Antépénultième [PIAS] Nites avant la période estivale, cette soirée du 5 mai à la Flèche d'Or présentait en tête d'affiche Liz Green, accompagnée pour l'occasion de la danoise Broken Twin et de la formation australienne The John Steel Singers.

Majke Voss Romme, aka
Broken Twin, fait son entrée sur scène accompagnée d'un guitariste/pianiste et d'une violoniste. La pop-folk délicate qui se dégage de son album
May paru le 28 avril est parfaitement retranscrite en live. Dès les premières secondes, la voix envoûtante de la jeune danoise s'empare de la Flèche d'Or et ce durant une demi-heure figée dans le temps.
Elle alterne entre piano et guitare sur des compositions à l'ambiance éthérée. De rares moments plus sauvages s'immiscent dans la prestation via l'électricité tendue du guitariste, complétée par le violon langoureux et les notes de piano mélancoliques. Mais ce sont les compositions les plus sobres qui subjuguent véritablement, à l'image des somptueuses
You Can't Put Your Arms Around A Memory et
If Pilots Go To Heaven et son final
a capella à la fin duquel Majke Voss Romme s'adresse au public, presque étonnée, d'un timide
« thank you for listening ».
Une demi-heure plus tard, c'est au tour de l'anglaise
Liz Green et sa folk folle de faire son entrée sur scène, quelque semaines après sa venue au festival Les Femmes S'en Mêlent au Centquatre. Accompagnée d'un contrebassiste, d'un saxophoniste, d'un tromboniste et d'un batteur, elle joue une heure durant son répertoire
« tragi-comic pop » comme elle aime à l'appeler, et à juste titre tant elle sait marier spleen et humour dans un univers qui lui est propre.

Croisement de Joanna Newsom et Regina Spektor à la sauce anglaise, Liz Green embarque l'audience dans un voyage onirique teinté d'une ambiance folk, bluesy et jazzy.
« I'll take you on a mythic journey with colored boats and traps and fires and death and other stuff. » C'est sur ces promesses qu'elle entame presque a capella le court
Battle, tiré de son second et dernier album
Haul Away! paru le 14 avril, sa voix révélant déjà tout son panel, à la fois déchirant et baroque. Elle poursuit avec
Haul Away!, composition à la structure jazz où les changements de rythme permettent une dynamique débridée menée par le piano fou de la mancunienne.
Alternant entre guitare sèche et piano, la chanteuse ponctue chaque chanson par un commentaire sur l'univers qu'elle instaure ce soir-là, une anecdote qu'elle a vécu ou encore, et surtout, une blague à l'humour anglais pince-sans-rire, subtil ou de second degré (avant d'entamer une chanson, elle se retourne au moment où un de ses musiciens revient des backstage où il a été quelques secondes :
« oh he's back, that's good »).
« This song is about a drunkman. It's called Rybka
, named after one of our friends. I'm not saying that he is a drunkman. But he really likes to drink ». Liz Green enchaîne les comptines blues et jazzy, constituées d'histoires à la fois touchantes et décalées et d'arrangements savoureux, à l'image de
Rybka ou encore
Displacement Song, issue de son premier album
O, Devotion.
Davantage orienté pop-folk, le show se poursuit avec la douce
Penelope et son final instrumental à la Matt Elliott.
« The next one is a love song. Actually, it's a song about wanting the person who's in love with you to go away. But it does have the word 'love' in it, so... » Derrière son piano, l'anglaise délivre un
Into My Arms à la fois tendre et jovial, avant de jouer l'instrumental
Little I uniquement au piano, sur lequel le public doit imaginer le violoncelle que l'on entend sur la version studio –
« I'll tell you when to start imagining it. » –, ce qui fait jouer l'imagination des spectateurs qui ne sont pas familiers de la chanson !

Vient ensuite le second titre tiré de
O, Devotion,
Hey Joe.
« It's a very sad song, so serious face. » Accompagnée d'une batterie discrète, comme sur la plupart des compositions, ainsi que de la contrebasse, Liz Green délivre une prestation mélancolique sur son ami imaginaire au corps humain mais à la tête d'oiseau.
L'ambiance cabaret jazzy de
Where The River Don't Flow fait à son tour des merveilles, réveillant même les plus endormis parmi une foule qui remplit maintenant deux bons tiers de la Flèche d'Or. C'est ensuite au tour de la fameuse
Bad Medicine de
O, Devotion de mettre tout le monde d'accord, notamment sur la
« mouth trumpet » que l'anglaise interprète impeccablement – comme l'aura remarqué le public qui l'applaudit une fois son solo fini !
Liz Green termine le concert sur la jazz folk touchante de
Empty Handed Blues, jouant ainsi la quasi-totalité de
Haul Away! en une petite heure, avant de revenir rapidement, seule avec sa guitare, pour une reprise poignante du
Five Years de Bowie.
L'imaginaire débordant et délirant de Liz Green lui aura au final permis de se mettre dans la poche un public amateur de musique et bien plus encore. Liz Green a ce soir dévoilé tout un univers fantasque mêlé à un humour
so british, et on peut dire que rares sont les concerts où l'on attend aussi bien les chansons que les interludes !