logo SOV

Very Good Trip Festival

Bellocq, du 14 au 16 juin 2024

Live-report rédigé par Laetitia Mavrel le 18 juin 2024

Bookmark and Share
Nous voilà de retour à Bellocq dans le château de nos irréductibles fans de rock indé béarnais à l'initiative du Very Good Trip Festival, pour sa troisième édition. Les tours de la forteresse du 13ème siècle se dressent, ornées de leurs drapeaux rouges et jaunes fièrement hissés, et Mathieu et sa bande de copains sont à nouveau mobilisés pour accueillir les 500 festivaliers journaliers venant découvrir une fine sélection de musique cosmopolite tournant toujours autour du rock, laquelle pioche dans pas moins de cinq continents mais avec la particularité d'être toujours interprétée en langue anglophone. Cette troisième récolte offre une fine sélection de pop, rock, folk, psyché, afro dub, ambiant et autres saveurs, le tout toujours élaboré par les courageux bénévoles, avec le soutien de partenaires et quelques mécènes locaux pour ajouter une nouvelle corde à l'arc culturel de cette belle région.

Cette nouvelle édition élargit son horizon vers des genres un peu plus recherchés, et c'est une belle brochette de découvertes que nous faisons durant ces trois jours, à l'ombre des tourelles et cette année, sous les chapiteaux abritant un bar plus large, un DJ, un disquaire indépendant et une carte de restauration étoffée 100% faite maison. Mais la véritable vedette de la soirée sera l'espace chill qui permettra de protéger les festivaliers des intempéries, qui évidement ne nous ont pas épargnés pour ce premier jour des festivités.


Ce vendredi mise sur les jeunes talents et pépites en devenir. Sous un ciel menaçant, le bal est ouvert par Rüdiger, patronyme derrière lequel se cache Felix Buff, musicien basque qui propose une pop fleurant bon l'ORTF et les gitanes maïs. Sa formation parle plusieurs langues dont le français, le basque, l'espagnol, l'italien et offre un set qui met parfaitement dans l'ambiance pour enfin se décontracter après la semaine de boulot, si ce n'était sans l'arrivée de la pluie qui sous sa forme béarnaise arrose rudement la tête des festivaliers lors d'une averse aussi titanesque que brève, repoussant les spectateurs vers les chapiteaux providentiels. Rüdiger, décidément habitué aux frasques de la météo locale, ne se démonte pas et termine le set avec humour et toujours le sourire (et la moustache) aux lèvres.


C'est ainsi que la fête débute sous les tentes grâce au DJ Alexis Distraction venu animer les changements de plateaux. La carte de la buvette 100% locale (de la bière aux colas au nom basque imprononçable, en passant par l'eau des Pyrénées, le vin et l'energy drink pour les plus motivés) permettent de patienter en dansant et en se désaltérant, avec le sacro-saint saut vers les stands de frites tenus par de véritables belges. A défaut de l'astre solaire, ce sont Sunfruits qui nous fourniront les premiers rayons de chaleur de la soirée. En provenance d'Australie, nous retrouvons avec plaisir le groupe de Melbourne quinze jours après une prestation remarquée à la Block Party des copains du Supersonic à Paris. Dépourvus de leur claviériste Charlie mais bien plus à l'aise sur la scène du château qu'engoncés dans le Guru Club, Eugene, Winter, Evie et Elena permettent de déverser un peu d'été sur le festival grâce à leur mélange savant de rock psyché et de glam perché, rehaussé par les tenues et les maquillages particulièrement funky. Bien que majoritairement inconnus des spectateurs, Sunfruits réussissent à rafler la mise entrainant ces derniers dans leurs premiers pas de danse, jonglant entre les restes d'averses, les micro-coupures de courant du fait des plombs sévèrement détrempés, et cependant jamais décontenancés. Le discours de soutien des membres du groupe à la Palestine trouve un auditoire réceptif et les morceaux issus de leur premier album One Degree terminent de rallier tout le site à la cause des australiens.


Ce sera donc une soirée humide mais chaleureuse qui se dessine grâce à l'ardeur dont font preuve les bénévoles en plein rush curry coco. Le néophyte qui n'a toujours pas assimilé qu'on ne peut décemment pas partir en festival sans un K-way et une paire de Dr. Martens s'en mordra un peu les doigts, mais le groupe suivant vaudra toutes les paires de chaussettes humides et autres bronchites qui guetteront le lendemain matin. Suivent sur l'unique scène placée entre les deux majestueuses tourelles Kids Return, phénomène pop feel good issu de Paris et mené par le duo Clément Savoye et Adrien Rozé. Adoubé par Les Inrocks, le duo a déjà à son actif une petite série de prestations scéniques de haute volée. S'étant déjà produits à l'AccorArena en premier partie de Mathieu Chedid ou seuls à la Cigale, en partance pour la Chine dans les jours qui suivront, Kids Return viennent en amis et apprécient la proximité et l'esprit DIY du Very Good Trip Festival. Pas de chichis étant le leitmotiv du festival (tout comme l'assurance de ne pas y trouver les immondes beignets), Kids Return offrent un set aussi pro que décontracté, à l'image de leur pop élégante inspirée du meilleur de la french touch des années 2000. Beaucoup des présents ont déjà goûté au répertoire raffiné des jeunes franciliens et c'est devant une petite foule conquise que les musiciens assurent la fin de la première partie de soirée, en confirmant que leur esthétisme, bien que très parisien, sied à tous, la qualité de leur composition étant incontestable.

Le soleil décline, les averses se transforment en légère bruine qui colle aux lunettes, mais tout le monde tient bon car la suite du programme va enfin aborder la partie british si chère à Sound Of Violence. Au menu ce soir, du rock bien barré de Manchester avec Spangled et de l'indie racée en provenance de Birmingham avec SOLAR EYES, ces derniers biens placés dans la course aux chouchous 2024 de la rédaction.


C'est un donné pour un rendu ce soir : Mathieu, fidèle lecteur de Sound Of Violence, nous aura fait découvrir les jeunes mancuniens alors que nous lui avons vendu l'excellent premier album des brummies. Ainsi, nous faisons la connaissance de Spangled, soit Ben Johnson au chant, Jamie Halliday à la guitare, Niall McGovern à la basse et Nathan Kenyon à la batterie. Pas bien âgés mais avec déjà à leur actif toute une série de singles égrenés depuis 2019, Spangled viennent de sortir un premier EP Always In Colour et le résultat obtenu sur scène nous démontre que le talent n'attend pas le nombre d'années. Spangled ne réinventent pas le fil à couper le cheddar avec leurs influences très Happy Mondays, saupoudrées de guitares empruntées à quelques vieux groupes de hard rock britons, mais réussissent à produire un melting pot intelligent qui fait décoller la température dès les premières notes avec Crank Up The Splendour, Swordfish Trauma et le très bon Horizon's Glance.
Ce qui nous subjugue est la personnalité de Ben Johnson, petit mec qui, une fois juché sur scène, vampirise littéralement toutes les attentions. Laissant les instruments à ses trois camarades, Ben se consacre entièrement à l'expression corporelle venant danser, sauter, onduler, se contorsionner, prenant des poses de diva comme de pantin désarticulé, son élasticité ainsi que sa gouaille venant vêtir d'encore plus de folie les morceaux de leur répertoire. Faisant fi de la scène détrempée, les cascades se succèdent, le sourire est à son firmament et le groupe d'entraîner le public compacté à ses pieds dans les premiers chahuts (mais toujours bon enfant, que l'on aime ce festival !) et de rajouter ainsi sur notre « to do list » dès ce début de semaine la chronique de leur nouvel EP.


La soirée va bientôt toucher à sa fin, le ciel se dégage timidement et les plus frileux ont malheureusement plié bagage car l'humidité béarnaise sait vous atteindre dans tous les recoins. Demeure cependant une petite masse de passionnés rencontrant ce soir SOLAR EYES. A la suite de la chronique dithyrambique de la rédaction, nous rencontrons enfin Glenn Smyth et Sebastian Maynard Francis, le premier à la guitare et au chant, le second à la batterie, têtes pensantes de ce projet qui a débuté dès 2021. Accompagnés sur scène de la bassiste Emily Doyle et du guitariste irlandais Liam McKeown, leur rock teinté d'influences psychédéliques tout comme doté de cette intense touche d'electro rock réussit à pousser hors de leurs retranchements les derniers réfugiés des tentes pour se rendre au pied de la scène. Avec ses petits airs « à la Liam G », bob vissé sur le crâne et lunettes lui mangeant tout le visage, la nonchalance maitrisée de Glenn contraste alors avec le look très vintage de Liam, dont la veste en daim à franges nous évoque l'allure de cowboy de supermarché de Jean Dujardin dans le film Le Daim (nous rendrons hommage ici à Emily elle-même qui nous a soufflé cette magnifique référence !). On plonge dans l'univers entêtant de leur premier album éponyme à l'écoute de Dreaming Of The Moon, du (décidément) très Oasisien She Kissed The Gun et de la petite bombe cosmique Bulldozer. SOLAR EYES remportent tous les suffrages et confirment tout le bien que nous pensons de ce groupe dont les membres se révèlent être de surcroit de véritables crèmes, remerciant à tour de bras tous les présents d'avoir résisté à la pluie, très touchés par les petits soins qui leur sont apportés par l'équipe des bénévoles et profondément séduits par l'accueil chaleureux des béarnais. Un groupe taillé pour le succès que nous continuerons d'encourager vivement.

Une première journée qui se termine sans pluie, sous les étoiles, les pieds légèrement trempés mais qui aura permis au Very Good Trip Festival de remplir son contrat de débroussailleur de nouveaux talents pour les oreilles d'un public avide de découvertes, les petites villes de cette magnifique région étant plus boudées par les propositions rock indé que leurs cousines les grandes agglomérations, si ce n'est celles du Pingouin Alternatif à Arthez-de-Béarn tenu, vous l'aurez deviné, par le fameux Mathieu. Direction la maison sous l'ombre bienveillante des tourelles de la forteresse pour un premier repos réparateur afin d'aborder la seconde journée que Sainte Evelyne Dhélia nous a promise ensoleillée.
artistes
    Rüdiger
    Sunfruits
    Kids Return
    Spangled
    Solar Eyes
photos du festival