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CHAMPS
Serafina Steer

Paris, Flèche d'Or - 12 février 2013

Live-report par Edina Tymp

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La Flèche d'Or accueillait mardi dernier une jolie soirée [PIAS] Nites avec un plateau de découvertes internationales, chavirant paisiblement d'univers calmes en fantaisie passagères.

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Tout commence avec On And On, quatre jeunes américains incluant une demoiselle au clavier. Leur concert est astucieusement animé par des projections presque Kandinskiennes, se retrouvant parfois sur la jambe gauche de la claviériste. Très concentré, ces jeunes gens de Brooklyn entonnent au dépoté leur tube Ghosts, sorte de montagnes russes à sensations. Il leur faudra trois titres pour développer toute l'ampleur et l'ambition de leur musique. Avec de belles introductions instrumentales et quelques envolées expérimentales, une voix intéressante - pourtant peu mise en valeur, On And On semblent en garder un sous le pied pour plus tard. On devine cependant ce que le groupe prépare, appréciant particulièrement les contrastes de basses terriennes et la voix aérienne du chanteur doublée par sa comparse. Leur nonchalance sensuelle et touchante évoque MGMT, leurs intentions dissimulant des aspirations de conquistadors sonores du nouveau continent.

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Rapidement le deuxième groupe s'installe. Ils sont cinq sur scène et étrangement entassés côté jardin. Peut-être est-ce une technique thermique importée et brevetée chez les saxons ? Immédiatement, ils parviennent à créer une ambiance très feutrée, qui ira crescendo; appuyée par le double-chant à l'unisson des deux leaders, même si celui grimé en gourou de la force obscure semble prendre le dessus. Une fois n'est pas coutume, la batterie reste d'une folle discrétion, accompagnant presque imperceptiblement les autres chants. L'écrin fabriqué par Champs est méticuleux et alterne entre chant et guitares, porté par des pulsations cardiaques basse-batterie. Le travail de la voix est d'une saisissante qualité, livrant une délicate prestation, tout est subtile et de bon goût. Les mélodies apaisantes et simples renvoient ici à Fleet Foxes pour le côté floral, et à Brokeback Mountain pour la bromance assumée. Étonnement, un des titres évoque un tube d'Alain Souchon. Au fur et à mesure du set, les chansons se délitent pour ne conserver que la voix, encore et toujours. Clairement inspirés par les protest-songs folk de Bob Dylan, Champs préparent l'antichambre fœtale idéale, chaude et agréable. Ils s'aventurent parfois dans des airs plus grandiloquents, mais ne sont définitivement pas des nerveux.

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Champs nous ont bien bordés, Serafina Steer peut alors nous chanter des comptines accompagnée de sa harpe. On reste dans une ambiance très intimiste mise en relief par une diction toute personnelle s'apparentant plus aux chansonniers des music-hall allemands des années 30 qu'aux pubs londoniens, comme par exemple sur Day Glo. Son compagnon d’élégie mouvementée reste front baissé sur son TR-808, balançant des beats aussi variés que Sexy Sushi. On se retrouve propulsés en pleine bossa de quatre sous, un transfuge de Nouvelle Vague sous codéine et Feist sans baskets. Des clins d'oeil à l’espièglerie de Soko, la sagesse de Joni Mitchell, le phrasé de Nico... et même la coiffure d'Yvette Horner. Le public est tout ouïe, transporté dans un univers de revendications féériques. Habile pour la déconstruction rythmique et mélodique, Sérafina Steer deviendrait même inquiétante par sa singularité.

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Nous ne sommes que mardi soir, le week-end est loin, il commence à se faire tard et on nous a jusqu'à susurré de jolies choses aux oreilles; difficile à ce moment là de ne pas piquer du nez. C'est alors que surgit, coiffé d'un stetson, empoignant sa fière guitare, Lord Huron, fervent défenseur d'une mythologie chargée de poussière du far Ouest, résumée sur Time To Run. Le shérif de la soirée va nous faire voyager sur ses terres et présenter ses croyances animistes (In The Wind. Le set démarre sur les chapeaux de roues, c'est fourni, ça explose dans tous les sens comme dans les westerns, un régal ! Des riffs malins, une voix franche qui s'affiche comme sur un blues (The Stranger), des mélodies qui font mouche et des refrains fédérateurs... Remplies de percussions tropicales et de vieilles histoires à cheval (Lonesome Dreams), Lord Huron s'entoure de pirates à boucles d'oreilles et martèle sa caisse claire, engeandrant un véritable travail de texture de sons. Tantôt au bord d'un lac, tantôt sous un cocotier, tantôt en Bavière dans une fanfare Guggen, le dépaysement est garanti. Nous auront même droit à un rappel, le moment de choisir un partenaire pour un ultime Madison.