logo SOV

Studio Electrophonique

Studio Electrophonique

Studio Electrophonique - Studio Electrophonique
Chronique Album
Date de sortie : 26.09.2025
Label : Valley Of Eyes Records
35
Rédigé par Laetitia Mavrel, le 23 septembre 2025
L'ambiance se veut cozy, comme un cocon dans lequel on s'enferme pour échapper à toutes nuisances ou distractions extérieures. Avec un ciel gris et bas, la pluie qui frappe au carreau, l'envie de se réfugier dans une bulle de calme et de sérénité, avec la boisson chaude qui va bien, est la plus forte. Et quelle meilleur bande sonore pour cette pause méditative que le tout premier album de Studio Electrophonique, projet mené par l'auteur compositeur originaire de Sheffield, James Leesley.

Déjà auteur de deux EPs, Buxton Palace Hotel en 2019 et Happier Things en 2020, fatalement stoppé dans sa progression par l'épidémie de COVID-19, le jeune homme a mis à profit cette période pour peaufiner sa pop ultra cotonneuse, fruit de ses amours pour les grands paroliers américains comme Burt Bacharach, Carole King ou le Velvet Undergound, ce goût immodéré pour une musique douce et enivrante à la fois, son outil de prédilection étant les claviers vintage type Casio, de ceux que l'on trouve encore en brocante ou lors de petits concerts – cabarets qui se déroulent dans les « social clubs » anglais le week-end, où les moyens du bord suffisent à divertir et enchanter les soirées souvent elles aussi grisonnantes des banlieues ou campagnes anglaises.

Ainsi, et malgré son jeune âge, James Leesley a été biberonné à cette atmosphère un peu démodée mais tout aussi charmante. Il n'en fallait pas plus pour que ce dernier soit adoubé par de grandes pompes de la pop tant britannique que française, notre pays ayant offert à James Leesley la première partie d'Etienne Daho, le maitre pop made in France par excellence, à l'Olympia de Paris. Nous retrouvons donc Studio Electrophonique (du nom d'un ancien studio localisé à Sheffield) en ce début d'automne 2025 avec son debut album éponyme signé chez Valley Of Eyes Records, label au patronyme anglophone mais très français car basé à Paris, qui détient parmi ses ouailles un autre auteur compositeur pop brillant, Adrian Crowley.


Nous flirtons avec une tonalité en sépia, la musique de Studio Electrophonique sonnant volontairement dépouillée, la gamme se veut presque monochromatique tant les notes si fragiles de synthé dominent à elle seule tout le disque. Accompagné de ce qui ressemble à s'y méprendre à un mélange de métronome et de tonalités pré-enregistrées que l'on trouve dans les claviers pour les musiciens débutants, lorgnant définitivement plus vers l'analogue que le numérique, le résultat est surprenant et nous invite dans un voyage sonore définitivement en mono, le disque ayant été enregistré sur un Tascam Reel To Reel, 8 pistes aux allures de dinosaure dont le rendu est impressionnant. Le piqué de la guitare acoustique vient quant à lui apporter une belle bouffée d'oxygène à cette atmosphère parfois un brin cloisonnée et, surtout, le chant fluide et velouté de James Leesley y fait des merveilles.

Habitués à des groupes et des artistes plus flamboyants s'agissant de la ville de Sheffield, pour rappel berceau de Pulp, Richard Hawley ou Arctic Monkeys, ce choix de s'ancrer dans un univers aux antipodes du rock and roll que sait générer cette grande cité peut paraitre des plus étonnants. Et pourtant, c'est bien sans batterie, sans basse ni pedal boards que ce Studio Electrophonique réussit à nous convaincre. La lenteur est de mise, et ces morceaux à la beauté fragile nous évoquent l'ultra sensibilité d'Elliott Smith ou l'ingéniosité de nos bidouilleurs préférés, Grandaddy. Sonnant presque comme des « démos » que l'on pourrait trouver sur des faces B, l'apparente vulnérabilité de ces titres cache un véritable génie de composition afin qu'ils ne sonnent justement pas comme inachevés ou pire, amateurs.


Le disque s'écoutant d'une traite, il n'est pas aisé de faire sortir du lot un single en particulier, la totalité du tracklisting s'ancrant dans un tout peu dissociable. Nous retiendrons cependant les morceaux où l'on retrouve ce son typique de nos synthétiseurs d'antan, entre Casio et Bontempi, cette nostalgie des petites démos enregistrées dans les modules qui nous mettaient alors le pied à l'étrier pour composer nos toutes premières ébauches de mélodies, Taxi Ride et How Can I Love Anyone Else semblant d'une simplicité désarmante. Cependant, cette effusion de tonalités old school peut donner sur la longueur un petit sentiment de ronronnement et c'est vraiment quand la guitare acoustique ou le piano entrent en jeu que Studio Electrophonique apporte tout de même un peu plus de matière à son travail. On réalise alors l'excellent songwriter pop qu'il se trouve être comme sur Break My Heart Again, The Last One ou Him Without Her.

Studio Electrophonique est un premier album aventureux : le choix d'une palette de sonorités presque désuètes lui apporte un cachet indéniable, il paraît d'un autre temps mais sa sensibilité et son élégance en font un disque presque intemporel. Il n'est donc pas étonnant de retrouver cet artiste atypique en première partie d'un autre trublion de la pop britannique, Neil Hannon et The Divine Comedy, pour un premier pan de tournée cet automne au Royaume-Uni, en espérant pourvoir le découvrir sur scène rapidement à Paris, sa ville de cœur.
tracklisting
    01. David And Jayne
  • 02. Taxi Ride
  • 03. How Can I Love Anyone Else
  • 04. All-Time Biggest Fans
  • 05. Too Many Lonely Nights
  • 06. The World’s Most Beautiful Cinema
  • 07. Break My Heart Again
  • 08. Handbrake Turns
  • 09. The Last One
  • 10. The World's Most Beautiful Cinema Pt 2
  • 11. Him Without Her
titres conseillés
    How Can I Love Anyone Else - Too Many Lonely Nights - Him Without Her
notes des lecteurs