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Malcolm Middleton

Interview publiée par Jean-Christophe Gé le 14 mars 2007

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Rencontre dans un café qui ne paie pas de mine avec Malcom Middleton, songwriter écossais, bien plus qu’un ancien Arab Strap. Le personnage est calme et se livre en toute sincérité, tellement naturel que cela lui donne un caractère étrange...

Ta carrière solo a commencé comme un side project d’Arab Strap, mais tu sors aujourd’hui ton troisième album...

Non, en fait je ne l’ai jamais considéré comme un side project, mais comme un moyen d’écrire des chansons qui me touchaient. A cause d’Arab Strap les gens parlaient d’un side project mais ce n’était pas vraiment le cas, surtout à partir de mon second album qui je pense est plus universel et plus facile d’accès que ce que nous faisions avec Arab Strap.

Tu es en train de mettre par terre tous les enchaînements pour le début de l’interview.

Ah bon ? Merde, je suis désolé. Qu’est ce que tu allais poser comme question ?

Et bien lors de la sortie d’Into The Woods, tu as dit que tu avais écrit cet album parce que tu t’ennuyais entre deux tournées d’Arab Strap, ça sonnait pourtant comme un projet solo...

En fait comme je suis un musicien, je me sens obligé de travailler et d’écrire des chansons. Tout le monde travaille, ce n’est pas parce que je suis musicien que je devrais avoir plus de temps libre. Je culpabilise de ne pas mieux l’utiliser et de toute façon j’ai aussi le besoin de créer. Tu sais, un ébéniste quand il fabrique pendant deux mois une nouvelle chaise, il n’en passe pas après dix à voyager dans le monde entier pour la montrer. Il en commence une autre. Moi je ne voulais pas arrêter d’écrire de la musique.

Alors si ce n’est pas un side project, mais est-ce que c’est quand même un album solo ? Il y a de nombreux musiciens invités sur ton disque...

J’écris presque tout, les parties de guitares et les arrangements de cordes. Mais comme les musiciens viennent avec leur propre sensibilité et leur sens de l’harmonie ils apportent quand même une touche personnelle à mes chansons. Mais ça reste mes chansons. En revanche, même si j’aime bien jouer ces chansons seul à la guitare comme je le fais en ce moment quand je suis invité à la radio, je vais faire la tournée avec cinq musiciens. Si je faisais une tournée seul avec ma guitare, je ne rendrais pas justice à l’album.

Le premier album que tu as fait avec Arab strap était très brut et presque bricolé, maintenant tu parles d’arrangements de cordes. As-tu à la base une formation musicale ou as-tu juste appris plein de choses à force de jouer ?

Non, non, c’est vrai qu’au début nous n’étions pas très bons, mais je crois que ça donnait un certain charme à nos chansons. Certains aiment et d’autres ne veulent même pas appeler ça de la musique, mais pour moi, l’essentiel n’a jamais été d’être un « musicien » mais de créer des chansons et des atmosphères. En 11 ans, nous sommes devenus de meilleurs musiciens. Pour les parties de cordes je les joue sur un clavier et après je les transpose.

Quand nous t’avons interviewé à la sortie de ton deuxième album, tu nous as dit que tu en étais beaucoup plus content que du premier. Est-ce que c’est aussi le cas pour celui ci ?

Oui, tout à fait. A chaque fois j’essaie d’écrire les meilleures chansons possibles, mais pour A brighter Beat je suis particulièrement content de la production.

Quelle est ta chanson préférée de l’album ?

Probablement A Brighter Beat parce que c’est la dernière chanson que j’ai écrite et même si elle est assez triste, elle reste pleine d’espoir, par opposition à Love, Death And Depression où il n’y a pas d’espoir. Je n’écris pas mes chansons en studio, mais tout au long de l’année. Aujourd’hui j’en ai déjà quatre ou cinq nouvelles qui ont été écrites après l’enregistrement.

Tu es une bête de travail ?

Oh non, bien au contraire, je sais à quel point je peux être fainéant !

Quand je t’ai vu sur scène en solo à la Guinguette Pirate il y a quatre ans tu avais l’air assez timide. Mais aujourd’hui tu chantes des chansons très personnelles sous ton propre nom, sans jouer de rôle ou porter un déguisement comme d’autres chanteurs. Comment fais-tu pour te protéger ?

Oh je me rappelle de ces deux concerts, c'était chouette. En fait quand je joue mes chansons, je le fais de la manière la plus sincère possible et je me moque de ce que les gens pourront en penser. Il y a des fois où je n’ai pas envie de jouer, mais j’ai un engagement alors je le fais et les gens qui sont là m’écoutent et me jugent et même si je ne me sens pas bien je le fais. Il y a beaucoup de gens dans cette industrie qui se disent honnêtes mais qui ne le sont pas, y compris parmi les songwriters, alors moi quand je chante ce que je ressens. Les gens ne me croient pas toujours sincère, c’est finalement ça qui me protège. On m’a collé une étiquette de chanteur misérabiliste, mais mes paroles sont de plus en plus optimistes. C’est quelque chose que les gens comprennent en écoutant ma musique, mais malheureusement, pas ceux qui en font les chroniques.

Justement y aurait-il une dose d’humour dans tes chansons, car tous ces titres très sombres, ça ne peut pas être pris au premier degré ?

La part d’humour qu’il y a dans tout ça ne vient pas de l’ironie. Mais plutôt du fait que les gens pensent que c’est un genre que je me donne, alors que tout est vrai. Speed On The M9, sur mon premier album, c’est une chanson sur le fait d’être à la recherche de sensations fortes, de vouloir provoquer quelque chose de fort, en conduisant à plus de 100 km/h sur des petites routes sans ceintures de sécurité. C’est quelque chose que j’ai vraiment fait une nuit. Le lendemain j’ai trouvé ça terriblement imbécile, mais pendant que je conduisais, j’étais bien en train d’écrire cette chanson. Les gens ont trouvé ça drôle, mais sur le moment ce ne l’était pas du tout. C’est ce malentendu qui est drôle.

C’est très honnête de raconter ça ?

J’ai tellement aimé et écouté des chansons très sincères quand j’étais plus jeune, des chansons qui m’ont beaucoup aidé. Aujourd’hui je voudrais que mes chansons puissent procurer à quelqu’un les mêmes sensations.

Merci d’avoir répondu à ces questions, est-ce qu’il y a quelque chose que tu voudrais ajouter et dont nous n’avons pas parlé ?

Oui, de la guerre en Irak. [air grave et sérieux]

La guerre en Irak ? [air ahuri]

Non je plaisante... [éclat de rire final]

S’ensuit une discussion hallucinante, décousue et impossible à transcrire sur les iPod, les cassettes, et une loi au Japon qui interdit de manger en marchant de la rue, mais pas de manger dans la rue.