Exception faite d'une prestation dans la petite salle de l'Internationale l'année passée et d'une poignée d'apparitions en tant que choriste et première partie de Bombay Bicycle Club, Lucy Rose semble encore être une parfaite inconnue en France à l'heure actuelle. Sans support d'une quelconque maison de disques dans l'hexagone, la jeune anglaise dont le premier album,
Like I Used To, a récemment atteint la 13ème place des charts britanniques, achevait cette semaine sa courte tournée européenne par une date à la Maroquinerie de Paris.
Sous un temps lourd et humide, l'arrivée à proximité de la rue Boyer aux alentours de 20h15 a de quoi surprendre. A l'étage, avant de franchir les portes du lieu, le silence règne et le bar semble désert, un barman accoudé à son comptoir patientant tant bien que mal dans l'attente d'un quelconque client. La première partie,
Jack Beauregard, est déjà à l'oeuvre devant un auditoire épars et majoritairement assis. Trente minutes d'une musique folk dépouillée et puis s'en va non sans quelques applaudissements polis.

Ce soir, la petite centaine de curieux ayant fait le déplacement, alors que le tout Paris du rock s'est massé au Palais Omnisports de Paris Bercy en compagnie de Radiohead, semble être en attente d'une découverte, voire d'une révélation. L'installation du matériel de
Lucy Rose et ses quatre musiciens laisse rapidement entrevoir une personnalité à part. Comme à son habitude, la musicienne ne se produira pas debout mais installée, guitare acoustique en main, sur un tabouret surélevé par une estrade constituée de bric et de broc, constituant un trône de fortune pour la princesse du soir.
Cette dernière, loin de jouer les divas, affublée d'un jean noir et d'un t-shirt à l'effigie du groupe Dry The River, pénètre sur scène à 21h l'air sérieux et concerné, assurément consciente que la tâche lui ayant été allouée ne sera pas des plus simples à accomplir. Face à cette frêle silhouette et une certaine fragilité enfantine, le public semble tout aussi intimidé que la londonienne durant les deux premiers titres joués. Après une entame toute en douceur sur
First, la montée en régime se précise avec
Red Face durant lequel ses quatre musiciens, incluant Björn Ågren (ex-Razorlight) à la guitare, apportent plus de corps à l'ensemble et accompagnent une voix surnageant désormais.
Acclamée à l'issue de ce titre, la jeune anglaise affiche un certain soulagement se traduisant par un sourire de satisfaction. Le réveil de la salle se confirme avec
Lines avant que l'anglaise n'annonce
All I've Got, jouée pour la première fois en live avec son groupe et répété quelques heures avant pour l'occasion. Dans un style plus pop que folk, sa voix ne connait ce soir aucun raté, la pureté de son chant faisant des merveilles alors que
Night Bus et ses choeurs puis
Scar et ses déchirants « help me » maintes fois répétés font dodeliner les têtes.

Lancé, à l'image de sa version studio, par une introduction aux sonorités plus expérimentales,
Middle Of The Bed semble attendu et provoque une réaction vive de la salle. A l'issue de
Watch Over, un nouvel échange de la musicienne avec le public s'accompagne de quelques explications quant aux craintes apparues après avoir appris trente minutes avant sa montée sur scène de la tenue du concert de Radiohead dans la capitale. Quelques remerciements plus tard, au terme de près de trois quarts d'heure de prestation, c'est sous des clappements de mains enthousiastes que son dernier single en date,
Bikes, immédiatement reconnu par une salle désormais enthousiasmée, clôt avec brio son set.
Réclamée avec insistance par le public, Lucy Rose, surprise par une telle réaction, effectue alors son retour pour un rapide rappel non sans insister une fois encore sur le plaisir pris ce soir et la satisfaction retirée d'un tel accueil.
Don't You Worry clôt ainsi définitivement les débats, tout en douceur, alors que les lumières du lieu s'allument sous de nouveaux applaudissements nourris. Irrésistible et charmeuse, dotée d'une voix sublime, Lucy Rose, du haut de ses vingt-trois ans, semble avoir une voie vers le succès toute tracée.