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The Oscillation

Paris, Maroquinerie - 30 janvier 2015

Live-report par Xavier Ridel

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Voici déjà plusieurs années que le webzine (mais aussi magazine papier et désormais label) Gonzaï nous a habitués à des soirées à la programmation souvent irréprochable. Aujourd'hui n'est pas une exception, car les trois noms apposés sur l'affiche sont plus qu'alléchants. Bravant les intempéries et la grisaille parisienne, nous nous rendons dans le 20ème arrondissement de Paris, à peu près sûrs que la qualité sera au rendez-vous dans l'enceinte de la Maroquinerie.

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C'est Butch McKoy qui se charge d'ouvrir la soirée. L'homme à la barbe et aux cheveux très fournis s'est fait connaitre lors de la représentation de Lucrèce Borgia (mis en scène par David Bobée, adapté de Victor Hugo et joué par Béatrice Dalle), dont il a composé la musique. Le français arrive sur scène devant un public un peu clairsemé, accompagné d'un autre musicien. Ce dernier, nous le découvrirons, s'occupera principalement de l'orgue et de la batterie. Les hostilités sont lancées, et on comprend assez vite que la réputation de McKoy sur scène n'est pas totalement usurpée. Malgré l'effectif réduit de la formation, le chanteur/guitariste réussit à créer une ambiance particulière au sein de la Maroquinerie et ce à grand renfort de pédales loop et de cris en tous genres.
L'impression de mysticisme qui règne dans la salle est renforcée par des jeux de lumières du plus bel effet tandis que l'homme agite les bras en l'air, invoquant une quelconque déesse. La seule chose regrettable est la sensation que Butch McKoy semble quelques fois singer Jim Morisson, empruntant à ce dernier des poses de chaman illuminé. L'ensemble reste néanmoins une très bonne surprise, oscillant entre instants lénifiants et moments d'intensité pendant lesquels le musicien embrasse du pied ses pédales de distorsion et titille la membrane de son microphone sous une pluie de rage (non) contenue. Le point culminant du concert de McKoy sera sans aucun doute la chanson The Blood, durant laquelle il torturera ses cordes vocales et sa demi-caisse. Le public, peu réactif pendant toute la durée du set, applaudit néanmoins la prestation des deux musiciens, qui quittent la scène sans mot dire.

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Après une pause d'une vingtaine de minutes, The Oscillation prennent le contrôle de la scène. La formation compte quatre musiciens : un batteur, un bassiste, un claviériste et un chanteur/guitariste. Les anglais débutent sur Waste The Day et distillent leurs chansons sous psychotropes, au croisement de TOY, des Horrors et de The Soft Moon. Leur son a beaucoup évolué en l'espace de quelques années : plus de place est laissée aux mélodies. La voix, ainsi noyée dans la réverbération et l'écho, surnage au-dessus d'un océan de notes répétitives. La Maroquinerie s'est enfin remplie et chaque chanson fait mouche : les spectateurs applaudissent à bout de bras les outsiders du psychédélisme 2.0.
Des solos de guitares surgissent de nulle part, acérés, fendus par la pédale wah du chanteur qui semble aussi apprécier fortement l'utilisation du tremolo. Bien moins lénifiante qu'auparavant, la musique de The Oscillation fait désormais montre d'un joli sens de la pop, comme en témoigne le titre No Place To Go. Ce dernier résonne dans la salle comme un tube, à l'instar de Respond In Silence et de sa ligne de basse annihilatrice de neurones. Le concert se termine sur un instrumental, après un set d'une dizaine de titres. Le public se disperse après avoir acclamé les quatre anglais, en attendant la suite.

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La soirée est bien orchestrée : à peine le temps d'aller se chercher une pinte et de fumer une cigarette que déjà Disappears a pris possession de l'arène. Très belle surprise que ce groupe américain dont les chansons flirtent plus avec l'art-rock qu'avec le psychédélisme. Leurs rythmiques répétitives sont renforcées par l'étrange jeu de guitare de Jonathan Van Herik. Ici encore, les musiciens usent à foison des effets déployés à leurs pieds. Un nuage de particules sonores emplit ainsi la salle, et l'atmosphère qui y règne est aussi indescriptible que la musique des américains. Le mélange krautrock/math-rock sur Halycon Days fait danser quelques spectateurs réceptifs, tandis que Joa et son riff si particulier tient toutes ses promesses. Si le groupe se perd parfois dans de longs méandres instrumentaux, ce n'est que pour rebondir ensuite, et réveiller les spectateurs à coups de guitares torturées et de paroles laconiquement psalmodiées. Ainsi le spectateur se retrouve-t-il rapidement perdu au sein de l'asymétrie temporelle : Disappears porte décidément parfaitement bien son nom. Les musiciens disparaissent -justement- comme ils étaient arrivés, en lançant quelques mots brefs au public hagard.

Et chacun sort de l'enceinte chaleureuse de la Maroquinerie, les yeux dans le vague, égaré dans un monde qu'il ne reconnait plus. La musique de Disappears a laissé des traces, les musiciens ayant réussi à déranger les neurones de chacun aussi facilement qu'un enfant déconstruit un puzzle. Jolie prouesse, et merci à Gonzaï pour cette belle soirée.
setlist
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