C'est le dernier jour au Øya Festival de Oslo, Norvège ! Le festival fût une grande réussite avec une organisation parfaite et un formidable accueil comme on en a rarement vécu. Cette dernière journée reçoit entre autres la star norvégienne Sigrid, les cultissimes Yo La Tengo ou les excellents Dry Cleaning.

Nous débutons l'après-midi avec une découverte qui nous aura fait forte impression : les norvégiens de
Bo Milli. Un groupe de rock indé de Bergen porté par la chanteuse Emilie Østebø et sa voix d'une intensité qui vous prend aux tripes pour ne jamais vous lâcher. Un son tendu pour un rock sous tension avec des compositions alternant une certaine mélancolie et des passages en forme d'exutoire électrique. On pense à cette scène rock féminine allant de Soccer Mommy à Snail Mail aperçue la veille, mais avec un côté plus intime et chaleureux et une envie d'en découdre avec un public qui s'organise des mosh pits au son des guitares joyeuses. Efficace et addictif, Bo Milli est un excellent groupe de live avec un gros supplément d'âme.

La première tête d'affiche du soir prend déjà ses quartiers sur les coups de 16h sous le chapiteau Sirkus. Les américains de
Yo La Tengo reçoivent un accueil digne de leur réputation, après quarante ans de scène et de tubes à foison. Le trio oscille entre passages noisy avec cette guitare à géométrie variable qui nous dépoussière les oreilles et des évasions plus oniriques et calmes. Après un début de set très électrique, Yo La Tengo baissent leur énergie avec des titres plus en retenue au clavier comme
Mr. Tough ou les trois musiciens s'expriment dans une totale cohésion. Le groupe du New Jersey nous prendra par surprise avec une longue incartade noise de près d'un quart d'heure sur le titre
Pass The Hatch, I Think I'm Goodking, sans oublier les « palala » un peu poppy pour nous rassurer. Les longs riffs angoissants sont pourtant bien là, prolongés par les voix plaintives et monocordes des trois membres du groupe qui n'hésitent pas à changer d'instruments, la batteuse passant au clavier. Le labyrinthe sonore mené par la bande Ira Kaplan, chanteur et chef d'orchestre hyper précis de ce groupe nous a impressionnés au plus haut point.

Comment sortir de ce concert ? Rendez-vous sur la petite scène Hagen pour apercevoir les anglais de
Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs Pigs. Oui, Pigs sept fois. Le chanteur est complètement déjanté et nous gratifie des chorégraphies les plus ambitieuses qu'il nous ait été donné de voir. Il fait figure de Freddie Mercury du stoner rock avec son short moulant, son marcel et sa petite moustache. Les riffs gras de stoner psyché résonnent fort tandis que Matthew Baty attire tous les regards en posant, bougeant, dansant avec des moves inédits sans s'arrêter du début à la fin du set. Ça headbangue sévère dans les premiers rangs sur quelques passages inspirés du métal alors que la voix caverneuse peine à couvrir les riffs aux tempos compatibles avec la danse du quintet de Newcastle. Une guitare grasse et une batterie martyrisée font le bonheur du public le plus emo pour un show qui se vit comme une expérience. Matthew Baty est en tout cas l'un des leader de groupe les plus marquants et expressifs qu'on ait pu voir.

On retourne sous la scène Sirkus pour le concert très attendu de
Dry Cleaning. Dès l'introduction, la chanteuse Florence Shaw nous éblouit avec sa voix grave et monocorde, s'élevant lentement, avec une certaine nonchalance, au-dessus de rythmes et guitares post-punk hyper addictifs. Il faut un certain temps pour s'adapter, entrer dans ce concert grower et ce son particulier mais une fois qu'on a compris, quelle claque ! Entre une certaine méticulosité et subtilité pop avec des tempos ralentis et une excitation électrique qui peut arriver à tout moment, les compositions de Dry Cleaning semblent nous envelopper pour nous attraper par tous les bouts et ne jamais nous lâcher. Des pieds décollent subitement du sol et se mettent à sauter sur place sans trop comprendre ce qui se passe. Voilà un quartet qu'il est parfois difficile d'appréhender sur disque mais qui prend tout son sens en live. On se rend compte qu'on est face à l'un des grands groupes de la scène britannique actuelle. Le coup de grâce viendra sur la boucle de guitare stridente et entêtante du titre
Magic Of Meghan où l'osmose étrange entre cette guitare en roue-libre et cette voix restant dans l'ombre opèrent de manière idéale. Dry Cleaning nous ont complètement ébloui avec ce concert parfait qui restera comme l'un des meilleurs moments du festival.

Il est temps de se reposer un peu en profitant du sauna présent à l'intérieur du festival pour se remettre de ses émotions (oui, vive la Norvège). L'affluence est à son maximum sur la grande scène Amfiet pour accueillir la star norvégienne
Sigrid qui n'en revient pas d'un tel accueil. La musicienne a gardé ce petit côté sincère et innocent malgré le fait qu'elle soit devenue cette artiste renommée avec ses nombreux tubes électro-pop.
Sucker Punch est le premier d'entre eux avec une scène pour l'occasion entièrement transformée en écrans géants, y compris sur le sol, et quelques effets pyrotechniques de flammes géantes font leur apparition pour marquer la cadence de la danse. Sigrid passe à droite et à gauche de la scène pour danser avec son microphone, ses musiciens s'occupant des parties instrumentales, jusqu'à
Mistake Like You qu'elle interprète au piano et ou les étincelles tomberont du ciel pour accompagner le final épique. La fin du concert voit l'enchainement du titre mid-tempo
Don't Kill My Vibe dont les choeurs seront repris par un public se lançant définitivement dans la danse et le moshpit. Le final sera fera évidement avec le tube
Strangers dans un karaoké général pour un paroxysme d'électro-pop d'une artiste face à son public pour une conclusion de festival en forme de communion.
C'en est terminé du Øya Festival pour cette année 2023 ! L'expérience vaut vraiment le coup et on ne peut que conseiller de tenter l'aventure de cet événement qui a su grandir tout en conservant une certaine authenticité et une taille humaine. Les scènes ne sont pas trop grandes, on peut s'en approcher facilement et la visibilité et bonne. Au niveau des groupes, on retiendra évidemment Boygenius, Blur, Dry Cleaning, Jockstrap, sans oublier Amyl And The Sniffers et High Vis. Quant à l'organisation, elle figure parmi les meilleures jamais vues en festival. Un grand merci aux équipes pour leur excellent accueil !