Comme pour enterrer, avec les honneurs dus à son cran, une première vie d'artiste démarrée avec
Len Parrot's Memorial Lift, premier album sorti en 2002 sans grand entrain hormis de la part de médias dits « arty » ; comme pour parachever quinze années de carrière souvent galères qui l'ont vu catalogué fils de Ian Dury au mieux et dandy ridicule et sans avenir au pire ; comme un phoenix de la pop balnéaire, psychédélique et absurde à laquelle il aime se référer, Baxter Dury revient d'entre les larmes et déjoue tous les pronostiqueurs du dimanche. Avec cinq albums impeccables et ses figures de style exclusives, il s'impose enfin, là où les autres (Sean Lennon, Adam Cohen...) chevrotent encore : exister sans être engoncé dans le costume paternel.
Baxter outragé, Baxter brisé, Baxter martyrisé, mais Baxter libéré !
C'est en substance ce que
Prince Of Tears, dernier opus en date du dandy pisse-froid et, à coup sûr, première œuvre marquant la nouvelle ère Baxter, délivre au fil des dix titres de son tracklisting gravés à l'eau forte.

Se débarrasser de l'image du père, faire taire les sceptiques et, plus que tout, renaitre d'un chagrin d'amour fracassant et son inévitable parcours fléché vers les addictions aux substances euphorisantes, ou lénifiantes. C'est le parcours de guérilléro que Baxter Dury a du assurer, sans broncher ou presque durant les dernières années pour se poser, en pop-hero plus attendu que jamais par le public parisien sur la scène du Trianon en ce premier jour de décembre.
Épaulé par son amie Madelaine Hart (qui l'avait quitté après
Happy Soup), Baxter Dury entre en scène sous les ovations de la salle, la bande son du film Rocky et un peignoir de boxe floqué de
Prince Of Tears. Il le sait, il l'a compris ;
Prince Of Tears, en dehors de quelques médias contradictoires dont le fond de commerce est la nage à contre-courant, est son album charnière. Il a reçu les hommages de la presse, unanime à reconnaître le génie pop de ce grand dadais et grand timide devant l'éternel. Il lutte désormais dans une nouvelle catégorie.
« My name is... well, you all know my name and i want to thank me very much ! » ; avec l'accent cockney, cela prend une autre hauteur.
Isabel, Trellic, Cocaine Man ou
Pic Nic On The Edge... en quelques années et sans ramdam médiatique (merci à la SNCF néanmoins), Baxter Dury aura réussi, avec des compositions que l'on peut parfois trouver sommaires, mais d'où s'élèvent des lignes mélodiques et rythmiques qui n'appartiennent qu'à lui à, insérer dans les esprits des ritournelles devenant, au fil du temps, quasi populaires.
Porcelain, Miami ou
Prince Of Tears, joué pendant l'unique rappel, sont du même acabit.

Des titres qui entreront bientôt au panthéon de la pop flegmatique, intégreront les archives du spleen rock bâti sur des fondations artistiques bancales, mais ô combien créatrices. Celles construites par l'improbable croisement entre un punk poliomyélitique passé à la cold wave et à la postérité avec un seul titre, une mère artiste peintre et des parrains « 2 Tone » devenus trésor national anglais – Madness en l'occurrence – dont le souvenir et l'influence continuent de se faire sentir sur des titres comme
Oi.
Le petit Baxter qui posait aux cotés de Ian Dury sur la pochette de l'album
New Boots And Panties!! s'en est allé ; Prince Baxter s'est éveillé !