emphatique qui fait basculer dans tout ce que les détracteurs de l'artiste peuvent lui reprocher. L'impression de loupé se retrouve également sur Soothsayer, assez peu intéressant avec son riff évident faussement subversif.
Les attitudes vocales très proches d'un David Bowie n'atténuent en rien la trop récurrente désagréable impression, et ne pas réussir à se départir du mimétisme entre les deux chanteurs risquent de faire passer ce Silver Shade pour un moment bien pénible. Le morceau éponyme est à cet égard un des exemples les plus frappant de cette problématique. Pour autant, ce n'est pas ici une découverte et il faudra vous y faire.
S'arrêter ici pourrait être tout à fait dommageable, et pour vous en convaincre, il faut réécouter le très froid et remarquable Swoon, en duo avec Trent Reznor. La seule présence du leader de Nine Inch Nails a de quoi aiguiser la curiosité et l'excitation de bon nombre d'entre vous, à raison, tant ce morceau sombre est réjouissant par sa structure, et son résultat final.
L'électronique Hot Roy a de quoi vous faire passer un bon moment avec son refrain haletant, pour un des titres les plus réussis de notre affaire. Le paysage change radicalement sur l'inspiré Time Waits et ses couleurs andalouses baignées d'influences arabes. Let The Flowers Grow, en duo avec Boy George, pourra agacer par sa facilité et ce côté assez salement kitsch mais il clôt comme un adieu de fin de film un album qui laissera en définitive une impression positive.
Bien entendu, il y aurait beaucoup à dire, et Silver Shade a peu de chance de faire changer d'avis les détracteurs de Peter Murphy et sa voix si particulière, ou trop calqué sur celle de qui vous savez. Bien sûr, on pourrait vite s'agacer des postures vocales de l'artiste et de ses envolées lyriques. Néanmoins, si Peter Murphy devait nous laisser avec Silver Shade en guise de dernière offrande, il serait difficile d'être déçu. Cet album est réussi, et pourrait être une belle pièce finale dans la carrière si riche d'un artiste clivant, décrié, mais aussi diablement important et marquant.