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Eugene McGuinness

Interview publiée par Kris le 1er janvier 2009

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Grand espoir de la pop anglaise classieuse et précieuse, Eugene McGuinness est l'une des révélations de l'année suite à la sortie de son premier album éponyme remarqué. Nous avons profité de son premier passage à Paris pour lui poser quelques questions...

Peux-tu te présenter pour les personnes qui ne te connaissent pas encore ?

Mon nom est Eugene McGuinness, et je suis en quelque sorte un musicien… Je chante. Je suis un homme/chanteur on va dire (rires)

Maintenant que ta musique commence à être reconnue aussi bien en Angleterre qu’en dehors, comment appréhendes-tu ce début de succès récent ?

C’est en cours actuellement, alors c’est un peu délicat de se poser car tout bouge tout le temps, je fais toujours plein de choses. C’est une bonne chose cependant que les gens écoutent ma musique de manière graduelle et constante, et c’est très amusant à vivre, très épanouissant, car ce sont toujours de nouvelles personnes qui viennent s’ajouter à la troupe.

Ton premier album est sorti, es-tu encore en plein dedans, ou bien te distancies-tu de lui désormais, comme passé à autre chose ?

D’une certaine façon, oui. Le prochain est complètement établi dans ma tête. Toutes les chansons sont là. Mais pour ce premier album, je n’en suis pas encore du tout lassé. J’ai encore beaucoup de plaisir à jouer ces chansons, elles me semblent encore tout à fait neuves, bien que certaines d’entre elles datent d’il y a déjà plus d’un an, et côtoient des plus récentes que j’aime également. Cet album n’est pas encore éloigné de moi. Je ne crois pas qu’il le sera un jour. J’espère que non, même si c’est probable que si. En tout cas, je suis impatient d’enregistrer de nouvelles chansons. Je suis très chanceux en ce moment, alors autant en profiter !

Quelles étaient tes influences étant plus jeune, bien avant que tu ne songes à pouvoir enregistrer un album ?

C’était un mélange entre Top Of The Pops et les trucs qui passaient à la télévision et à la radio comme Gangsta’s Paradise ou le dernier single de Madonna de l’époque ; mais également, la collection de disques de mon père qui était un maniaque des Beatles et de Dylan, et il les avaient tous. Il y avait aussi des disques de blues ou du Lou Reed. A mesure que je grandissais, il y avait toujours un disque qui tournait. Sur le chemin de l’école, il y avait de la pop, bien que j’ai manqué un peu la brit-pop à l’époque, j’y avais droit aussi, j’aimais beaucoup Blur et Oasis. Puis rentré à la maison, pendant que mon père faisait la cuisine, il y avait Highway 61 ou Revolver, et j’appréciais vraiment ça.
Mais quand les Strokes, les White Stripes, les Yeah Yeah Yeahs et tous ces groupes de New-York ont débarqué, des millions de groupes sont arrivés, les choses ont commencé à changer, les enfants ont voulu des guitares à Noël ; et j’ai été de cette période également.

Tu es pourtant plus souvent comparé à des songwriters sixties…

Ce n’est pas pour cracher sur tous ceux qui écrivent sur moi, mais la vérité est que ces personnes qui écrivent ne peuvent pas consacrer trop de temps à un album, c’est leur travail ; pour eux, les albums ne sont que des tickets de bus, ou des reçus. A chaque fois que je lis quelque chose sur moi, c’est toujours pour me comparer à Morrissey, John Lennon ou aux Arctic Monkeys.
Je ne peux pas prendre ça sérieusement parce que je sais que les gens ne consacrent plus autant de temps à écouter des disques. J’aime beaucoup ce que je fais, et ça me plaît beaucoup. Ma mère aime beaucoup (rires). Je m’avance peut-être un peu, mais lorsque l’on me compare comme ça, j’imagine que ces références ont été trouvées un peu trop rapidement. Quelqu’un dit que je sonne comme les sixties, ça me va. Mais il n’a pas pu être là assez longtemps pour découvrir des choses à mon sujet qui pourrait contredire ce propos. Le fin mot de l’histoire étant que je me fiche de ce que les gens disent, tant qu’ils aiment la musique.
J’apprécie juste qu’ils aient pris quelques minutes de leur temps pour écouter ce disque, car tout le monde est occupé. Qui que nous sommes, quoique nous fassions, nous sommes occupés.

Tu es quelqu’un de très occupé ?

Non, mais je parviens tout de même à remplir mon emploi du temps. C’est comme cette chanson de Jeffrey Lewis : « How come I get nothing done but always feel so busy ? » (« Comment se fait-il que je n’arrive à rien et pourtant ai l’impression d’être si occupé ? »). Nous sommes tous occupés.

Nommer ton album « Eugene McGuinness » était-il un moyen de signifier que cet album est une part intime de toi-même ?

Deux choses : Premièrement, c’est classique, beaucoup de jeunes groupes sortent leur premier album avec le nom du groupe, c’est sobre, ça n’en dit pas trop. Mais la raison la plus importante était que je n’arrivais pas à trouver quelque chose de mieux. Je n’arrivais pas à penser à quoique ce soit sans en rire, ou bien c’était le pire nom imaginable.

Tu avais pensé à quoi ?

Tu ne veux pas savoir (rires). Ce n’était même pas drôle. C’était juste nul. Complètement nul. C’était triste, comme un pigeon mort. Tu vois ce que je veux dire. Si je te disais ce à quoi j’avais pensé, tu réagirais de la même façon que face à un pigeon se ferait rouler dessus (rires). Alors je n’ai finalement utilisé aucune de ces idées.

Comment se passe pour toi la phase d’écriture des chansons ?

C’est différent. Parfois j’ai les paroles dans son ensemble. Parfois il se passe des jours sans musique où je ne fais qu’aligner des mots. Des paroles d’une chanson, des titres d’autres etc. Mais ce ne sont même pas forcément des bouts de chansons, ce sont des mots dont je ne sais parfois pas encore quoi en faire. Mais d’autres fois, je me pose juste devant le piano, ou joue un peu de guitare et je trouve des mélodies ; mais ces mélodies ne peuvent pas rester des jours en suspens, les mots doivent s’y poser dans l’instant, et là d’autres types de chansons apparaissent. Je ne m’y mets pas trop sérieusement non plus, les jours où je n’écris que des mots, je fais juste en sorte qu’ils sonnent bien. Pour moi, c’est plus une question d’instinct. Je ne peux pas avoir des brouillons rester tel quels pendant trop longtemps, sinon ça devient lassant et je passe à autre chose.

Tu composes les chansons toi-même, mais tu as enregistré cet album avec un groupe. Comment cela s’est-il passé, de communiquer ton univers propre à un groupe qui doit le retranscrire ?

Ce groupe qui joue avec moi, sont de très bons amis. Mon petit frère en fait parti, qui est aussi un ami j’imagine (rires). Je n’avais pas à leur communiquer quoique ce soit, ni même à leur dire quoique ce soit. Nous sommes tous relax. La musique est une pure source de fun. Si tout est trop étudié, tu peux perdre toute l’essence de la chose. Quand j’écoute un disque, parfois je peux entendre quand il s’agit d’un groupe de session en accompagnement. Si un groupe de personnes joue pour leur propre amusement, c’est ce que les gens veulent. C’est ce que je recherche dans tous les albums que je possède. Même si c’est imparfait, quand on sent que les musiciens prennent plaisir, c’est l’essentiel.

Comment es-tu rentré en contact avec Domino ?

Ils m’ont contacté quand j’avais 19 ans. Ils ont dû entendre un titre sur MySpace, Mais ça s’est fait lentement. Etapes par étapes, et en me laissant aller à ma propre vitesse. Je suis meilleur quand on me laisse tranquille. Ensuite, ça a continué de manière assez stable, ce qui est mieux que d’avoir un éclairage et une exposition soudaine. C’est mieux pour moi.

Domino est considéré comme l’un des derniers gros labels indépendants d’Angleterre. Comment vois-tu ton intégration dans une maison telle que Domino ?

Je ne peux rien dire sur Domino en tant que label, parce que je n’y connais rien. Mais en tant que personnes, celles avec qui je travaille régulièrement, ils sont fantastiques. Je leur suis très reconnaissant, car ils sont excellents, car ils sont très passionnés par ce qu’ils font. Je ne sais pas ce que font les labels en général, j’imagine qu’ils sont tous diaboliques. Dans ma tête, ce sont le mal. Domino étant le chevalier à l’armure brillant dans la nuit (rires). Je suis presque certain de ne pas être trop éloigné de la vérité. Pour être honnête, les autres labels ne sont probablement pas sympathiques parce que ça les dépasse, ça ne dépend plus d’eux. Le cliché du gros patron en costume fumant des cigares et ruinant les jeunes talents ne doit plus vraiment exister aujourd’hui, non ?

A quoi vont ressembler tes 6 prochains mois ?

Je dois aller jouer à des endroits où je n’avais jamais joué, comme Berlin, ou en Italie, je ne sais pas ce que ça va donner. Après je retournerai en Angleterre pour probablement d’autres concerts. J’espère. Et des enregistrements. Ca, c’est certain.