Ça n'est plus un son que va faire retentir notre boîte à « mieux vaut tard que jamais » mais une sirène digne des alertes au tsunami qui peuvent se faire entendre sur les villes côtières. Nous sommes en octobre 2025 et c'est parce que nous sortons enthousiasmés de la prestation de Basht. en tête d'affiche pour la première fois à Paris, au POPUP!, que nous rattrapons très rapidement notre retard sur la sortie du second EP de la formation paru en mai dernier et intitulé Bitter And Twisted.
Pourquoi ce rush, me direz-vous ? Tout simplement parce que Basht. vont probablement se trouver une place plus que méritée dans le futur top EPs 2025 de la rédaction, celui qui permet aux membres de l'équipe de se confronter à grand coup de gueulantes et de dossiers qui volent pour déterminer quels seront les meilleurs espoirs sur lesquels miser nos quelques deniers pour l'année à venir. Le quatuor dublinois cochant déjà pas mal de cases dans notre cahier des charges du parfait groupe indie rock, autant dire qu'il vaut mieux faire amende honorable s'agissant de notre retard et vous exposer rapidement tout le bien que nous pensons d'eux.
Parmi celles et ceux qui ont participé à la dernière édition de la Block Party, une petite poignée de chanceux ont su miser en cet après-midi ensoleillé du vendredi sur le menu alors offert au Badaboum, qui cachait en son sein probablement les nouveaux meilleurs espoirs de la scène dublinoise actuelle. Basht., originellement un quintet, est à ce jour composé de Jack Leavey au chant et à la guitare, Sam Duffy à la guitare, Louis Christle à la basse et Luke O'Neill à la batterie. Nos amis ont officiellement débuté en 2022, avec un tout premier single Never Love diffusé sur les plateformes de streaming. Difficile alors de marcher dans les traces des grands frères alors en pleine ascension vers les cieux qu'étaient Fontaines D.C. car nous y trouvons quelques points communs, notamment le chant rauque, un peu incertain et empli de cette profondeur qui fait oublier que nous avons à faire un jeune chanteur d'une vingtaine d'années.
Bitter And Twisted porte d'ailleurs en lui la même colère que l'on pouvait ressentir dès les premières notes de Dogrel en 2019. Des sentiments abrasifs, portés par une musicalité imprégnée d'une tension que savent parfaitement retranscrire les guitares fortes et vibrantes. Point de tonalités fracassantes non plus, Basht. font le choix de distiller au compte-goutte leurs sentiments. L'énergie monte crescendo, les couplets sont plus posés et la rage éclate au moment des refrains, comme sur Stockholm ou l'excellent titre d'ouverture Vain, qui lui-même n'est pas sans rappeler la douce noirceur qui régnait chez certains au tout début des années 90, ces mêmes qui ont fini dans des stades et qui amorcent un retour miraculeux en cette toute fin 2025, partout sauf en France (suivez mon regard, il louche vers Oxford). Mais sans aller jusqu'à vouloir absolument faire des comparaisons, reconnaissons que le répertoire de Basht., bien que parfaitement mis en œuvre, ne fait pas non plus dans le révolutionnaire. C'est un rock alternatif sombre, alliant fureur et mélancolie, des ingrédients honnêtes mais dont il ne fait pas non plus abuser pour ne pas tomber dans la parodie Joy Division-esque. Ici, Basht. suivent fidèlement le chemin tracé par leurs ainés, et c'est plutôt du côté de The Muder Capital que nous tendons ici.
Le titre Bitter And Twisted évoque en effet les tirades écorchées de James McGovern dans le Don't Cling To Life du premier album du groupe, quant Sacred Life et Burn se dirigent plutôt vers les sentiers un peu plus lumineux comme ce que font actuellement Cardinals, autre très bonne formation irlandaise, issue de Cork. Tout n'est donc pas si noir chez Basht., le dernier titre Sirens se positionnant dans le disque comme une porte ouverte vers une ambiance peut être un peu moins lourde, cette chanson ayant également clôturée le set au POPUP! de façon très dynamique et sur des sensations plus que positives.
Bitter And Twisted ne fait qu'enfoncer le clou de la domination irlandaise du moment dans le registre de l'indie rock. La jeune scène qui ne cesse de s'y développer nous montre le chemin, formant comme une tribu solidaire et surtout ultra fière de porter une autre image du rock issu de leur verdoyant pays, trop longtemps dissimulé par l'ombre gargantuesque de U2. Avec d'autres challengers très talentueux tels SPRINTS, Just Mustard ou Cardinals, Basht. portent à leur tour de façon brillante le rock irlandais de ce premier quart de XXIème siècle. Vivement que leur talent se voit confirmé avec un premier LP en 2026.