Le 7 novembre dernier, le Trabendo à Paris s'est transformé en temple. Un temple dédié à l'esprit punk rock, selon les dires de Frank Turner qui joue dans cette salle ce soir-là avec son backing band « The Sleeping Souls », présentant son répertoire mêlant subtilement des sonorités folk à l'énergie du punk. A ceux qui pensent toujours que punk rime avec agressivité et « no future », le chanteur anglais prouve que l'esprit de ce genre est plutôt la gentillesse et le respect envers chacun. Par ailleurs, dès le départ il place son concert sous le signe d'une règle d'or simple : « Enjoy yourself, but don't be an asshole ! ».
Comme pour illustrer cette maxime, Frank Turner apparaît seul sur scène avec sa guitare pour ouvrir le bal, chantant le doux Be More Kind, la chanson qui prête son nom à son dernier album, sorti en mai dernier. L'intro calme est suivie par le plus punchy 1933, autre titre de l'album Be More Kind, qui finit par enflammer le public. Ces deux premiers morceaux annoncent la couleur de la première partie du concert, lors de laquelle Frank Turner se concentre essentiellement sur la présentation de son dernier album. Une chanson sur deux est tirée de Be More Kind qui tourne autour deux thématiques : l'apocalypse d'un côté (avec des titres comme Blackout, Brave Face et 1933), et comment chacun peut y faire face en adoptant une attitude positive de l'autre côté (avec des titres comme Be More Kind et Little Changes). Le répertoire de Frank Turner oscille ainsi entre indignation et optimisme, mettant la salle, qui n'est pas tout à fait remplie, dans un état euphorique dès le début du concert.
Les titres du nouvel album alternent avec des tubes de ses deux avant-derniers disques, Positive Songs For Negative People et Tape Deck Heart. Le public chante à l'unisson sur les anciens titres comme sur les nouveaux. Toujours proche de son public, Frank Turner lance un « call and response » très réussi entre lui et le public pour le titre Brave Face en l'absence de la chorale gospel qu'on peut entendre dans la version studio.
Tout au long de son show, et pour le plus grand plaisir de ses fans, le chanteur anglais n'hésite pas à discuter en français avec le public et a même préparé une surprise pour ses fans parisiens : Eulogy, chanté en français, est l'un des highlights du concert.
Pour un moment plus intimiste, les « Sleeping Souls » quittent la scène et laissent le singer-songwriter performer plusieurs titres en solo avec sa guitare. La première chanson en solo est There She Is, dédiée à sa fiancée, comme il explique en intro, annonçant au passage son intention de se marier : « C'est ma première chanson d'amour qui finit bien », explique-t-il. Sans les sons électro qui caractérisent la version studio de la chanson, la version solo acoustique paraît d'autant plus intime et authentique ; le public est ému. Turner prolonge ce moment intimiste avec des solos de Long Live The Queen, hommage à une amie décédée, et The Ballad Of Me And My Friends.
Retour à une ambiance plus punk avec Out Of Breath et un public à bout de souffle à force de danser et de chanter. Le tube Photosynthesis conclut le concert sur une note contestataire et l'appel à ne jamais abandonner ses rêves.
Pour le rappel, Turner revient avec quatre chansons, dont Four Simple Words, une invitation énergique à danser comme s'il n'y avait pas de lendemain, suivi par Polaroid Picture dans sa version « Songbook », une version plus calme et lente que l'original où les instruments passent à l'arrière-plan pour mettre en valeur le chant et les paroles. Un moment fort de complicité pour le public qui se tient par les épaules en se balançant au rythme de la guitare acoustique.
L'emblématique I Still Believe est un autre point fort du rappel. Dégageant un feeling très folk avec la présence bien marquée du piano et de l'harmonica, cette chanson est un véritable hymne sur les pouvoirs cathartiques du rock'n'roll : « I still believe in the sound that has the power to raise a temple and tear it down » !
Ce soir-là, le rock oscillant entre folk et punk de Frank Turner a certainement érigé un temple éphémère au Trabendo, le temps d'un concert.