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Rock en Seine

Paris, du 20 au 24 août 2025

Live-report rédigé par Jean-Christophe Gé le 28 août 2025

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jeudi 21
C'est la journée en mode poisse pour Rock en Seine. Sa programmation rap bling-bling a fondu comme neige au soleil, qui lui a finalement décidé de venir. A$AP Rocky a été remplacé il y a quelques mois par Kid Cudi et c'est finalement Doechii qui aura annulé il y a deux jours. L'absence d'une artiste américaine dans le top 200 de Spotify est probablement une bouffée d'air financière alors que les billets "step 2" (sur 4) ne sont toujours pas écoulés, aucun remplacement n'est ainsi prévu. Cette journée glisse un peu plus vers un mélange hétérogène assez intéressant si le festival avait gardé une âme sur plusieurs jours, mais dans un format saucisson thématique à plus de 80 euros la tranche, il faut avoir le goût du risque et le portefeuille bien garni.


On commence avec Tors par de la pop folk joyeuse à la Coldplay acoustique avec des choeurs pour que le public chante, dans un parc sous le soleil c'est tentant. A trois, un chanteur et sa guitare acoustique, un batteur et une guitare électrique, ils arrivent à avoir une bonne présence scénique. Ils interagissent avec le public et chantent sur les trois A de la pop insouciante : Amour, Amitié et Alcool. Leur petit côté propre à la Dire Straits ou Mumford And Sons m'encourage néanmoins à rejoindre le côté obscur de la force.

Changement radical d'ambiance avec Montell Fish en provenance de Pittsburgh : looks de rappeurs avec fringues XXL et casquettes qui pointent chacune vers les quatre points cardinaux, mais line-up rock avec le classique guitare, basse et batterie. Le son est énorme mais la voix de Montell Fish très douce et charmeuse. Le mélange de R'n'B et de rock est très efficace et ce sera une des découvertes de la journée pour moi.


On reste en Pennsylvanie avec Zinadelphia mais voici à nouveau un changement radical d'ambiance, plus suave et soul. Sur la petite scène Horizons, je vois une guitare, une batterie, une chanteuse et ses plumes de paon, mais dans la sono du piano, des cordes et des chœurs. Je comprends les contraintes économiques, mais dans l'art il faut prendre des risques, ou prendre parti, cet entre-deux playback/live n'aide pas à rentrer dans le set, d'autant que nous serions mieux dans un club de SoHo avec le fantôme d'Amy Winehouse.


Je suis très curieux de voir Greentea Peng dont le Green avait fait groover notre playlist du mois d'août. La Londonienne est accompagnée d'une batteuse, un percussionniste, un guitariste, une basse et un DJ qui lance des samples. Le set démarre par une reprise de Bang Bang avant de partir dans une direction inattendue. La musique est précise mais on a l'impression d'être invité à un jam entre musiciens qui maîtrisent les rythmes et les mélodies, pour un gros kiff sur scène et dans le public. Le mélange de hip-hop et trip-hop donne une atmosphère nostalgique et très plaisante à ce groove bien maîtrisé. C'est une autre belle découverte.


L'enchaînement est parfait avec Vampire Weekend. C'est avec une facilité déconcertante que je traverse tout le site pour me placer vers le dixième rang. Ezra Koenig est seul avec sa guitare sur le devant de la scène, il y a un gigantesque backdrop Vampire Weekend derrière lui. Il se présente dans un français impeccable et commence le set seul, je me demande si le staff de Kid Cudi est en train de monter une scène de dingue derrière le backdrop quand celui-ci tombe et découvre huit musiciens tous en blanc, dont deux batteurs. Leur set est bondissant et joyeux, musicalement ils sont au top avec des instruments qui jouent et se répondent, leurs chansons prennent une autre dimension en live. Ezra fait un commentaire sur Oasis, mais contrairement à Suki Waterhouse, il a la ref puisque Vampire Weekend jouaient juste avant Oasis en 2009. On se laisse avec un Walcott absolument magique. C'est de loin mon concert préféré de la soirée et l'enchaînement va être rude.


Les texans de Khruangbin ont une superbe identité sonore avec une basse très claire, une guitare avec un beau pédalier (delay, flanger, disto), mais la batterie planquée dans un coin de la scène n'apporte pas grand chose. Leur discographie funk sans paillettes ni sirènes peine à décoller et l'exercice de style chill et contemplatif est trop downtempo.

Je vais jeter une oreille à Noor, mais seule derrière son piano, même si elle chante de toutes ses tripes, elle couvre tout juste la soupe en pilotage automatique de Khruangbin. Sa chanson française, habitée, dans la veine de Zaho de Sagazan est un ovni dans la programmation du jour.

Bloody Civilian ne me convainc pas non plus. C'est une bonne idée d'avoir une DJ et un MC pour chauffer son set, mais ce dernier est lourd comme un DJ de mariage à qui on n'a pas interdit le microphone. Le contraste avec la voix élégante et puissante de la chanteuse Nigériane est dérangeant, d'autant que le son sur sa voix est tellement parfait que l'on craint un playback.


Kid Cudi, lui, ne chante pas en playback, c'est sûr, ou alors il a trop eu la flemme d'enregistrer une version juste. Côté scène, c'est l'anti Chappell Roan : pas de décor, pas de danseuses ou danseurs, pas d'instruments, même pas une platine ou un deck de sample, rien. Le gars a tout compris : il doit voyager léger avec un laptop et un micro, pas de supplément de bagages et pas de cachet à partager. Il n'oublie pas de faire la promo de son nouvel album qui sort le lendemain. Kid Cudi aime se faire applaudir et le public aime l'applaudir, c'est win win. La question qui reste à élucider ce soir est : Bart ne sait-il vraiment pas nager ?

Direction la sortie pour la scène du Bosquet qui pourra attirer ceux qui n'accrochent pas à Kid Cudi. Et c'est ici que ça se passe, le light show est spectaculaire pour une scène si petite. Barry Can't Swim et sa guitare sont coincés derrière des machines, un batteur enfonce le beat et une deuxième claviériste étoffe les sons. Il y a de l'urgence dans le jeu, de la musique et un beat envoûtant comme un trip des Chemical Brothers, des habitués de la Grande Scène. On pourrait danser jusqu'au bout de la nuit ou presque. Le monde marche à l'envers, Barry méritait la grande scène, comme l'album Loner mérite votre attention.
artistes
    Alemeda
    Andeol
    Barry Can't Swim
    Bloody Civilian
    Enchantée Julia
    Greentea Peng
    Khruangbin
    Kid Cudi
    Le Monde Daho
    Mk.gee
    Montell Fish
    Noor
    Still Woozy
    Tors
    Vampire Weekend
    Zinadelphia
photos du festival