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Pitchfork Music Festival

Paris, du 2 au 4 novembre 2017

Live-report rédigé par Albane Chauvac Liao le 8 novembre 2017

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En dignes maîtres de cérémonie, The National ont concocté aux festivaliers de cette septième édition du Pitchfork Music Festival.

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Un trip musicalo-psycho-tropique, avec une entrée en matière sensuelle, assurée par les chants du grand Moses Sumney : « this song is about making out ». Des tonalités jazzy ambiant, le clavier fait du saxophone. Moses gratte. Une voix à l'aspect pointu, tranchant. Soudaine et forte, elle nous pointe la sortie de secours au 4ème cri des enfers.

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Une grande bouffée d'air frais par 14 degrés à 18h et hop, la british This Is The Kit nous réapprend la joie de vivre, avec tous ces instruments et cette infatigable Kate Stables qui a l'air de sortir d'un remake de Hair. Grosse guitare, ça se remplit. Kate a le bras droit levé, toute gorge déployée. Quelques moments de féérie : « trois anges qui vont venir chanter avec nous ». Jessie à la guitare, Rosie à la basse, Jenny sur la Batterie... du bruit, une impression de pluie. On est vraiment dans la communauté hippie. Ne manque plus que l'herbe pour décoller. Sur Bullet Proof, le refrain est moins enchanté (« Bullet proof, they never loved you / You let too many bullets through »). Des références aux éléments de la nature dans White Ash Cut (« Two white ash cut the sea / Pulling on wood from a fine old tree / White-legged water bug skimmed the deep »). Ainsi bercé, on se tenterait presque un petit roupillon. Fort heureusement quelques instruments à vent nous réveillent les tympans. D'un coup d'un seul, ça s'envole, ça part dans des dédicaces « à tous ceux qui aiment jouer aux dés » sur All Written Down In Numbers. Pour terminer, une ultime parole hippie : « Ca fait du bien d'être à la maison, on vit tous dans la même pièce ce soir ».

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Pour continuer dans la vaine Dame Nature, on est bienheureux de se retrouver bercé par les oiseaux de Chassol en une traversée de salle. Christophe introduit sa balade par Big Sun : oiseaux chanteurs et animaux sauvages. Les cris bestiaux aigus se mêlent au clavier et à la batterie, aux frottements instrumentaux, puis viennent la plage, la mer et les vapeurs océaniques. Un homme au visage marqué par la sagesse se confie : « Je suis parti sous des bois, j'ai entendu quelque chose de merveilleux, c'est ça ». Débute une imitation du coucou qui touche au sublime. Mathieu Edward, finaliste de la Star Academy 7, est à la batterie. Oui c'est important de préciser, une preuve vivante qu'on peut bien virer après une telle expérience. Le public est dans un état de réjouissance, face à la joie communicative d'un Chassol bouillant et contrôlé. A l'écran, un homme joue de la flûte de travers qui envoie voler les oiseaux partout dans la Grande Halle. Entre le clavier de Chassol, la batterie et la flûte c'est l'union parfaite de trois instruments. Une authenticité que le créateur va puiser aussi dans un rap des îles « Yes ai ». Soudain la chaleur ambiante et les bpm montent, montent...

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On salue l'originalité des programmateurs pour cet enchaînement Chassol / Rone. Bruit de moteur, centrale électrique. Rone-Erwan Castex, né en 1980 à Boul-Bi, arbore un petit marcel et des lunettes de matheux, accompagné par une batterie qui a de la bouteille, dans un background à la Sin City. Batterie qui a de la bouteille ? Le grand batteur John Stainer de Battles oblige. Le ton monte et la chaleur des corps grimpe en flèche : « techno music is my ultimate soulmate ». La ville devient rouge sang avec un fil jaune, une aura ensoleillée. Il ne faut rougir de rien, les petits bruitages vous chatouillent les tympans. Le DJ expérimental fait de la musique la bouche ouverte pour mieux laisser entrer le son. Apparition du féminin sur scène, une chanteuse : la touche séduction.

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De retour en terres anglaises avec un peu de shoegaze nineties en compagnie de Ride. Sans annonce ils commencent avec Lannoy Point : les vieux crachent dans le microphone. Et là, on ne distingue toujours pas les paroles mais c'est fuckin great (« the future in your brain ». Le son du shoegaze psyché, les paroles d'amour déchu de Seagull, que la foule hurle à s'en rompre la trachée (« You gave me things I'd never seen / You made my life a waking dream / But we are dead / Falling like ashes to the floor »). Sur la fameuse All I Want, les riffs de guitare électrisent les lumières et transforment n'importe quelle lampe de salon en météorite/patate chaude à 340°. Le titre Pulsar, sorti la veille, est joué sur scène à Paris pour la première fois. Le Pitchfork Music Festival a la tension artérielle scotchée. Après ce set de onze pépites qui nous auront presque laissé en pleine hallucination, on va se ressourcer au Playground avant de rejoindre Kevin Morby.

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En transition, une femme invisible nous chante l'espoir (« I wish I could say, I could share all the love that's in my life »). La voix d'une petite fille retentit (« the fire we left, that's the same fire we came from »). Prends-moi la main, allons vers la ballade des gens heureux, avant la jolie Harlem River : « I'm in lovelovelove. All because of you. I don't know just where I go ». Et le lauréat du meilleur costume de la soirée est attribué à Kevin et son costard noir aux notes de musique blanches. Trois guitars et une batterie auront suffi : « Oh, that city music / Oh, that city sound Oh, how you're pulling my heart strings and / Oh, let's go downtown ». On se sent comme dans un bouiboui d'Alabama.

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23h30, des directives à l'écran : « please stand by », un compte-à-rebour et The National qui s'acheminent sur scène : « This is pretty old ». Une introduction qui sonne come Air, avec plus de voix. Les gens craillent (cri et braillent). Visuel d'autoroute, les voitures donnent le ton (« I thought that this would go after à while. Why are you hiding from me », « And I cannot explain it / Oh, any other, any other way / I cannot explain it / Oh, any other, any other way »). Les clients se brûlent les cordes vocales sur le refrain. Sur Walkabout, la voix de Matt Berninger a de grands airs de Benjamin Biolay, et les paroles aussi (« I'm always thinking about you »). Évidemment, en anglais, tout de suite c'est plus mystérieux et sensationnel.
Les applaudissements sont rythmés par la joie partagée (« Wide awake feeling the feeling. I say I'm sorry, I know it's not working. Another year, another summer »). Il faut fermer les yeux et là plus rien ne compte autre que la musique… Sans compter la voix du fan qui chante fort, et faux. Tu veux une chose : être à la place de ce chanteur là-haut qui ainsi perché lâche ses émotions : « J'ai moins d'un an que j'habite à Paris, d'ailleurs on va chanter cette chanson pour ma femme Pauline qui est là ». Une dédicace aux chanceux habitants de l'Ohio sur Bloodbuzz Ohio (« This is for anybody from Ohio ») puis une fin sur Terrible Love, allongés dans les fauteuils, à savourer cette fin de premier jour, ce début d'une nouvelle édition.
artistes
    The National
    Rone
    Ride
    Kevin Morby
    This Is The Kit
    Moses Sumney
    Chassol
    Ethan Lipton & his Orchestra
photos du festival