Avec un album dans les bacs depuis septembre dernier et déjà plusieurs tubes plaisamment entêtants qui tournent sur les ondes, George Ezra étonne et séduit grâce à un timbre de voix rare, en contraste total avec son physique de jeune premier et une maturité artistique se fondant dans les traces laissées par les plus grands maîtres folk-blues anglo-américains. Fraichement débarqué de Bristol, à seulement vingt-et-un ans, le nouvel ovni de la jeune scène UK est venu captiver la salle de la Gaité Lyrique, citée des arts numériques de Paris, sur le fil entre vent de fraicheur et nostalgie.

Pour la première partie de la soirée, une demoiselle envahie par une masse de cheveux brins bouclés apparait avec grâce sur scène. Seule, simplement derrière un clavier,
Rae Morris n'a que quelques talents à actionner pour enchanter la salle. D'une pureté qui n'a rien à envier à Florence Welch ou Loreena Mckennitt, la jeune Anglaise montre qu'elle a de l'or dans la voix et un éventail d'émotions épatant pour une soliste. Le public, soufflé par la magie du moment, l'acclame sans retenue entre deux morceaux, apparemment ravi de la découverte.
S'il l'on tend l'oreille du côté du public durant la pause, on s'aperçoit que l'anglais est prédominant dans les échanges et qu'il y a fort à parier que le chanteur originaire de Hartford a déjà su se créer une solide fanbase prête à traverser des bras de mer pour venir le voir jouer dans différentes capitales. Un bel encouragement pour une première tournée et un début de carrière sur les chapeaux de roue.

La fosse debout pleine à craquer accueille
George Ezra, lequel monte sur la scène tout guilleret, guitare à la main, et attaque la traversée avec son très country second
Cassy'O. Il poursuit sa lancée décoiffante avec les morceaux
Listen To The Man et
Blame It On Me, dont il vante le vidéo clip et sa guest star, l'acteur Ian McKellen, à voir sur Internet : « Si vous n'aimez pas la chanson, allez voir la vidéo ! » dit-il avec un sourire en coin rappelant l'adorable insolence de Joe Strummer. Le garçon au physique élancé et à la bouille d'ange mène ses morceaux d'une main assurée, navigant entre un blues tourmenté façon Johnny Cash et les épopées grinçantes, mais optimistes du côté d'un Tom Waits en début de carrière.
Les musiciens quittent momentanément la scène, laissant George à la merci de son public, sa guitare pour seul rempart. Comme rien ne semble être pour l'impressionner, voilà qu'il nous sert trois belles parts d'une session acoustique, dont une chanson hommage à son meilleur ami Benjamin Twine, ainsi qu'une reprise aussi audacieuse que réussie du maître Dylan avec
Girl From The North Country.

Lorsque ses musiciens le rejoignent, se succèdent des morceaux issus de l'album
Wanted on Voyage qui sonnent résolument plus rock et dont les arrangements apportent une patte prog-rock authentiquement british et donnent un nouvel élan au set. Le titre
Budapest reçoit l'enthousiasme voué au tube qui marche du feu de dieu, sonnant le glas du rappel et de la fin de soirée qui approche.
Pour ne laisser personne sur sa faim, George Ezra revient avec une étonnante reprise de
Girls Just Wanna Have Fun bien plus pop-rock et introvertie que l'originale signée Cyndi Lauper, et termine par le troublant
Did You Hear The Rain? qui confirme que le jeune artiste possède plus d'une nuance sur sa palette.
Un concert court, mais la qualité était de mise, et, bien que les morceaux aient tendance à se suivre et à se ressembler sans grande surprise visuelle ni travail de mise en scène, une telle authenticité est une denrée bien trop rare pour ne pas l'apprécier pleinement quand elle apparaît. George Ezra fait preuve d'une belle gamme d'outils pour séduire ainsi que d'une maturité artistique bien supérieure à celle que son jeune âge. Prochain arrêt le 12 février 2015 au Bataclan.