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This Is Not A Love Song

Nîmes, du 3 au 5 juin 2016

Live-report rédigé par Pierre-Arnaud Jonard le 12 juin 2016

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En ce samedi après-midi, Sheer Mag ouvre les hostilités. On pourrait penser vu l’heure que le public ne serait pas venu en masse mais la scène Mosquitos est bien garnie.

J’assiste au concert avec Mike Brandon, le chanteur-guitariste de The Mystery Lights, preuve en est que les groupes dans ce festival s’y sentent tellement bien qu’ils assistent aux autres concerts, discutent avec le public et ne restent pas dans leurs loges ou à l’hôtel comme malheureusement trop souvent. Sheer Mag est emmenée par Tina Halladay, une chanteuse au look on ne peut plus rock’n’roll. Le groupe qui n’a que deux ans d’existence balance un rock heavy du meilleur aloi. Un bon set de pur rock’n’roll à peine gâché par l’orage qui sévit alors.

Palehound que j’avais eu l’occasion de voir sur scène il y a quelques mois est un groupe indie américain très intéressant. Réminiscent de la vague indé américaine du début des années 90, ils jouent un rock teinté de folk très intéressant. Plusieurs de leurs morceaux, notamment Molly, sont particulièrement réussis. Un groupe vraiment prometteur d’autant plus que leur guitariste-chanteuse Ellen Kemper n’a que vingt-et-un ans.

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Le concert de Lush sur la grande scène ne me convainc guère. Je n’en suis pas vraiment étonné car je n’ai jamais accroché avec ce groupe. Certes, leurs morceaux sont plaisants mais je trouve que Lush manque d’âme. Surtout, chaque morceau ressemble beaucoup trop au précédent. On ne peut pas dire que leur reformation soit un échec, leurs nouveaux titres ressemblant comme deux gouttes d’eau aux anciens. Les fans ne sont donc pas déçus.

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Dirty Fences joue ensuite sur la scène Mosquitos, nouvelle cette année, sur laquelle le public va multiplier les découvertes intéressantes. Nombreux sont ceux qui citent les Ramones pour évoquer ce groupe mais Dirty Fences fait davantage penser aux Dictators et à Kiss. Leur look de scène rappelle celui des Eagles Of Death Metal avec ce côté redneck ricain détourné (même si chez Eagles of Death Metal, il ne l’est peut être pas). Leur chanteur-guitariste a presque le look d’un acteur porno US 70’s et il y a chez eux un côté cartoonesque, comme chez Kiss. Le bassiste du groupe a d’ailleurs une gestuelle et un look de scène proches de ceux de Gene Simmons. Du rock qui ne se prend pas au sérieux mais s’avère cependant excellent. Un set on ne peut plus fun dont on regrettera juste la brièveté, à peine plus d’une demi-heure.

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Air suit sur l’autre scène en plein air et délivre un set splendide. Le duo un groupe extraordinaire, sans doute l’unique au monde aussi statique sur scène et où, pourtant, la magie opère. Leur concert est un Best Of dans lequel n’apparaît aucun des morceaux des albums les plus récents. Le groupe concentre donc son set sur ses quatre premiers albums. Venus ouvre de la plus belle des manières le concert avec sa mélopée féerique. Don’t Be Light, tiré de 10000 Herz, sonne merveilleusement bien, avec une envolée krautrock mâtinée de psychédélisme. Cherry Blossom Girl est sans nul doute l’une des plus belles chansons d’amour écrites ces vingt dernières années et la version de ce soir un pur délice.
Playground Love baigne lui aussi dans le romantisme le plus total, beau et pur comme un poème de Byron. How Does It Make You Feel?, nappé de synthés majestueux est une autre perle du groupe, délivré ce soir-là de la plus belle des manières possibles. Pour amplifier encore, si besoin était, la magnificence de leur musique, le light show est de toute beauté. En écoutant ce concert, on se rend compte que ce groupe a déjà écrit un nombre de classiques impressionnants. Leurs morceaux passent sans encombre les années et on les réécoute aujourd’hui avec la même émotion qu’à leur sortie. La France n’est pas un pays pour le rock. Elle n’a jamais été douée pour cela. Mais pour la pop ouvragée et sophistiquée, de Polnareff à Air, elle a toujours su y faire.

Changement de registre total avec LUH. De la douce mélodie, on passe directement à un rock puissant et sauvage. Sur scène, le son de leur premier album déjà surpuissant sur disque prend une nouvelle dimension. Ellery James balance un son de guitare dévastateur sur lequel vient se fracasser sa voix ainsi que celle de Ebony Hoorn. Celle-ci sait passer d’un chant agressif à un chant plus mélodieux en l’espace de quelques secondes. L’ensemble batterie-claviers-guitare donne un côté mur du son qui impressionne. Le groupe entame son set par les morceaux les plus puissants de son album et le conclue par les plus mélodiques et mélancoliques : Loyalty et First Eye In The New Sky. Un équilibre qui leur sied bien. C’est cette balance entre rage et mélancolie qui fait tout le charme de ce groupe. LUH nous offrent ce soir un concert on ne peut plus convaincant.

Le concert de Dinosaur Jr est le clou de la soirée. Il se révèle comme le meilleur de ces deux premiers jours et sera au final le meilleur de tout le festival. Difficile de décrire avec des mots la beauté de la chose. On assiste juste à ce moment là à quelque chose qui dépasse le simple cadre du rock. On est dans l’indicible, le magique, la grâce absolue. Je suis au bord des larmes devant tant de beauté. Vingt-cinq ans après, Dinosaur Jr n’a rien perdu de sa fougue, de sa puissance, de son énergie. Ce groupe a influencé toute une génération de musiciens, a enchanté des millions d’auditeurs et il est aujourd’hui tout aussi essentiel qu’il ne l’était à ses débuts.
Lorsque le groupe joue Start Choppin, on pleure de bonheur et lorsque il entame Out There, l’un de leurs tous meilleurs morceaux, on est envahi par une intense émotion. On se dit à ce moment là que ce que l’on voit tient presque du miracle. Et surtout, on pense à ce que serait un concert de Nirvana aujourd’hui si Kurt Cobain n’avait pas décidé un printemps de 1994 de se tirer une balle dans la tête. Est-ce que Nirvana serait capable de donner en 2016 un concert d’une telle intensité ? Jay Mascis est tout simplement l’un des plus grands guitaristes du rock. L’homme est culte pour la génération grunge mais il est bien plus que cela. Il est sans doute le plus grand guitariste vivant avec Neil Young. Et le fait que cet homme aussi doué et talentueux soit accompagné à la basse par Lou Barlow, c’est comme un rêve qui devient réalité. Sur scène, ses changements de rythme, ses solos sont à la fois d’une précision et d’une beauté ébouriffantes. Un grand, très grand moment. Superbe.

La magie à l’état pur et le rock tel qu’on aimerait l’entendre toujours, incandescent et subtil, poignant et bouleversant.
artistes
    Air

    Dinosaur Jr

    Lush

    Breakbot

    LUH.

    Algiers

    Parcels

    No Zu

    Dirty Fences

    Her

    Bon Voyage Organisation

    Cavern of Anti-Matter

    Weaves

    Palehound

    Downtown Boys

    Omoh

    My Great Blue Cadillac