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Nova Twins

Parasites & Butterflies

Nova Twins - Parasites & Butterflies
Chronique Album
Date de sortie : 29.08.2025
Label : Marshall Records
45
Rédigé par Lena Inti, le 28 août 2025
La tornade Nova Twins a déboulé en 2020, juste avant le confinement, à grand coups de poings dans la face avec un premier album, Who Are The Girls?, rempli d'hymnes urban punk très saturés tels que Vortex, Taxi et Devil's Face. Leur particularité ? Un son mêlant rock indus, hip-hop et R'n'B, flirtant parfois avec le métal et dont la basse saturée rappelle parfois Rage Against The Machine (Tom Morello les a d'ailleurs adoubées).

Les jumelles Nova, amies depuis l'enfance, sont aussi très engagées dans les causes de représentation des femmes sur la scène musicale, et plus particulièrement des femmes de couleur. Peu après la sortie de leur premier disque, elles ont lancé « Voices For The Unheard », permettant d'ouvrir des discussions sur le sujet, de sortir des projets musicaux et de promouvoir sur scène des artistes alternatives sous-représentées. En 2022, elles ont mis un coup de pied dans la fourmilière et ainsi contribué à la création d'une catégorie « Musique alternative » aux MOBO Awards (récompensant les musiques d'origine noire). Un sacré progrès, surtout lorsque l'on sait que cette même année, leur sélection au Mercury Prize pour leur deuxième album Supernova a constitué la toute première nomination d'un groupe de rock noir à cette cérémonie... Mais tout va bien au vingt-et-unième siècle...

Bref, durant deux ans, elles n'ont pas chômé : elles ont fait la couverture de nombreux magazines, effectué une tournée intense et continué de créer de nombreux vêtements, dans la démarche DIY qui leur est propre. L'image d'héroïnes surpuissantes présente sur les pochettes d'album, les vidéo clips, dans la musique, les paroles et dans l'énergie déployée lors de leurs shows généreux est leur marque de fabrique. Cette formule fonctionnait bien, mais alors nous pouvions nous questionner : après deux albums réussis, comment ce cocktail explosif pouvait bien se renouveler et ne pas devenir sa propre caricature ? Nova Twins ont naturellement trouvé la réponse à la fois dans les moments un peu trop intenses de leur vie de musiciennes, mais aussi dans la descente qui a suivi la fin de la tournée Supernova. Après la joie de retrouver sa famille et ses ami(e)s, comment gérer le vide soudain post-tournée, le rythme de vie radicalement différent, vraisemblablement beaucoup plus lent, et surtout, le silence alentour qui laisse seule avec ses propres pensées, forcément plus sombres après être passé de l'euphorie et de la frénésie, du « Tout », au calme et au silence assourdissant... au « rien » ?


Ne vous y trompez pas : les Nova Twins sont toujours surpuissantes, elles ont d'ailleurs appris beaucoup ces dernières années, ont grandi, évolué ; et c'est aussi passé par le fait d'accepter les descentes et apprendre à les gérer et à les nommer. Ces pensées sombres, le vide effrayant, l'anxiété, ce sont les parasites ; la puissance, l'héroïsme, la communication, l'entraide, la joie, et surtout l'évolution, ce sont les papillons.
Parasites & Butterflies représente la mutation des Nova Twins : on ne se questionne plus de savoir qui sont ces filles, et elles ont quitté l'armure de Supernova pour faire face à leurs démons. Monsters représente cette capacité à repousser les problèmes du monde tout en ayant des difficultés à faire face à sa propre anxiété : la basse lourde et la batterie elles-mêmes sont parfois stabilisées et apportent du groove ; puis elles partent en vrille chacune de leur côté. Les chœurs menaçant rappellent vaguement ceux des bandes originales de films d'horreur... Sandman évoque le vide et le pont entre le chaos et la beauté qui caractérisent ce troisième album. Le marchand de sable, bien loin de nous endormir, est un titre nerveux, mélange d'électro syncopé, de drum & bass et de sable dans les yeux. Pourtant, pas un synthétiseur à l'horizon : tous les sons enregistrés à la basse et à la guitare en faisant des claquettes et en sautant sur les pédales.

En plus d'années intenses à tourner et le dur retour à la vie « réelle », le deuil fait partie du vide et des ruminations évoquées sur Parasites & Butterflies : c'est le cas du bijou Hummingbird, qui débute par un sample de la magnifique berceuse chantée a capella par l'artiste iranienne Mahsa Vahdat, Lullaby, hommage aux racines iraniennes de la chanteuse et guitariste Amy Love. Le rythme lent de ce titre qui mélange rock minimaliste avec la présence de violon et de violoncelle, et des influences R'n'B, hante l'esprit de la plus belle des manières. Pour la première fois, Nova Twins se montrent vulnérables, et c'est aussi une force : se montrer humaine dans un monde qui perd son humanité est un geste puissant, et un des rôles des artistes. La basse vociférante, accompagnée de riffs tranchants comme les dents du titre Piranha, dénonce cette perte d'empathie et de solidarité, explorant la peur et la rébellion envers une société en perdition qui se fait prédatrice.


Nova Twins ont donc évolué par les thèmes abordés, et également par de nouvelles expérimentations au niveau du son : en effet, pour rendre justice à leur créativité et à leur grande palette d'influences, elles ont fait appel à plusieurs batteurs : Ilan Rubin de Nine Inch Nails pour le côté indus, ZEP pour les fantaisies, George McDonald de Kid Kapichi, et bien sûr leur musicien live Jake Woodward. Côté production, Amy Love et Georgia South se sont départies de Jim Abbiss (Arctic Monkeys, Adele, Kasabian) ayant produit les deux premiers albums, pour travailler avec Rich Costey (Foo Fighters, Deftones, Sam Fender, Charli XCX) dans le Vermont.

Cet album est certainement le plus riche des trois par la diversité de ses influences et de ses textures, influencés par la dualité qui se manifeste jusque sur la pochette : les chansons vulnérables derrière le métal brillant des super Nova Twins, celles d'où transpirent le contraste entre chaos et beauté Hide & Sick et le final Black Roses, sans rien perdre du gros son de bad bitch aux relents hip-hop qui leur est propre depuis le début : Soprano, Drip, le single irrésistiblement fun et dansant N.O.V.A., avec même une touche de funk brésilien en intro de Parallel Universe.
tracklisting
    01. Glory
  • 02. Piranha
  • 03. Monsters
  • 04. Soprano
  • 05. Drip
  • 06. N.O.V.A.
  • 07. Sandman
  • 08. Hummingbird
  • 09. Parallel Universe
  • 10. Hide & Seek
  • 11. Hurricane
  • 12. Black Roses
titres conseillés
    Soprano - Drip - Hummingbird
notes des lecteurs
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