Zac Lawrence

Entre la sortie du premier album de sa formation d'origine DEADLETTER , les dizaines de concerts qui ont suivi un peu partout en Europe, passant de clubs à salles de concerts ou scènes de festivals de plus en plus vastes, on peut décemment conclure que Zac Lawrence ne s'est guère économisé depuis lors. Plus d'un an après le succès plus que mérité de ce premier disque, le groupe c'est ainsi physiquement donné les moyens de marquer les esprits avec un rythme de tournée frénétique. Et pourtant Zac Lawrence a tout de même réussi à composer un second album solo intitulé Beware Of Pity qui, pour celles et ceux qui ignorent encore tout de la carrière solo du jeune musicien, ne manquera pas de les surprendre.

Pour rappel, avant même que Hysterical Strength ne soit révélé à la face du monde, sortait en catimini à la toute fin 2023 The Hate, premier album de Zac Lawrence dévoilant une face peu attendue aux habitués à la fureur DEADLETTER. L'anglais est un grand admirateur de musique folk, apprécie tout autant The Fall que ABBA, et sa passion pour la littérature (James Joyce pour ne citer qu'un parmi bien d'autres) lui permettent de créer un répertoire très personnel tout en acoustique, en douceur et subtilité.

Ce second disque perpétue cette volonté de se détacher de l'univers DEADLETTER et ce pour une bonne raison : développer une autre facette de sa personnalité semble indispensable à l'entièreté de ce musicien talentueux, et permet ainsi de ne pas brouiller les frontières entre deux univers musicaux qu'il bâtit conjointement. Ainsi, Beware Of Pity est un nouveau recueil de chansons qui entre dans la belle tradition du folk britannique, toutes mises en musique de façon très harmonieuse, Zac étant accompagné en plus de sa guitare acoustique de violoncelle et de clarinette. On retrouve derrière ces instruments Blossom Caldarone, musicienne live d'English Teacher, et le camarade Nathan Pigott de DEADLETTER. On passe de titres très orchestraux tel Total Evasion Of Comfort à d'autres flirtant avec un folk plus américain, avec cette petite touche presque country comme avec Susanna Reid.


Des tonalités plus ou moins chaudes selon le morceau, et au chant, Zac est également accompagné des chœurs féminins de Misty Miller, musicienne elle aussi issue du sud londonien, en activité depuis 2011. Une association peu banale qui tranche entre le timbre de voix très grave de l'anglais et la fragilité de celui de Misty Miller, rendant des morceaux comme Last Shot Fired et le mélancolique Hotel Hamburg presque émotionnels.
Une chose est certaine : le contrepied adopté par Zac Lawrence avec ce nouveau disque est audacieux. Sans même connaitre la carrière de ce dernier et sa réputation de frontman détonnant au sein de DEADLETTER, il apparaît aux premières écoutes comme un léger trouble, le timbre de voix si caractéristique de ce dernier n'étant pas le plus attendu dans un tel style musical. Cette tonalité très caverneuse apporte cependant de la profondeur, et il se dégage comme une légère tension, qui empêche ainsi l'ensemble d'être catalogué dans le registre un peu simpliste de « chansons folk ».

En maniant différentes nuances mais toujours sous le prisme de l'acoustique, donc d'un dépouillement volontaire, Zac Lawrence, avec Beware Of Pity, se lance un défi à lui-même ainsi qu'à ses fans, mettant en avant une facette très singulière de sa personnalité de musicien. Inspirée, fragile mais en même temps bien ficelée, cette nouvelle excursion en solo nous propose comme un interlude presque onirique en attendant la suite des aventures beaucoup plus agitées du musicien avec DEADLETTER.