Certains parlent du « side-project » de Morcheeba pour qualifier le projet Skye & Ross emmené par Shirley Klarisse Yonavive Edwards (alias Skye Edwards) et Ross Godfrey. A l'écoute de leur setlist du soir et à en juger par l'applaudimètre d'un public venu avant tout pour jouir d'une certaine nostalgie de fin de siècle passé, on serait plutôt amené à parler d'un Morcheeba bis, éternels survivants des dommages collatéraux induits par la fin d'un trip pop à tubes, à la fin des années 90, début des années 2000.
Dans la mythique salle de l'Elysée Montmartre – ré-ouverte depuis peu sans que l'on puisse deviner qu'un jour de 2011, elle partit en fumée – la foule ne s'est pas déplacée en nombre et un sentiment apathique va s'installer, petit à petit.
Avec deux premières parties, la suédoise
Nina Johansson et l'alto-séquanais
Joolsy (Julien Flous de son petit nom) difficilement séparables en terme de mélopées tant leur style à base de folk songs, parfois agrémenté de sonorités trip-hop, est aimanté aux courant musicaux majoritaires du moment, il faudra tout le light design accompagnant le style vestimentaire lumineux d'une Skye, superbe en robe à volants (comme elle aime à en porter souvent) pour réveiller un public, un brin assoupi.
Assoupi, mais pas endormi.
Trigger Hippie, entonné dès l'ouverture du set, va donner le ton de la soirée : avec neuf hits de Morcheeba sur les seize titres joués ce soir, on ne sait plus bien si Skye & Ross défendent leur projet en noms propres ou celui, beaucoup plus populaire et bankable, de leur ex, actuelle formation, Morcheeba ? Qu'importe le contenu pourrait-on dire après tout, pourvu qu'on ait l'ivresse, d'une caresse.
Et c'est bien ce qui va emporter les votes de ce scrutin à plusieurs tours. Avec
Trigger Hippie, The Sea, Rome Wasn't Built In A Day, mais aussi et surtout
Otherwise, les trentenaires et quadras nostalgiques en langueurs vont donner du choeur, du poing levé et même du pas de danse, tombant dans les bras de leur compagne ou compagnon comme pour mieux marquer d'une valse à deux temps ce passé un peu lointain afin de se remémorer, une fois de plus comme « c'était mieux avant ». Avant le 13 novembre 2015 ; avant Cyrille Hanouna ; avant cette maudite crise... qu'il subissait déjà, mais sans en entendre parler à tout bout d'écrans.
Nostalgique jusqu'au bout de la soirée, il faudra également compter sur deux reprises, dont une de
Let's Dance de David Bowie doublement crucifié par une de ses plus grandes fans (une des pires réinterprétations entendues à ce jour ; et il y en a eu beaucoup ces derniers temps !) et un
God Bless The Child de Billie Holiday qui, chanté a capella par Skye, arrivera néanmoins à provoquer quelques frissons aux plus endurcis.
Restent,
All My Days, Light Of Gold ou
How To Fly, compositions originales du duo Skye & Ross sorties sur leur premier album, mais qui, malgré leur atmosphère éthérée et le talent vocal de Skye Edwards, ne marqueront pas vraiment les esprits, trop engourdis par les souvenirs d'une époque où More Cheeba (ndlr : plus d'herbe ! Ce sens caché fut confirmé il y a déjà longtemps par le frère Godfrey) donnait des concerts dans des arenas, à guichets fermés et fournissait les régies publicitaires en mélodies exportables sur la planète entière.
Avec son propre fils officiant aux percussions, son passé de hits trimballé en bandoulière et sa voix, reconnaissable entre mille, pour hypnotiser d'un spleen tout parisien une salle clairsemée, Skye is the limit, d'elle-même.