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Bloc Party
SPRINTS

Paris, Days Off Festival - 3 juillet 2025

Live-report par Adonis Didier

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Est-ce que vous sentez parfois que quelque chose est sur le point de se passer ? Que l'air est chaud, que l'air est suant, et que la salle est lourde ? Bienvenue à la Grande Salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris pour une nouvelle journée du festival Days Off et un nouveau concert de SPRINTS, le meilleur groupe de rock irlandais depuis que le rock et l'Irlande existent.
Un quatuor qui a rendez-vous en terre inconnue, avec l'objectif de s'attirer un nouveau public avant la sortie de leur deuxième All That Is Over fin septembre, car oui, croyez-le ou non, l'organisation a décidé que la tête d'affiche de cette soirée à guichets fermés ne serait pas SPRINTS mais bien Bloc Party. Un choix plus qu'incompréhensible pour votre humble serviteur ainsi que la troupe de douze irlandais bourrés au fond de la salle, mais apparemment les vingt ans de Silent Alarm est un évènement plus notable et bankable que le quatrième concert de l'histoire de SPRINTS dans la capitale.


Bref, j'arrête de râler, il est 20h, tout le monde est à la buvette ou collé à la barrière quand rentre en scène le renouveau du rock à guitares et ses quatre cavaliers de l'apocalypse : Karla Chubb, Sam McCann, Jack Callan, et Zac Stephenson. Something's Gonna Happen introduit un nouvel album que personne ne connaît encore, des lumières rouges tapent sur les lunettes noires de Karla qui nous annonce que quelque chose est sur le point d'arriver, que quelque chose de terrible est sur le point de balayer une salle dont l'apathie n'aura d'égal que son fanatisme d'un groupe nommé Bloc Party. Un raz-de-marée nommé Feast, l'avant-dernier single du groupe qui dévore l'insondable hauteur de la salle Pierre Boulez d'une gloutonnerie biblique, le son est parfait, tout est immense ici et SPRINTS le sont encore plus quand démarre Heavy, et que la foule donne enfin de la voix et des pieds. Etonnamment la chanson la plus connue du groupe aujourd'hui, mais après tout pourquoi pas tant la bombe est taillée pour le live, avant que le groupe n'annonce officiellement la sortie de son nouvel album en présentant leur tout nouveau single Descartes.
Un final explosif typique de SPRINTS, la vanité est le grand mal de la culture et le monde brûle juste devant nos yeux. Une phrase à retenir, je vous passe le fait que ce concert est absolument monstrueux malgré le fait que le public a l'air plus absorbé par sa bière ou par le récit de sa journée dans un open space sans âme, et voici Karla qui présente rapidement le groupe avant de demander un instant et deux phrases : « Free Palestine » et « Trans Rights Are Human Rights ». Le monde brûle et SPRINTS est là pour le dire, alors s'il vous plaît arrêtez de massacrer des gens et rendez aux trans leurs droits, oui on te voit le Royaume-Uni là, n'essaye pas de te cacher ! Un esprit littéraire dans un corps punk, Literary Mind emmène à toute allure ce concert vers son terminus, le public n'arrive pas à taper dans les mains plus de cinq secondes mais heureusement ce sera pareil pour Bloc Party, et voici Little Fix qui conclut l'apocalypse comme elle a commencé, dans le bruit, la fureur, et un sang qui n'est vraisemblablement pas le nôtre.


Voilà, c'était SPRINTS au festival Days Off, j'espère que vous avez aimé, et... quoi, y a quelqu'un qui joue après ? Bloc Party ? Mais ils ne sont pas morts, eux ? Les vingt ans de l'album ? Celui qui est sorti quand j'avais dix ans ? Eh oui, Silent Alarm a vingt ans, tout cela ne nous rajeunit pas, un album que j'ai découvert en jouant à SSX On Tour sur PS2, fantastique jeu de snowboard à la bande-originale qui ressemble aujourd'hui à une compilation pour jeunes darons fans de The Hives, LCD Soundsystem et Bloc Party. Autant dire que Silent Alarm est l'un des albums que j'ai le plus écoutés pendant mon adolescence, alors il n'était pas question de manquer son anniversaire, et promis j'arrête de raconter ma vie parce que voici enfin venir Kele, Russell, Louise, et Harry, un Harry Deacon qui rentre d'ailleurs tout juste de la tournée australienne de Palace terminée deux jours plus tôt, bonjour le décalage horaire.
Mais pas de quoi entamer la bonne mise en route de cette tournée d'été des festivals européens, et de toute façon So Here We Are comme on dit de l'autre côté de la Manche. Pas d'album dans l'ordre, toutes les chansons de Silent Alarm ne seront d'ailleurs pas jouées ce soir (spoiler : les trois dernières), et c'est une petite surprise pour qui n'a pas surveillé toutes les setlists depuis un an. Mais on ne va pas bouder notre plaisir devant She's Hearing Voices, la fosse se met enfin à bouger, les lumières et les pilules rouges et bleues dansent dans le ciel de la salle Pierre Boulez, Hunting For Witches nous rappelle que le deuxième meilleur album de Bloc Party est tout simplement son deuxième, Mercury en rétrograde nous rappelle que Intimacy c'était par contre beaucoup moins ouf, et hop retour au premier album. Un retour si rapide que Kele en a craqué son pantalon, lui qui essaye comme il peut de mettre l'ambiance sur des chansons dont les trois-quarts de la salle se fout, et même Price Of Gasoline et Blue Light auront droit à des claps plus que timides.


Un public qui applaudit et hurle à chaque coupure de la sono, mais qui visiblement n'a pas encore compris qu'on avait aussi le droit de bouger pendant les chansons, enfin ça c'était jusqu'à Banquet et un son franchement brouillon dans lequel on n'entend qu'une guitare sur deux, mais la foule s'en moque et n'attendait que ça depuis deux heures, alors ça va évidemment partir doucement en sucette jusqu'à Traps, seule chanson du pourtant vraiment bon album Alpha Games, et aussi le dernier en date du groupe. Un solo final excellent dont on entendra ce que la sono voudra bien nous en laisser, et force est de constater que, fait particulièrement rare, les balances étaient meilleures pendant la première partie. Heureusement le highlight de la soirée viendra d'un changement de pantalon en pleine Different Drugs, décidément roadie est un job qui demande une belle polyvalence et beaucoup d'auto-dérision, pendant que le public écoute poliment ces quelques réminiscences de l'album Hymns dont tout le monde avait déjà oublié l'existence. Une soirée dont on aimerait dire plus de positif, mais le plus positif de la soirée sera sans nul doute la fin complètement folle de Positive Tension suivie pour conclure de Like Eating Glass, première chanson de l'album et pour une fois la dernière.
Enfin la dernière... On sait tous qu'il en manque au moins deux, alors évidemment le groupe revient, Signs et The Pioneers sont du plus bel effet devant ce grand drap blanc éclairé d'un bleu froid et électrique, cette ambiance de plaine enneigée, de lac gelé à l'horizon porté disparu dans la brume emblématique de l'année 2005. On apprécie un poil moins les spots qui visent le plafond et qui par réflexion allument l'intégralité de la salle, créant par intermittence le désagréable sentiment qu'il est l'heure d'y aller alors qu'on peine à se mettre dedans, mais une fois n'est pas coutume le groupe va nous sortir un hélicoptère de son chapeau et on pardonnera tout. Helicopter s'envole et la foule avec, la fosse tournoie comme les pales de la libellule géante, le groupe qui paraissait parfois peiner dans les chansons les plus relevées semble avoir vingt ans de moins, et on se dit que si seulement tout le concert avait ressemblé à ça...

Mais bon, Flux et évidemment This Modern Love concluent le bal de la plus belle des manières, et même si Bloc Party commencent à avoir un air de groupe Best Of que l'on va voir autant par amour que par nostalgie, il n'en reste pas moins que les gusses ont quand même parmi les chansons les plus mythiques de toute une décennie, et ça personne ne pourra leur enlever. Et si je devais conclure parce qu'il va être temps, je vous dirais de ressortir un peu plus souvent Silent Alarm de la pile, mais surtout d'y faire une jolie place pour le deuxième album de SPRINTS, un All That Is Over qui s'annonce déjà comme le meilleur album de l'année, et non je ne serai pas le moins du monde objectif ce soir, car être objectif c'est bon pour les télescopes et les career managers.
setlist
    SPRINTS
    Something's Gonna Happen
    Adore Adore Adore
    Feast
    Heavy
    Descartes
    Shadow Of A Doubt
    Up And Comer
    Literary Mind
    Little Fix

    BLOC PARTY
    So Here We Are
    She's Hearing Voices
    Hunting For Witches
    Mercury
    Price Of Gasoline
    Blue Light
    Song For Clay (Disappear Here)
    Banquet
    Traps
    Different Drugs
    The Love Within
    Blue
    Positive Tension
    The Prayer
    Like Eating Glass
    ---
    Signs
    The Pioneers
    Helicopter
    Flux
    This Modern Love
photos du concert
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