Le Winter Camp Festival partage avec nous un ultime rendez-vous à la Maroquinerie ce samedi 10 décembre. Pour sa 5ème édition, l'événement qui s'adonne à une multitude d'expériences musicales, a emporté son public vers une ambiance street bien différente de celles proposées auparavant. Entre rap subliminal et pop envoûtante, le concert nous fait découvrir de belles pépites artistiques.

Une atmosphère pesante et des rythmes mélancoliques accompagnés de quelques pauses plus smooth, c'est le décor que
Sub Luna City pose d'entrée de jeu. Deux ans après leur formation, ces gaillards aux voix graves et chœurs puissants surplombent beats et breaks avec un parler clair et rassurant, digne des mélodies de leur producteur d'origine. En effet, c'est bien King Krule aka Archy Marshall qui signe ces compositions hip-hop en compagnie de Rago Foot, Jadasea et Black Mat.
Pendant le show, les basses puissantes et le duo rasta mènent la foule, pourtant timide, à communier ensemble dans la fosse, telle une transe démoniaque, transformant le concert en leçon de danse avec les artistes nous indiquant de sauter (« Bounce! Bounce! Bounce! »). A la manière d'une battle, d'une marche militaire saccadée, le public entoure l'un des rappeurs, porté par le flash éblouissant des stroboscopes, tandis que les sonorités mènent lentement vers la confrontation des deux voix. En observant le public issu de la génération Z, on se dit « ils n'ont pas l'âge pour comprendre », puis, se laissant porter par les vibrations, on rectifie : il n'y a pas d'âge pour comprendre et le rap est un art transgénérationnel. Une sirène nous alerte, comme un danger proche, rappel de rapper.

Cette musique révolutionnaire accompagnée d'un débit de paroles efficace, a provoqué en chacun un groove palpable, prêt à atterrir sur des beats jazzy à la Vanilla, le producteur anglais de beats funk et électronique.
Place au sensual healing de
Jamie Isaac et ses paroles lascivement susurrées. Effet immédiat à l'écoute des premières notes de
Find The Words, son titre phare. L'entrée en scène douce et envoûtante à la lueur d'un solo de piano fait écho au dénouement d'un film sentimental. Musique salvatrice, séance de relaxation. Jamie Isaac a le timbre d'un black soul man et la fraicheur presque pop de sa jeunesse. Booty shaking sensuel dans la salle. En arrière-plan, le synthé et le plaisir instrumental que nous procure le groupe, met en valeur la voix langoureuse du jeune homme et une réelle émotion, digne d'un appel à l'aide suivi d'une musique plus intimiste. « How do you see me baby ? », c'est ce que Jamie Isaac, aussi acolyte de King Krule, essaye de transmettre avec son groupe.

Première fois en France, il maîtrise sa performance comme à la maison. C'est sensationnel. Ce slow intense pourrait parfaitement décrire la rencontre entre deux êtres qui cherchent à se découvrir à travers un corps à corps éternel et des souffles qui s'entrechoquent. Les émotions croissantes en viennent à un apogée, une explosion de palpitations d'une pureté inconditionnelle. La foule se laisse facilement porter par la mélodie qui met en scène l'un des rappeurs de Sub Luna City, intervenant pour donner un vrai charme rythmique et une pâte semblable à celle du concert précédent. Le flow, la prestance, le groove jazzy.
Sur
Softly Draining Seas, l'importance des paroles est évidente (« Why you want to meet. Your love, I can't refuse. So I will sleep with caution »). Jamie Issac a la main sur le cœur en nous annonçant la chanson suivante,
Pigeon (« About my girlfriend »). Le micro se transforme en cornet à glace et nous fondons avec lui.

La fin, davantage slamée, rythme avec plus d'énergie, révélant une facette pop et qualifiant de ballade aux effets psychédéliques la musique environnante. Jamie Isaac transporte toute la salle et fait danser son public sous une vibe bondissante et souple (« And even to this day I see. I'm on my last drip »). L'apothéose n'est pas loin, le synthé fini par nous faire chavirer. On s'en va, des constellations qui peuplent notre esprit jusqu'à l'année prochaine.
Encore une soirée qui pose la preuve que les artistes sont autant de météores qui enrichissent notre univers personnel. Longue vie au Winter Camp pour la joie qu'il fait germer en nos cœurs et ses sonorités hautes en couleur.
Rédigé avec l'aide précieuse de Mélissa Blum