Les bonnes habitudes, c'est retrouver Ash régulièrement (quasiment tous les deux ans, parenthèse du COVID-19 exclue) pour se faire administrer sa dose de power pop vitaminée depuis maintenant... presque trente ans ! Autant dire que cette sensation délicieusement régressive nous ramenant systématiquement sur les bancs du bahut est toujours des plus agréables et permet de ne pas tomber, pour pas mal d'entre nous, dans le côté obscur de l'âge mûr. Ash, ce sont toujours Tim Wheeler, Mark Hamilton et Rick Murray, fidèles aux postes, qui de surcroit continuent, surtout au Royaume-Uni, d'être généreux en prestations live, permettant à quiconque de raccrocher son wagon à leur locomotive toujours aussi enthousiasmante.
Preuve en est, nous avons cet été, baluchon sur l'épaule, arpenté la campagne anglaise en plein mois d'août pour retrouver les Irlandais au festival Heritage Live qui portait bien son nom car garni de groupes cultes comme The Charlatans ou les Manic Street Preachers. Durant cette belle soirée, Ash ont à nouveau transformé la foule, aux tempes majoritairement grisonnantes, en bande de gamins survoltés, balayant à cette occasion leurs plus grands tubes et en profitant pour nous délivrer quelques inédits.
Le plaisir est alors immense de retrouver ces morceaux dans le neuvième album studio du groupe intitulé Ad Astra. Un voyage vers les étoiles qui se déroule dans d'autres sphères, celles-ci toute en hauteur, ce nouvel opus gagnant définitivement en matière, car plus varié et peut être aussi plus mature que son prédécesseur Race The Night. Nous ne mettrons pas cela uniquement sur le compte du cap de la cinquantaine qu'approchent dangereusement nos amis, et en même temps, c'est une réalité : continuer de défendre un style plus proche de la bande son des cours de lycée que des open spaces d'entreprises ne peut se faire sans une certaine intelligence. Ash nous prouvent à nouveau avec Ad Astra qu'ils en ont toujours sous le capot et qu'ils maîtrisent encore parfaitement leur art du punk à roulette.
Dans cette nouvelle fournée, on perçoit un côté cinématographique : nos amis se mettent en scène dans un monde fait d'astronautes, de pilules bleues ou rouges et, c'est là le plus jouissif, dans la reprise de haute-tenue avec pas moins en entrée de disque que le thème revisité à la sauce punk de Ainsi parlait Zarathoustra de Richard Strauss, fameux depuis le film 2001, l'Odyssée de l'Espace, Zarathustra, puis, plus loin, tout aussi électrifiée, la reprise de Jump In The Line de Harry Bellafonte, découverte pour beaucoup d'entre nous gamins avec le Beetlejuice de Tim Burton. Cette dernière s'accompagne d'un vidéo clip à la sauce Halloween, où Tim Wheeler se bat à coup de guitare avec sa petite amie zombie avant un final digne de la chorégraphie de Thriller, créant ainsi un horrible petit bijou d'humour noir.
Après les hommages au septième art, c'est au tour des collaborations prestigieuses d'entrer en piste. Ash invitent Graham Coxon, toujours à la croisée des chemins entre bandes originales de séries, son duo avec Rose Elinor Dougall au sein The WAEVE et, quand les agendas le permettent aux uns et aux autres, Blur. Un artiste prolifique qui met au service des Irlandais son côté sale gosse que nous adorons tous avec deux titres aux saveurs « Blur-esques » indéniables, Fun People et Ad Astra. Grosses guitares et voix nasillardes pour l'un, refrain catchy et mélodie ultra accrocheuse pour l'autre, ces associations se révèlent plus qu'efficaces.
Le reste du disque détient son lot de titres un peu plus passe-partout mais qui font le boulot, nous retiendrons donc surtout quand Ash lèvent un peu le pied pour s'adonner à leur passion de la power pop toute en finesse avec toujours la guitare puissante apportant ce qu'il faut de charisme, comme sur Which One Do You Want. Hallion quant à lui fait exploser le plafond de décibels autorisés et a ce petit goût de Vans quadrillées et de sac à dos Eastpack qui tape dans le mille à nouveau. Deshumanised prouve que la plume de Tim peut aborder des thèmes plus graves mais jamais sans plomber l'ambiance, on y apprécie particulièrement les envolées de guitares sur le refrain, et on voit déjà Mark l'interprétant sur scène avec sa pelletée de moulinets de médiator comme il nous en sert depuis de longues années déjà.
La couleur de ce nouvel album est donc toujours celle du rose et jaune fluo de notre adolescence, et avec ces quelques sorties plus Britpop du fait de la venue de Graham Coxon, ce sont définitivement dans des volutes très 90s que nous progressons à l'écoute de Ad Astra. Ash continuent ainsi de célébrer la jeunesse, l'énergie et la bonne humeur sans jamais tomber dans le cliché, leur musique étant toujours honnête et spontanée depuis bientôt trente ans.
tracklisting
01. Zarathustra
02. Which One Do You Want
03. Fun People (feat. Graham Coxon)
04. Give Me Back My World
05. Hallion
06. Deadly Love
07. My Favourite Ghost
08. Jump In The Line
09. Keep Dreaming
10. Dehumanised
11. Ghosting
12. Ad Astra (feat. Graham Coxon)
titres conseillés
Jump In The Line, Fun People, Which One Do You Want